Dante Alighieri, Miquel Barcelo : La Divine comédie, traduit de l’italien par Danièle Robert,
Actes Sud, 2023, trois volumes sous coffret, 544 p, 147 €.
Dante Alighieri & Michael Meier : En Enfer avec Dante,
traduit de l’allemand par Emmanuel Gros, Casterman, 136 p, 19 €.
Atteindre le paradis dantesque n’est pas un chemin aisé, plutôt encombré de ronce et de gel, de remords cuisants, de sataniques effrois, enfin illuminé de ravissements angéliques inaccessibles au mortel. A fortiori lorsqu’il faut le traduire en un autre idiome que celui fondateur de Dante Alighieri, poète autant du dolce stil nuovo que du fracas des spirales infernales. Cherchons, après celle plus qu’honorable de René de Ceccatty[1], la traduction idéale de La Divine comédie, celle digne de figurer aux cotés de la voix des anges. Nous croyons trouver le volume le plus commode avec cette traduction de Joachim-Joseph Berthier, le plus élégant avec Jacqueline Risset et Botticelli, quand surviennent l’Enfer et le Purgatoire, sous les vers rimés de Danièle Robert. Le choix, cornélien, n’a cependant que l’avantage de nous faire revisiter le démoniaque et divin chef d’œuvre, en beauté, mais aussi en toute parodie dessinée par Michel Meyer, qui ne s’embarrasse pas d’un vain respect pour exercer l’art de traduire.
Récit d’aventure en vers semé d’embûches et de joies, la Comédie, dont le titre bientôt affublé de l’adjectif « divine » s’explique parce qu’elle présente une fin heureuse et non tragique, est également un traité de théologie morale, catalogue des péchés et des peines infernales, purgation vers le salut, et enfin extase mystique.
Après un chant inaugural dans lequel Dante est sauvé des trois animaux du vice par Virgile, l’œuvre se joue en trois parties. Chacune d’entre étant distribuée en trente-trois chants, la composition mathématique complexe est évidemment symbolique, eût égard à la Sainte Trinité, sans compter la dimension cabalistique qui nous reste largement inaccessible. D’ailleurs l’action commence le Vendredi saint huit avril 1300 pour s’achever le jeudi de Pâques treize avril 1300. Béatrice apparait à l’exact milieu du chant XXX du Purgatoire, en vue du Paradis terrestre, alors que doit s’effacer le docte païen Virgile, quoique prétendument annonciateur du Christianisme dans sa quatrième églogue. Le chiffre neuf est le chiffre mystique par excellence ; l’Enfer étant divisé en neuf cercles, le Purgatoire en neuf terrasses, le Paradis en neuf cieux concentriques, conformément à la cosmologie médiévale. Au dernier chant de l’Enfer siège Satan, l’ange du mal, là où la profondeur infernale se retourne vers la montagne du Purgatoire, qu’il faut atteindre en s’accrochant aux poils du monstre pour effectuer enfin une volte-face salvatrice, de toute évidence symbolique. À ce neuvième cercle infernal habité par Lucifer répond au loin le neuvième ciel paradisiaque, celui de la « vision intuitive de Dieu ».
Conformément à la pensée médiévale, Dante s’appuie dans Le Banquet sur une doctrine qui ne doit pas échapper au lecteur de la Comedia : « Les écrits doivent être entendus et doivent être expliqués en quatre sens. Le premier s’appelle le sens littéral, et c’est celui qui ne s’étend pas plus loin que la lettre du texte proprement dite ; le second s’appelle le sens allégorique, et c’est celui qui se cache sous le manteau des fables […], le troisième s’appelle le sens moral, et c’est celui que les lecteurs doivent chercher avec grande attention dans les œuvres écrites […], le quatrième s’appelle le sens anagogique, c’est-à-dire « supersens » : et c’est celui que l’on a parce qu’on explique au point de vue spirituel un écrit qui, tant par le sens littéral que par les choses signifiées, représente les choses de la vie éternelle[2] ». Au voyage parmi les trois espaces, s’ajoutent les trois initiateurs. Le poète et guide Virgile, vient de l’Antiquité, quand la Dame d’Amour, Béatrice, appartient à cet absolu, à la fois platonicien et chrétien, que l’auteur et ascensionniste peut rejoindre en se lavant de ses péchés, alors que l’amour aussi mystique que le poème lui permet de la connaissance de Dieu et la vie éternelle. Au Paradis, la connaissance des mystères de la Trinité et de l’incarnation de Jésus, est assurée grâce à l’intervention de Saint Bernard, lui procurant une ineffable délectation, grâce à la fusion de l’effort physique et mental du poète (qui est aussi la raison hellénique) et de la grâce divine.
Guelfe blanc, Dante avait une vision déjà moderne de la politique, grâce à laquelle il s’agit de s’opposer à l’immixtion du Pape dans la vie politique et de soutenir l’indépendance du pouvoir temporel, conformément au message du Christ : « Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu[3] ». Ce pourquoi, alors qu’il écrit entre 1304 et 1321, de nombreux Papes sont par ses soins jetés dans son Enfer, dans la cinquième bolge du huitième cercle, celui des trompeurs : Nicolas III, Boniface VIII, et Clément V, qui régnèrent sur l’Eglise entre 1277 et 1314. Ce que l’on lit également au chant XVI du Purgatoire :
« L’Eglise de Rome, dis-le désormais,
Pour avoir les deux pouvoirs mélangé,
Tombe dans la boue, elle et eux souillés. »
Tenons-nous entre nos mains respectueuses l’édition française parfaite de La Divine comédie ? D’autant qu’elle se présente sous la forme d’un seul volume agréablement relié, plus maniable qu’un Pléiade au papier précieux. Il peut paraître étrange de rééditer une traduction de 1924. À ce compte, celle de Fiorentino[4], qui fut la préférée de Baudelaire, mériterait-elle cet honneur ? Joachim-Joseph Berthier, qui consultait volontiers cette dernière, place la patience de son travail sous l’autorité de la strophe du Chant IX de l’Enfer :
« Ô vous qui avez l’intelligence saine,
admirez la doctrine qui se cache
sous le voile des vers étranges ! »
Didactique et poétique sont par conséquent inséparables. Aussi Berthier vise-t-il la littéralité : « Je voulais une sorte de mot à mot, qui serait pour quelques-uns comme un guide dans la lecture et l’intelligence du texte original ». Le risque est qu’un souffle poétique propre à la langue française soit éraillé, sinon absent.
Au contraire du choix fait par René de Ceccatty, les notes en bas de page sont abondantes et, quoique concises, éclairantes. Sachons ainsi que la panthère, le lion et la louve qui assaillent le poète au premier chant, symbolisent respectivement la luxure, l’orgueil et l’avarice. Sinon comment savoir en effet que la lettre « P » gravée sept fois avec son épée par l’ange du Purgatoire sur le front du poète signifie les sept péchés capitaux ? Un index (ou « Table doctrinale abrégée »), quoique trop bref, est particulièrement bienvenu : ainsi sur les anges, sur l’art, sur les apparitions de Béatrice, sur la gourmandise… Vous saurez tout sur la « hiérarchie des anges », sur l’ange portier du Purgatoire, au chant IX : « je le vis assis sur le degré supérieur, / Et tel dans sa face que je ne pus le supporter ». Ce qui a peut être inspiré Rainer Maria Rilke dans sa première Elégie de Duino.
Mais l’on ne manquera pas d’apprendre, au chant V du Paradis, le secret de la liberté :
« Le plus grand don que Dieu dans sa largesse
fit en créant, et qui à sa bonté
est le plus conforme, et celui que plus il apprécie,
ce fut la liberté de la volonté,
dont les créatures intelligentes,
toutes et seules, furent et sont dotées. »
Car seul le libre-arbitre, conformément à Saint Thomas d’Aquin (notons que Berthier contribua à une édition critique de ce dernier), permet d’atteindre le bien moral. Dante lui-même, n’at-il pas fourni tant son éthique d’écrivain que la morale du traducteur, en son chant IX du Purgatoire ?
« Lecteur, tu vois bien comment j’élève
mon sujet, et si donc avec plus d’art
je l’embellis, ne t’en fais point merveille. »
Iconique est devenue la traduction de Jacqueline Risset, lexicalement précise, en vers libres (en général de dix à douze syllabes), d’abord parue en 1985 chez Flammarion. L’on peut sans doute lui appliquer ce que dit Dante, à l’orée du Purgatoire : « Mais qu’ici la morte poésie resurgisse, / ô saintes muses, puisque je suis à vous ». De l’aveu de l’éditrice, Diane de Selliers, « sous sa plume, les vers de Dante sont des étoiles qui nous guident vers notre propre lumière ».
Car voici cette traduction magnifiée par la totalité des dessins de Sandro Botticelli, soit quatre-vingt-douze, venus de de Berlin et du Vatican. C’est à la fin du XIV° siècle que Lorenzo di Pier Francesco de Médicis commande à l’artiste ces illustrations faites au moyen d’une pointe métal sur le parchemin, puis rehaussées à l’encre. Faut-il regretter que Botticelli n’ait pu ajouter la couleur à ses dessins ? Ils ne sont en effet qu’une toute petite poignée à briller de rouges, de bleus et de bruns, dont le fameux « cratère » de l’enfer. Mais à la manière d’une bande dessinée moderne, la liberté et la grâce du trait animent en cette édition somptueuse une voix narrative continue, parmi laquelle la concision du trait n’a d’égale que la qualité de la suggestion poétique. Comme lorsque que de simples flammèches entourent l’envol de Béatrice et Dante…
C’est faire preuve d’humilité, comme Jacqueline Risset, que d’offrir une édition bilingue de l’Enfer et du Purgatoire, chaque double page faisant jouxter l’original de Dante et la prise de risque de la traduction. Ainsi pour mieux respecter la langue vulgaire florentine, les terzine (strophe de trois vers) et les endécasyllabes (vers de onze syllabes), Danièle Robert use de tercets rimés, et c’est là un défi et une beauté nouvelle.
Forcément, puisque rimes françaises et décasyllabes il y a, la littéralité du mot à mot est impossible. Antinomique à la traduction de Berthier est donc le travail d’orfèvre de Danièle Robert. N y-a-t-il pas une musicalité supplémentaire :
« Ô vous qui êtes d’un entendement sain,
considérez le sens profond caché
sous le voile de mes vers sibyllins. »
Cependant, le risque est de tordre le vers, voire le sens, au service d’une rime française, d’autant que les finales en « o », « a » et « i » sont bien plus nombreuses en italien qu’en français. Ce qui peut donner :
« Réfléchissez bien sur votre naissance :
non pas pour vivre en bêtes conçus
mais pour suivre vertu et connaissance. »
L’on s’aperçoit que pour le bien de la rime en « u » (avec « convaincu » à la strophe suivante), le mot « conçu » parait un intrus. Ce qui est en effet au chant XXVI de l’Enfer :
« Considerate la vostra semenza :
fatti , non foste a viver como bruti,
ma per seguir virtute e canoscenza. »
Hors de rares tentatives, les traductions françaises évitent l’écueil des vers rimés. Traduire en prose, comme amputer des passages trop savants, étant une hérésie, l’évidence doit s’imposer : un tel poème ne peut trouver sa voie et sa vie dans une autre langue qu’en vers rimés. L’on peut se demander alors pourquoi Danièle Robert n’a pas choisi l’évidence de l’alexandrin. Par crainte de sa monotonie dit-elle. Et pourquoi pas toujours l’hendécasyllabe, comme Dante, qui pratique cependant souvent l’élision ? Il est si rare en français, donc il côtoiera le décasyllabe ; et rendra clair ce qui est obscur au chant XXXIII du Purgatoire :
« Il se peut que ma narration obscure,
tels Thémis et le Sphinx, te convainquent peu,
car tout comme eux l’intellect elle obture. »
« Art de la perte », dit Danièle Robert en sa préface, la traduction doit cependant s’envoler autant vers le sens que vers la musique. Ce n’est pas un « décalque », mais un « entrelacs créateur d’une nouvelle harmonie ». Or la rime n’a pas forcément besoin d’être toujours riche ; parfois l’assonance suffit. Comme chez Dante lui-même, la noblesse et le lyrisme côtoient la familiarité et le grotesque, « la putain et la bestialité » (Purgatoire XXXII) sont repoussées par la pure beauté.
Lisons comment au dernier chant de l’Enfer, apparait Lucifer, « l’empereur du règne de souffrance » :
« Des six yeux il pleurait et, sanguinolents,
des trois mentons pleurs et baves coulaient. Dans chaque bouche il broyait de ses dents
un pécheur, tout comme on macque le lin,
et en faisait ainsi trois corps souffrants. »
Voyons plus loin, dans le Purgatoire, et avec les yeux de l’âme, comment trois demoiselles admonestent Dante, qui peut enfin contempler sa Béatrice :
« Elles dirent : « N’épargne pas tes regards :
nous t’avons face aux émeraudes placé,
par où Amour lança sur toi ses dards. »
Dante Alighieri, Miquel Barcelo : La Divine comédie, Actes Sud.
Mieux encore, lorsque le triptyque dantesque de Danielle Robert est accompagné des ébouriffantes aquarelles de Miquel Barcelo, le livre idéal en son coffret de trois volumes ne peut que combler les aficionados de l'ascension paradisiaque tant la traduction parfaite, quoiqu'il s'agisse d'un oxymore, s'allie avec les mouvements souterrains et aérien du pinceau de l'artiste, aux couleurs parfois violentes, parfois éthérées, aux délavés précis, suggestifs, cruels et tendres, à la lisière de l'abstraction. Le tour de force plastique trouve son écho, sa résonance dans les décasyllabes rimés en français par Danièle Robert. Certes une précédente édition, épuisée, unissait ces aquarelles à la traduction de Jacqueline Risset dont la complexité était plus troublante. Mais la simplicité, l'évidence de Danièle Robert fait ici merveille, permettant d'accéder à l'eschatologie dantesque avec joie...
Incroyable à quel point Dante a pu fixer pour des siècles de christianisme la géographie de l’eschatologie : fosses concentriques de l’Enfer, montagne du Purgatoire, qui lui répond inversement, cieux concentriques en Paradis où flamboient les anges autour de Dieu. Il est un peu curieux à cet égard qu’à une préface sur l’éthique de la traduction, aux pieds de l’Enfer, succède une préface sur le Purgatoire proprement dit, marquant une légère déception du lecteur quand à cet Enfer qui est à peine présenté. Mais après l’horreur sans nombre du châtiment éternel aux impressionnantes figures qui marquèrent les esprits des lecteurs et des peintres, comme Ugolin dévorant ses enfants ou l’amour coupable et cependant réuni de Paolo et Francesca lisant les amours de Guenièvre et Lancelot, le Purgatoire offre aux pécheurs des peines consenties et enluminées d’espérance, sachant qu’ils aboutiront en la musicalité du Paradis.
Gageure de la traduction, il ne fallait alors ne pas rater ces vers musiciens du chant IX, caractéristiques du répons grégorien :
« Et ce que j’entendais me renvoyait
l’image même de ce qui prévaut
quand à chanter l’organum on s’essaie,
et que s’entendent alors, ou non, les mots. »
Même si le jaloux est toujours en droit de chipoter, il faut admettre que le travail est fort réussi : sur l’oreille spirituelle, la magie opère.
La sommitale marche de l’escalier dantesque est franchie avec autant de succès par Danièle Robert lorsque parait l’indispensable troisième volet du retable qu’est le Paradis. L’éclat de Béatrice s’intensifie, les anges pullulent, les saints enseignent avec bienveillance, la poésie est aussi musicale que philosophique, la beauté céleste est à la fois esthétique et morale :
« Ici l’on se plonge dans l’art, éclat
d’un tel amour, on discerne le bien
qui fait régir là-haut le monde d’en bas. »
Reste à souhaiter qu’in fine, le grand-œuvre aux belles couvertures (qui ne néglige pas les notes profuses en fins d’ouvrages) soit publié en un seul volume élégamment relié, comme l’éditeur sait si soigneusement le faire, avec par exemple son Dictionnaire de la Méditerranée[5].
Les grand illustrateurs de Dante, Sandro Boticelli, Gustave Doré, Salvador Dali et Miquel Barcelo, n’auront, espérons-le, pas à rougir de la traduction de Michael Meier. Outre la réécriture contemporaine de l’œuvre dantesque par le prosateur Giorgio Pressburger[6], jetons un œil amusé sur une bande dessinée, qui, par des moyens différents, saupoudre elle aussi le chef d’œuvre dantesque d’allusions aux tragédies du XX° siècle.
Peinture et dessin sont également des traductions, ici dans un langage plus familier. En Enfer avec Dante est une bande dessinée où dominent le rougeoyant et la noirceur, non sans des verts méphitiques, sous les doigts scénaristes et graphistes à la fois de l’Allemand Michael Meier. La chose est absolument parodique, car un « hipster quadra », aux cheveux et barbe roux, s’égare lors d’une randonnée. La forêt sombre est le symbole des tentations pécheresses de la société de consommation. Une luxurieuse dodue, un léonin conseiller en développement personnel, un loup de la finance : seul un chacal virgilien sauve notre nouveau Dante. Les cercles de l’Enfer se succèdent, rythmés par des avalanches, un téléphérique, un métro, tandis que les allusions à des émissions de télévision, et surtout à l’Histoire démente du siècle dernier pullulent.
Il y est question d’« évadé fiscal », de « tirer le diable par la queue », de « sans-papiers » ; la « Gorgone de la STASI » a des yeux en « laser à deux balles », Hitler « mijote dans le sang » en compagnie de Pinochet, plus loin des damnés tapent des thèses sur IPhone… C’est satirique en diable et fort divertissant, non sans une réelle intelligence du texte dantesque.
« Ut pictura poesis », écrivait Horace[7]. Il n’est pas si sûr que la poésie ressemble à la peinture, tant sont différent les moyens de ces arts, ce d’autant que la bande dessinée a le plus souvent quelque chose de réducteur par rapport à son modèle littéraire. La réduction est aussi celle qui va du sublime dantesque au trivial et au comique…
« La tâche du traducteur est de faire mûrir, dans la traduction, la semence du pur langage[8] », disait en 1923 Walter Benjamin, à l’occasion de sa version des « Tableaux parisiens » de Baudelaire, seconde partie des Fleurs du mal. Il faut craindre cependant que la traduction devienne vulgarisation, affadissement, perte des scintillements poétiques et des réseaux de sens. Le poème ne sert pas qu’à la communication de faits, d’idées, ici chez Dante de doctrine ; aussi le traducteur se saisissant des fleurs du texte ne devra pas (si l’on nous pardonne cette l’image triviale) en faire de la compote, mais en offrir les fruits mûris dans sa langue. Au travers de sa transparence, la traduction laisse voir le texte original, quoique sans le remplacer, sans user de l’illusion du mimétisme. Si le texte de Dante est immuable, le devoir de traductibilité universelle invite une pléiade, une chaîne de traducteurs à remettre sans cesse sur le métier à tisser le poème la soie rauque et chatoyante du langage. Encore une fois, comme l’écrivait George Steiner[9] parmi son chapitre inaugural « Comprendre c’est traduire », dans Après Babel : « Toute lecture approfondie d’un texte sorti du passé d’une langue ou d’une littérature est un acte d’interprétation aux composantes multiples[10] ».
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Des livres publiés aux critiques littéraires, en passant par des inédits : essais, sonnets, extraits de romans à venir... Le monde des littératures et d'une pensée politique et esthétique par l'écrivain et photographe Thierry Guinhut.