Eléa Baucheron et Diane Routex : Le Musée des scandales. L’art qui fâche,
Gründ, 176 p, 24,97 €.
Malheur au média par qui aucun scandale n’arrive. Ne court il pas le risque de se voir négligé, boudé par son lectorat, promis au marais de l’indifférence ? Il s’agit bien là d’un renversement des valeurs, alors que Jésus clamait : « Malheur à celui par qui le scandale arrive » ! Car, « s’il est nécessaire qu’arrivent des scandales[1] », mieux valait que le vice ou le péché restât privé, offert au secret de la confession, plutôt qu’étalé sur la place publique où il risquait de semer le désordre, comme si se décrochait la cloche de l’église pour sonner le malheureux… D’où la nécessité d’une réflexion sur l’évolution de la notion de scandale. Or l’historien se découvre soudain un sujet digne de son clavier, en la personne de Jean-Claude Bologne, qui étale avec une saine impudeur sa roborative Histoire du scandale ; tandis qu’Eléa Baucheron et Diane Routex s’acoquinent avec « l’art qui fâche » en faisant défiler un piquant Musée des scandales. Autrefois huile enflammée des mœurs, le scandale n’est-il pas devenu l’huile sainte des médias, le miel de l’art contemporain, à moins qu’il ne soit déjà rance et avarié ?
Un ministre socialiste du budget qui pratique la fraude et l’exil fiscal (quoique cela dissimule un plus grand scandale, celui de l’enfer fiscal[2]), un favori du prince qui s’adjuge indument des pouvoirs de police et de tabassage, des prières de rue (où se trouve le scandale, dans les faits, ou dans le silence qui voile le scandale ?), un chômage qui ne baisse pas alors que des pays voisins jouissent du plein emploi, on userait salive et clavier à énumérer les motifs de scandale. Cependant, comme en une déclaration d’intention, Jean-Claude Bologne montre que l’indignation à l’occasion d’une révélation scandaleuse « permet d’innover, de dépasser des valeurs désuètes ou, au contraire, de consolider des normes dont la transgression soulève un tollé général ». Ainsi les deux facettes, positives et négatives, du phénomène participent des évolutions et des soubassements moraux de nos sociétés.
Aujourd’hui, comme le souligne notre prolifique historien[3], « chaque journal télévisé déballe quotidiennement son lot de scandales sanitaires, alimentaires, écologiques, financiers, politiques, judiciaires ». Les médias s’en nourrissent, appâtent et captivent ainsi lecteurs et spectateurs. D’autant que l’universel média, internet pour ne pas le nommer, permet de contourner les normes et les interdictions locales et nationales en affichant, si le curieux le veut, un festival de croix gammées, une exposition de cadavres humains dans une galerie, les exécutions de l’Etat islamique, sans compter les informations et images manipulées pour le bien de la cause et le mal de la pensée. Aussi, aux législations, doit s’ajouter, voire se substituer le jugement individuel, en toute connaissance de cause ; au service duquel la réflexion et les comparaisons de l’historien sont ardemment nécessaires.
L’essai de Jean-Claude Bologne a l’insigne mérite de ne pas se limiter, comme attendu pour un ouvrage d’historien, à une liste chronologique et commentée. Classées par types et familles idéologiques, les scandales sont bientôt problématisés, analysés dans leur fonction de signal des mentalités et des interdits, autant que de dépassement. En ce sens, ils sont nécessaires aux évolutions et au bien-être de nos sociétés. Plus de scandales ? Alors ils seraient enfouis sous le non-dit, le mensonge, caractéristiques des régimes totalitaires ; ou arasés par le relativisme, l’indifférence morale…
Après celui, originel, d’Eve et du serpent, Jésus n’est-il pas un scandale ? Chassant les marchands du temple, accueillant une prostituée, se prétendant fils de Dieu… Ce pourquoi son malheur fut d’être crucifié. Peine scandaleuse, réservée aux esclaves, impossible pour un dieu ! Superstition, hérésie, libertinage, la liste est longue des péchés qui éclatent au grand jour de la chrétienté menacée. « C’est le créateur ou le tentateur qui place sur le chemin de l’homme la pierre sur laquelle il trébuche ».
Les Grecs honnissent les actions et paroles impies qui peuvent faire choir le châtiment sur la cité ; il en est de même pour l’hubris, qui est à la fois orgueil et démesure. Combien de tragédies ont pour cause des scandales! Alors que Socrate et Diogène[4] délivrent leur enseignement philosophique à coups de paroles scandaleuses. Comme Caïn tua son frère Abel, Romulus tua Rémus. Ce sont scandales originels, préludes à de longues listes, parmi lesquelles Catilina figure en bonne place dans les écrits de Cicéron. Rome, tout au long de sa République et de son Empire, est pétrie de scandales, qu’ils s’appellent Antoine et Cléopâtre, Néron ou Caligula.
Dans l’Occident chrétien apparaissent de nouvelles catégories : scandale actif ou passif, il faut alors tenir compte de l’intention pour statuer sur l’éventuel châtiment. Ainsi « l’Eglise s’est longtemps enfermée dans cette logique, considérant que le scandale actif de prêtres pédophiles ne devait pas être dénoncé publiquement, car cela aurait entraîné un scandale passif : la défiance de la communauté vis-à-vis de ses pasteurs ». Une oreille moderne ne l’entend pas ainsi et préfère appliquer le code pénal. Le Pape François, en 2015, a d’ailleurs mis fin à cette « argutie canonique ».
Cependant des fils conducteurs traversent les siècles. Avec Christine de Pisan, Jeanne d’Arc fait partie des « femmes scandaleuses », choquant surtout par ses habits masculins. Fut-elle l’ancêtre des femen ? Qu’elles furent suffragettes anglaises ou résistantes au voile aujourd’hui, elles sont encore scandaleuses. Mais lorsqu’elles agissent au nom de la liberté et des valeurs occidentales, elles sont conspuées, emprisonnées et exécutées au nom d’une théocratie barbare et totalitaire. Ce pourquoi il est nécessaire de savoir au nom de quelles valeurs le scandale bruit sur la terre.
Voltaire est un jalon d’importance. De l’affaire Calas à celle du chevalier de La Barre, ce n’est plus le scandale du catholicisme bafoué qui a droit de cité, mais celui d’une injustice effroyable : il s’agit du « retournement du scandale contre celui qui l’a dénoncé ». Bientôt « la Révolution française et l’expansion de la presse entreront pour beaucoup dans le passage du scandale à l’affaire ».
D’abord religieux et sacré, le scandale devient politique, judiciaire, plus tardivement écologique, au gré de la pente des mentalités. Ce qui « heurte la raison, la morale ou la foi » est tour à tour scandale diabolique, divin, et surtout humain. Désormais ce dernier choque comme choquaient l’idole et le blasphème, quoiqu’il s’agisse de « laïcisation du scandale ». Sacralisation du peuple, de l’art, de l’argent, de la nature, de l’enfant, voilà que l’évolution des mœurs permet l’éclosion d’inédites pépites scandaleuses. Aux nouvelles valeurs répondent de nouvelles transgressions dignes de l’étonnement et de la vindicte publique. Quoique vouloir dénoncer le scandale de l’esclavage puisse amener à vouloir déboulonner des statues de Confédérés aux Etats-Unis, ou celle de Colbert qui participa à l’écriture du Code noir. En ce sens brûler d’éradiquer des pans de l’Histoire apparait bien comme une scandaleuse pulsion totalitaire.
En conséquence, nous direz-vous, où est le scandale? Dans les Plantes Génétiquement Modifiées, où dans l’obscurantisme des faucheurs ? Dans les emplois familiaux et plus ou moins fictifs facturés par un Député (parmi bien d’autres et alors qu’il s’agissait d’un problème moral et non d’une illégalité) ou dans l’injuste éviction d’un candidat aux élections présidentielles ? Pour rappel, il est rapidement question des affaires qui furent des pierres d’achoppement pour le pouvoir, de l’affaire Urba sous Mitterrand à celles affectant, avec plus ou moins d’efficacité, Dominique Strauss-Khann, ou Hillary Clinton. Faut-il compter parmi les scandales la loi Pleven qui permet à des associations de se porter partie civile en justice pour défendre des intérêts plus ou moins idéologiques ? Ce ne sont que quelques-unes des allusions placées çà et là par notre historien, mais d’autant plus éclairantes, parmi un essai toujours documenté et toujours passionnant. Il a le mérite insigne, malgré quelques négligeables approximations (sur le Contre les Chrétiens de Celse prétendument perdu et sur une relation de cause à effet entre le politiquement correct et le terrorisme à expliciter) de nous interroger sur l’évolution de nos valeurs et de nos émotions, pas toujours alliées à la raison et à la connaissance. Car les « stratégies de scandalisation », des journaux à scandales aux leviers politiques, risquent fort à la fois de rater leur but tant ils se succèdent et de naufrager l’intelligence de ceux qui les suivent de la manière la plus grégaire.
Reste que « le paradoxe entre l’universalisme et le communautarisme est un défi du monde de demain ». En effet leurs sens du scandale peuvent-être radicalement opposés. Les caricatures de Mahomet et l’attentat contre Charlie Hebdo en sont un exemple frappant. Il nous faut sans nul doute apprendre à supporter avec paix, voire humour, que qui que ce soit scandalise notre sacré, laïc ou religieux. Les mots ne sont que des scandales mineurs où l’on doit pouvoir rire de tout[5], quand l’incitation au meurtre, qu’il s’agisse de rap ou de sourate, est un scandale majeur, seul punissable au regard de la loi.
Ainsi, plus largement, la littérature, à laquelle Jean-Claude Bologne fait trop peu allusion, dit l’indicible, raconte l’irracontable, soulève les loups de l’humanité. Du Tartuffe de Molière aux Verset sataniques de Rushdie, l’hypocrisie et le dogmatisme aveugle des religions se voient exhibées. Ouvrons alors Ces Livres qui ont fait scandale[6] pour croiser comment le Parti Communiste accueillit avec horreur le J’ai choisi la liberté de Kravchenko, comment le puritanisme anglo-saxon apprécia Lolita de Nabokov. Il est est à craindre qu’aujourd’hui, malgré sa langue somptueuse et ses stratégies narratives retorses, ce dernier roman croulerait encore plus sous la vindicte du spectre de la pédophilie.
Jean-Claude Bologne a beau jeu de consacrer l’un de ses derniers chapitres à l’art. Le scandale, entre les yeux ouverts sur ce que l’on ne veut pas voir en peinture et la sortie du formalisme et de l’académisme, tant en musique qu’en peinture, emprunte une « fonction de créativité ». Au-delà de la bataille d’Hernani en 1830 et du Sacre du printemps de Stravinsky en 1913, l’urinoir de Duchamp casse l’art en deux : sa sacralité n’est plus que dans le regard fortuit d’un spectateur qui l’élève à une dimension muséale incongrue. La représentation du Christ cependant reste au long des siècles un indicateur précieux. Les nus musculeux de Michel-Ange dans la Chapelle Sixtine durent voir leurs parties génitales recouvertes par des linges, ce qui valut au peintre de la pudeur le surnom de « Braghettone ». Trop de sang, de chairs tuméfiés heurtèrent les fidèles de la crucifixion. Aujourd’hui encore, quoiqu’intelligemment défendue par des ecclésiastiques qui y virent la réactivation de la conscience du scandale de la croix, l’œuvre photographique « Piss Christ[7] » de Serrano fit bouillir ceux qui crurent se sentir arrosés.
L’art ne fut-il pas toujours scandaleux ? Menacé par son éventuel statut d’idole, par la querelle byzantine des iconoclastes, pire, par l’interdit absolu de la représentation humaine et divine qu’exige l’Islam, il réclame toujours son statut légitime d’éveil des consciences, de nouveauté piquante et de prurit des scléroses. À ce compte, la censure ne désarme pas, comme témoigne le providentiel volume concocté par Emmanuel Pierrat : 100 œuvres d'art censurées[8].
Aujourd’hui l’art contemporain, à force de scandales, voit son pouvoir de scandale s’émousser. Lui qui se scandalise encore de voir s’exhiber la ringarde peinture, semble devenir un dinosaure affaissé, dont les viandes sèches s’évaporent sur la route de l’Histoire de l’art. À tel point que l’on puisse se demander si l’art contemporain est encore de l’art, s’il n’est plus qu’un ersatz, une pincée obligée de provocation sénescente dans l’espace vide des lieux d’exposition parsemés de tas, d’objets ruinés, de bidules empruntés à l’électroménager et à la voirie, le tout enveloppé d’un concert pompeux de concepts questionnant tautologiquement la légitimité de l’art et arborant un engagement politique et anticapitaliste suiviste et creux…
Un complément judicieux à l’ouvrage informé de Jean-Claude Bologne se présente sous la forme d’un livre d’art, qui aurait pu choisir d’être un catalogue chronologique, mais a préféré jouer la carte du thématisme : « Sacrilège, Politiquement correct, Scandales sexuels et Transgression artistiques », se succèdent avec plus ou moins d’adresse, dans l’album conçu à quatre mains par Eléa Baucheron et Diane Routex, intitulé Le Musée des scandales.
Fort soignées, les reproductions indispensables, de tableaux, sculptures et autres installations, ne manquent pas à l’appel, depuis la Renaissance jusqu’au plus urgent contemporain. Certes l’on pourra regretter que la pliure du volume affecte hypocritement le point stratégique de La Maja desnuda de Goya. Et si l’album est fait pour aguicher la narine de l’acquéreur par l’effluve du scandale, tout en présentant des œuvres parfois méconnues (Auguste Préault ou Paul Chevanard au XIX° siècle), il répond bien à son objectif : cataloguer les occurrences, en montrant combien les pouvoirs du christianisme, du politique et des minorités sont fort chatouilleux, et bien souvent le plus ridiculement du monde.
Les analyses jointes à chacune des œuvres présentées sont un peu minimalistes. Suffisantes pour un ouvrage d’initiation et grand public, elles ne laissent pas d’être lacunaires si l’on désire se plonger dans des problématiques esthétiques, historiques, sociologiques et métaphysiques inévitablement afférentes aux plus réussies des productions ici exposées, forcément inégales, comme dans toute anthologie, forcément soumises à des choix parfois discutables. Il faudra également pardonner une désastreuse coquille, qui fait Staline accéder au Pouvoir en « 1934 », alors qu’il s’agit de 1924 (ce à propos de Malevitch).
Evidemment ce sont les corps et la sexualité qui posent d’abord problème. Trop réalistes ou trop esthétisés, ils exhibent la finitude, la dégradation de l’homme, fût-il pape, comme lors du portrait d’Innocent X par Velasquez, mais aussi le soupçon du pouvoir d’Eros, comme lorsque le Saint Sébastien de Fra Bartolomeo suggère de coupables désirs à une pénitente. Bien que mystique, le « long dard en or » brandi par un ange vers les entrailles de Sainte-Thérèse sculptée dans le marbre blanc par Le Bernin permet aux prudes de faire flèche de toute indignation.
L’indignation sociale et politique de l’artiste, qu’il s’agisse des satiriques Caprices de Goya ou de la poire figurant Louis Philippe sous le trait de Daumier, s’attire la colère et la censure des pouvoirs en place. L’on se doute qu’être aujourd’hui un plasticien chinois, comme Ai Weiwei, dont l’épouse exhibe sa culotte sous le portrait de Mao, n’est pas de tout repos…
Ne sapons pas le moral des troupes par un tableau de soldats morts dans la boue des tranchées, ne prenons pas le risque de figurer parmi les « Artistes dégénérés », exhibés par les suppôts d’Hitler dans l’Allemagne nazis, gardons-nous bien d’offenser les minorités, les enfants, les femmes, les noirs, les homosexuels, les transgenres, les animaux, ad nauseam… C’est ainsi que la liberté de l’art, la créativité se dessèchent comme peau de chagrin.
Faut-il classer la peinture d’Artemisia Gentileschi parmi les scandales sexuels, pénaux, féministes ? Se représentant d’une manière splendide et hyperréaliste, en 1620, sous les traits de l’héroïne biblique Judith décapitant un Holopherne qui exhibe le visage stupéfait de son violeur, elle crie justice avec d’implacables giclures de sang.
La désacralisation de l’art, dégradé par la banalité de ses sujets, de ses techniques et de ses matériaux, émeut également les puristes. Vidéos et photographies floues, Merde d’artiste par Manzoni, coulures brutales de Jackson Pollock, colonnes tronquées noires et blanches de Buren : à partir de quel moment l’art se suicide-t-il[9] ? L’on ne sait plus si c’est de l’art ou du cochon, selon le calembour consacré, lorsqu’en 2010 Wim Delvoye (l’auteur de la « machine à caca ») tatoue des porcs dont la peau tannée sera encadrée, ce qui fait couiner les défenseurs des animaux. On regrette qu’il n’ait pas songé à leur tatouer une sourate du Coran pour l’offrir à la vénération de La Mecque. Un homme également tatoué par ses soins dévouera sa peau post mortem à l’exposition. « Bizarrement les choqués du cochon ne se sont pas offusqués », ironisent notre duo de commentateurs…
Alors que nombres d’artistes ne prétendent ni ne savent devoir susciter l’ire des spectateurs, comme Véronèse posant un chien sur le devant de La Cène, ou un japonais qui se voit reprocher de prétendus faux billets, les plus contemporains en font profession. Le scandale est la condition sine qua non de leur protestation, de leur notoriété et de leur portefeuille.
Se targuer d’être celui par qui le scandale arrive ne suffit évidemment pas à la qualité d’une œuvre d’art. Aux côtés de Damien Hirst, dont les crânes constellés de diamants ou de mouches noires sont de fabuleux memento mori, Maurizio Cattelan, si décrié, restera pourtant l’un des plus profonds plasticiens du contemporain. En 2001, Him défraie la chronique, surtout lorsqu’il est exposé à Varsovie en 2012, où le souvenir des exactions nazies contre les Juifs reste prégnant : il s’agit en effet d’un Hitler de cire et en costume de ville, agenouillé, les mains jointes. Outre que la photographie en noir et blanc ne rend que peu justice à l’œuvre (il en existe en couleur dans une chapelle), le commentaire ne glose guère sur la question de la culpabilité, du pardon, de l’imprescriptible, sur l’époustouflante dimension historique et métaphysique de l’œuvre. Du même, en couverture, La Nona Ora : le pape Jean Paul II s’écroule sur fond rouge, abattu par une météorite. C’est encore en la catholique Varsovie que l’esclandre prit des proportions délirantes. Alors que, dans la tradition du « Christ au outrages », un pape n’est plus qu’un homme, usé, frappé, définitivement mortel. En son esthétique simplicité, l’œuvre questionne l’infaillibilité papale, la volonté divine, le hasard cosmique, et ce doute que tout vrai Chrétien doit avoir éprouvé, comme Jésus sur la croix…
A contrario du mensonge et de la manipulation, rien de plus beau qu’une vérité scandaleuse. Ne dénonce-t-elle pas le scandale fondamental : celui de l’ignorance, pire, de l’ignorance militante, de l’obscurantisme et du mensonge érigé en loi ? Quand l’opinion, la doxa, la morale, la bien-pensance s’émeuvent, le scandale n’est pas loin, nuisible ou utile. Il est la pierre d’achoppement, selon l’étymologie latine ecclésiastique et a fortiori grecque, sur laquelle butent et se blessent l’habitude et les conventions. L’humanité et la vertu se heurtent cependant au scandale fondamental : la gravité du péché, le mal. Du nazisme à l’islamisme en passant par le communisme, l’Histoire du mal se pourlèche de scandales. Ainsi, autant la vertu que le vice, le délit, le crime et la tyrannie, peuvent être de scandaleux monstres dont la cloche résonne sur la terre et sur l’air des médias, fendant les cranes mieux que tout verbe, toute peinture, si scandaleux soient-ils. Que la prudence de la raison nous préserve des émotions trop scandaleuses !
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Des livres publiés aux critiques littéraires, en passant par des inédits : essais, sonnets, extraits de romans à venir... Le monde des littératures et d'une pensée politique et esthétique par l'écrivain et photographe Thierry Guinhut.