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28 avril 2023 5 28 /04 /avril /2023 13:12

 

Photo : T. Guinhut.

 

 

 

Du Musée de minéralogie au sexe des pierres :

Roger Caillois, Yves Le Fur & David Wahl.

 

 

Didier Nectoux et Héloïse Gaillou :

Le Musée de minéralogie de l’Ecole des mines de Paris,

Gallimard / L’Ecole des joaillers, 2022, 76 p, 14,50 €.

 

Roger Caillois : La Lecture des pierres,

Museum d’Histoire Naturelle / Xavier Barral, 2015, 432 p, 55 €.

 

Yves Le Fur : Résonances, L’Atelier contemporain, 2023, 160 p, 7,50 €.

 

David Wahl : Le Sexe des pierres, Premier Parallèle, 2022, 64 p, 9 €.

 

 

 

Rien de plus insensible qu’un granit, qu’un calcaire, qu’un cristal de roche, dont les noms sonores accusent la dureté rédhibitoire. Pourtant les amateurs sont nombreux à choyer leur science et leur sensibilité à leur égard, les observant, les cataloguant, les collectionnant, pour leur singularité, leur beauté, leur charme. À Paris, le Musée de minéralogie de l’Ecole des mines recèle des trésors, quand les essais fort poétiques de Roger Caillois aiment à sublimer leurs formes et leurs motifs suggestifs, leurs dessins même, parfois plus dignes de figurer des créations de l’art que nombre de nos tableaux de l’art contemporain[1]. Mais, au-delà de leurs « résonances », pour reprendre le titre d’Yves Le Fur, pas un n’avait imaginé que les pierres puissent avoir un sexe, comme l’étrange personnage de David Wahl. Pierre à pierre, bâtissons notre minéral cheminement, entre investigation géologique et imagination du poète.

 

 

La terre est un caillou. Enorme, gonflé de lave en son milieu, instable, scarifié de failles et terraqué par d’incessants mouvements telluriques, gonflé d’océans en ses fosses, mais un caillou tout de même, lancé parmi les révolutions des orbes célestes et des galaxies. La connaissance de ce monstre pierreux est indispensable, non seulement pour en exploiter les matériaux et les richesses, malgréles contempteurs de l'extractivisme[2], mais aussi pour les plaisirs de l’encyclopédisme. Aussi, l’Histoire naturelle de Pline l’ancien, venue de l’Antiquité romaine, traite des « pierres et leur utilisation » et des « pierres précieuses », dans ses Livres XXXVI et XXXVII[3]. De même, le naturaliste Buffon, dans la seconde moitié du XVIII° siècle, s’est abondamment intéressé aux minéraux. En toute logique, il existe un musée prestigieux, quoique méconnu, celui de l’Ecole des mines de Paris, dont un beau livre de Didier Nectoux et Eloïse Gaillou nous ouvre les portes avec bonheur.

Parmi les ruelles du Quartier latin, le musée de Minéralogie de l'École nationale supérieure des mines conserve et offre à nos yeux émerveillés près de 100 000 minéraux, roches, météorites et gemmes : voici l'une des plus importantes collections patrimoniales de minéralogie du monde. Depuis 1794, cet « inventaire de la Terre », dont les fins scientifiques, pédagogiques et industrielles sont évidentes, est présenté dans un prestigieux ensemble de vitrines en bois, inchangé depuis le XIX° siècle. Les échantillons remarquables pullulent, rangés comme à la parade, offrant un voyage géographique autant que temporel, à travers les ères géologiques et l'histoire de l'humanité. Indispensable fut et reste cette science, enseignée à l’Ecole des mines, tant les minéraux ont une valeur stratégique. Sans oublier combien ils furent à l’origine de l’usage des couleurs, de la métallurgie, de la bijouterie, de la cosmétique, de l’imprimerie, de l’aéronautique et aujourd’hui des plus nouvelles technologies. Car sans terres rares, sans colombo-tantalite, extraits en Chine, au Congo, pas le moindre smartphone dans nos mains !

Rigoureusement construit, cet ouvrage commence avec la récolte des minéraux, leur classement, puis l’acquisition par l’Etat de la collection du marquis de Drée, en 1845, forte de 20 000 échantillons. Tout cela étant bien entendu catalogué. Bientôt à la minéralogie s’ajoute la cristallographie, ainsi qu’en 1941 la classification sur la base de la composition chimique et de la structure cristalline. Ce qui s’augmente au cours du XIX° siècle de la réalisation de la première carte géologique de France, pour laquelle Elie de Beaumont parcourut plus de 100 000 kilomètres !

Aussi trouve-t-on ici des roches venues du monde entier. Une mexicaine rhyolithe volcanique héberge des nodules d’opales aux couleurs stupéfiantes : rouge, abricot, vert, bleu. Une pyromorphite espagnole éclabousse ses cristallisations en forme d’aiguilles avec le secours d’un intense vert pomme. Une wulfénite offre un cristal rouge orangé du plus bel effet. Venue du Rhône, une azurite propose son bleu onirique. Et loin de se contenter de pierres, le musée dispose d’une bibliothèque aux livres parfois rares, de microscopes anciens, de tableaux et de sculptures minérales, comme ce Lao Tseu, que l’on sait chinois, dans une serpentine presque rose. De la vulcanologie aux fossiles, l’histoire de la terre, donc de l’homme, est ici toute entière. Peut-être sera-t-on encore plus éblouis par la magnificence des gemmes, brutes ou devenues bijoux. Les météorites enfin, souvent grises et néanmoins fascinantes car venues de la ceinture d’astéroïdes située entre Mars et Jupiter, font partie de ce stupéfiant patrimoine à préserver…

L’on devine qu’en cet héritier des cabinets de curiosités, les « beautés minérales » ne cessent d’étonner le regard. Comme si l’on ouvrait les vitrines et les tiroirs de ce musée, les pages de l’ouvrage se déplient pour offrir des panoramas, des détails, multipliant les découvertes aussi pierreuses que raffinées. Le rouge tendre des corindons, le vert luxuriant des émeraudes se dévoile à nous, comme dans l’écrin d’une boite à bijoux.

Nous connaissons Roger Caillois (1913-1978), essayiste pertinent sur la poésie[4] le fantastique[5] et l’imaginaire[6], mythographe et sociologue, romancier d’une chrétienne uchronie[7] : Ponce Pilate. Un autre versant de l’homme de lettres et académicien est minéral, car avec ferveur il collectionna ces « pierres curieuses, qui attirent l’attention par quelque anomalie ou par quelque bizarrerie significative de dessin ou de couleur », collection dont la majeure partie fit l’objet d’une dation au Muséum par sa veuve. Ainsi découvre-t-il le « fantastique naturel », parmi agates, jaspes, quartz ou pierres de rêve, en un cheminement gnomique et démiurgique entre savoir scientifique et invention littéraire.

Ici sont réunis trois textes que Roger Caillois consacra méticuleusement à ses chers minéraux : Pierres, L’Écriture des pierres et Agates paradoxales. Descriptifs, méditatifs, lyriques et informés, ils composent un éloge fervent, des pièces les plus humbles aux plus rares. Massimiliano Gioni, directeur associé du New Museum à New York et commissaire de la Biennale de Venise en 2013, inscrit ces textes dans le champ de la création contemporaine, car « l’art devient une question géologique, aussi vaste que le monde lui-même, qui accule l’homme à un recoin de l’univers ». De plus Gian Carlo Parodi, minéralogiste et maître de conférences au Muséum, présente les grandes familles des pierres de cette collection, qui, selon Roger Caillois, « portent alors sur elles la torsion de l’espace comme le stigmate de leur terrible chute ». Or il préfère les « pierres nues » à celles que l’art humain a transformées.

De la Chine, où les poètes les célébrèrent, à l’Antiquité classique, les pierres sont parées de vertus magiques, car elles se régénèrent ou sont hermaphrodites ; l’une est « autoglyphe ». Plus modestement, dans nos carrières gisent des « concrétions silencieuses » de grès siliceux, ornées de dendrites. Quand l’agate est souvent circulaire, les pyrites sont angulaires. Il y a des « quartz squelettes » et des « quartz fantômes » : l’abstraction des peintres doit faire preuve de modestie ! Ce pourquoi, devant ces énigmes naturelles, Roger Caillois s’efforce « de les saisir en pensée à l’ardent instant de leur genèse ».

Parmi ses préférées, figurent les « agates paradoxales », qui semblent des vitraux aux mille figures opalescentes, mais surtout les « paesine », ces calcaires plats et polis où se dessinent un paysage, une ville, que l’on appelle également « pierres aux masures ». Recueillie près de la ville de Florence, en Toscane, « l’image dans la pierre » est architecturale et ruiniforme. Ces marbres, tranchées et polis, présentent des tableaux accidentels qui sont partie intégrante des jeux de la nature, elle qui imite « si bien les productions de l’art ». Il arrive que de surcroit la main du peintre y ajoute un Saint Jérôme et son lion. Tout aussi étranges, sont les septaria où des glyphes de calcite se dessinent et dansent en quête de sens.

Au cours de sa recherche patiente et poétique, Roger Caillois découvre les yeux verts et lunaires de la malachite du Congo, les nuages des grès américains, l’œil de tigre australien, moiré, cuivré, doré, un jaspe d’Oregon, que l’on titre « Le Dragon ou le Masque ». Peut-il parler à juste titre d’une « métaphysique de la nature » ? Ce serait faire trop crédit à ce surréalisme avec lequel il rompit. Pourtant « le signataire a disparu, chaque profil, gage d’un miracle différent, demeure comme un autographe universel », comme dans les calcaires à bélemnites. Voilà comment sa prose incandescente ravit le lecteur, emporté dans un voyage tellurique et esthétique.

Réalisé par les méticuleuses éditions Xavier Barral, ce livre est une stèle splendide élevée en hommage, non seulement à la beauté des pierres, photographiée avec un soin parfait par François Farges, mais aussi à Roger Caillois qui sait à merveille unir perspective didactique et dimension poétique. Comme s’il pratiquait à l’égard des ouvrages de la nature ce procédé rhétorique appelé ekphrasis, qui consiste en la description d’une œuvre d’art. Il faudrait être d’une cécité esthétique barbare pour résister à la fascination de telles pierres et d’un tel livre, superbe entre tous.

Signalons, dans un semblable ordre thématique et esthétique l’ouvrage incroyable que Jan Christiaan Sepp publia en 1776, à l’apogée des Lumières : Marmor Soorten. Ce sont 100 planches colorées à la main, représentant avec un goût exquis 570 sortes de marbres aux dessins et couleurs sans cesses renouvelés, éditées de manière aussi exacte que soignée[8].

Collection A.C. Photo : T. Guinhut.

 

De quelles « résonances » s’agit-il ? Sous un titre mystérieux, trop mystérieux sans doute, se cachent des œuvres qui en sont sans en être. Elles n’ont d’autre auteur que les hasards de la nature, qui entrent en « résonance » avec le regard de l’humanité. Cette fois ce ne sont pas seulement des pierres, mais des bois, collectés avec curiosité, avec vénération, à de nombreuses époques et dans différents contrées du monde. Malgré leur présence dans une incroyable pluralité de cultures, ils ont une résonance  universelle, d’autant qu’ils apparaissent sans signature, sinon celles des forces de la géologie, de l’eau et du vent. Bois flottés en rivières ou en mers, pierres déposées par le temps, ils quittent leur seule dimension naturelle pour une signification cultuelle ou contemplative, paraissant relever du surnaturel, comme si une intention esthétique les avait générés.

Yves Le Fur tente-t-il de comprendre ce que leur énigme révèle de notre regard sur les œuvres d’art. Car ils sont considérés à l’égal d’une sculpture ou d’un bijou. Il s’agit en effet d’« observer les élaborations successives que le religieux, le scientifique, ou l’esthétique avaient bâties à leurs propos. Elles laissent supposer des capillarités infinies entre les formes du réel et l’imaginaire, le naturel et le surnaturel ». Voilà qui est joliment dit, résumant la perspective de l’essai, mince en pagination, néanmoins généreux en idées et exemples.

Car ces pièces conservées avec délectation viennent de France, pour un « silex rubanné », d’Italie pour une « paesine » de calcaire, du Gabon pour une stalactite faite d’oxyde de manganèse, du Gabon encore pour une racine trouvée dans l’estomac d’un éléphant ! Leurs formes, leurs couleurs (quoiqu’ici les photographies soient en noir et blanc) les rendent insolites, irremplaçables, délicatement sculpturales. Au point que les pierres soient parfois coquines : « priapolites, phalloïdes et histérapétrae » ! Le tout sans intérêt économique immédiat, pour le seul plaisir évocatoire. Comme lorsque les superstitions et dévotions chinoises vénèrent les « pierres de longévité ». L’Egypte ancienne aimait celles « serpentiformes, quand les Grecs et Romains goûtaient celle naturellement ornées de motifs mythologiques, telle l’agate de Pyrrhus, avec Apollon, sa lyre et les neuf Muses. De même les Chrétiens révéraient celles affectant la forme du crucifix.

Paraissant affecter les lois de la composition, voire les expressions de l’émotion, pierres et bois « au diapason de l’art » permettent au collectionneur de devenir le créateur. L’on devine alors qu’Yves Le Fur, historien de l’art, est l’un de ces collectionneurs, nous offrant un essai délicieusement bourré de connaissances ressortissant à l’Histoire, à l’anthropologie, non sans poésie.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Si Yves Le Fur ne fait qu’allusion en passant à Maître Borel, qui conservait des pierres avec « deux yeux semblables naturellement avec leurs prunelles », ou représentant « un paysage rempli d’arbres », David Wahl en fait le nerf de son petit et cependant roboratif essai, intitulé Le Sexe des pierres, comme en un oxymore. Au XVII° siècle, Pierre Borel, un médecin ordinaire de Castres, prétend détenir dans son cabinet de curiosités la preuve irréfutable de la sexualité des pierres. Le voici au cœur d’une controverse virulente, peut-être pas si désuète, entre les partisans de la Terre inerte et ceux qui voient en elle un organisme vivant. La pierre et la chair seraient-elles secrètement liées dans le cadre de ce « grand animal rond », la terre ? L’on croirait entendre les adorateurs écologistes de Gaïa…

Pierre Borel affectionnait particulièrement de curieuses formations rocheuses, qui ressemblaient « aux « génitoires des hommes ». Mieux, dans le secret de son cabinet, priapolites et histérapétrae sont parfois « jointes ensemble, se livrant à des pénétrations géologiques ». Ou encore, « son âme ravie par l’extase », il croit « percevoir au centre de ces pierres, un conduit, plein de cristal, qui semble être du sperme congelé » ! L’humour scabreux de notre essayiste, historien de fantaisie, ne peut laisser échapper le calembour : « C’est quand même peu banal, un Castrais qui découvre le sexe des pierres ». L’on n’ose supposer que ce savant fisse preuve d’une érotique lithophilie…

À cette union du caillou et de la vie, répond la légende du Golem façonné dans l’argile. Si l’on sait que bien des êtres vivants finissent en minéraux, par la grâce du fossile, pourquoi ne pas imaginer l’inverse, imaginer une fusion « séminérale » ?

Dans cette variation un brin ludique, dans ce « chant lithique », David Wahl, écrivain et dramaturge, pour qui les roches sont « objets de contemplation », se fait à la fois historien et naturaliste. Il s’amuse à caracoler entre mythe et science pour nous livrer en catimini le récit des origines géologiques de l’humanité. Ce qui nous fait irrésistiblement penser au mythe de Deucalion et Pyrrha, au début des Métamorphoses d’Ovide[9], lorsqu’ils jettent derrière eux des pierres d’où naissent les hommes…

Nous avons définitivement quitté le terrain du naturalisme scientifique pour celui du fantastique. Ce Sexe des pierres n’est qu’un texte minuscule, tout nu car sans autre illustration, d’ailleurs accouplé avec « Les hommes paysages », mais il mérite bien que l’esprit du lecteur copule avec lui…

 

Si les pierres ont un sexe, comme le propose l’improbable fantasme, digne de l’alchimie la plus anthropomorphiste, il est à craindre que les minéraux aient un cœur de pierre. Toutefois il n’est pas impossible de leur pardonner une faute aussi vénielle étant donné leur qualité. Il n’en est pas de même, assurément, pour les êtres humains, dont l’intellect et la sensibilité sont parfois aussi roides et rugueux qu’un granit. L’on y préfèrera ceux que les couleurs des agates ont touchés avec lyrisme, que les vues des paesine ont inspirés de leurs propensions à la construction et à l’imaginaire…

Thierry Guinhut

Une vie d'écriture et de photographie


[1] Voir : L'art contemporain est-il encore de l'art ?

[2] Anna Bednik : Extractivisme, Le Passager clandestin, 2019.

[3] Pline l’Ancien : Histoire naturelle, La Pléiade, Gallimard, 2013, p 1642, 1691.

[4] Roger Caillois : Approches de la poésie, Gallimard, 1978.

[5] Roger Caillois : Au Cœur du fantastique, Gallimard, 1965.

[6] Roger Caillois : La Pieuvre. Essai sur la logique de l’imaginaire, La Table ronde, 1973.

[8] Jan Christiaan Sepp : The Book of Marble, Taschen, 2023.

[9] Voir : Lire les Métamorphoses d'Ovide et les mythes grecs

 

Collection A.C. Photo : T. Guinhut.

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23 décembre 2022 5 23 /12 /décembre /2022 14:47

 

Machaon ou Grand porte-queue, Niort, Deux-Sèvres.

Photo : T. Guinhut.

 

 

 

Jean-Henri Fabre, prince de l’entomologie.

Avec le concours

d’En regardant voler les mouches.

 

 

Jean-Henri Fabre : Souvenirs entomologiques,

Le Pommier, 2022, 336 p, 14 €.

 

Henri Gourdin : Jean-Henri Fabre l’inimitable observateur,

Le Pommier, 2022, 288 p, 21 €.

 

En regardant voler les mouches. Arts, littérature et attention,

La Baconnière, 2022, 144 p, 20 €.

 

 

 

La cigale et la fourmi du fabuliste Jean de La Fontaine étaient le produit, certes d’un amateur des champs et des bois, mais aussi d’un anthropomorphisme aimable. Si les naturalistes du XVIII° siècle, dans le sillage de Buffon, pouvaient observer les insectes de manière plus objective, aucun n’atteint l’abnégation, l’attention infinie comme Jean-Henri Fabre, né en 1823, dans les montagnes de l’Aveyron, mort en 1915 après une longue vie d’étude et d’écriture. Entomologiste scrupuleux, il dédia sa vie aux hyménoptères et coléoptères, non sans une carrière d’instituteur attentif à la transmission. Cependant, la rigueur scientifique de l'observateur n'a d'égal que l'écriture jubilatoire. Et s’il écrivit des milliers de si belles pages au service de ses précieuses bestioles, il est aujourd’hui loisible d’en découvrir quelques-unes parmi les plus étonnantes et sensibles, dans une anthologie, intitulée Souvenirs entomologiques, et choisie par Henri Gourdin, qui parallèlement nous propose une biographie de son maître, Jean-Henri Fabre, dont on pourrait fêter le bicentenaire de la naissance. Au moyen de sa poétique insectophilie, n'a-t-il pas tant à nous apprendre sur la multiplicité des vies miniatures, sur les beautés et les cruautés de la nature? Alors qu’une poignée d’essayistes d’aujourd’hui n’aime rien tant qu’écrire avec attention En regardant voler les mouches, ces dernières, bien qu’irritantes, ayant également tant à nous apprendre, nous surprendre, parmi les fantaisies des Arts et des Lettres.

 

Faut-il commencer, en quelque sorte chronologiquement, par la vie ou par les écrits ? Si nous laissons in fine notre lecteur seul juge, c’est l’œuvre qui nous parait première, en une justification de la vie, voire une assomption. C’est au pied et jusqu’à la cime du Ventoux que se situe le théâtre des opérations. En 1865, sa rude et rocailleuse ascension est l’un des axes essentiels de ce recueil, car « une demi-journée de déplacement suivant la verticale fait passer sous les regards la succession des principaux types végétaux du sud au nord, suivant le même méridien ». L’on passe ainsi du thym méditerranéen au pavot velu alpestre. Le récit est vif, animé par le « coup de baromètre » (entendez une gorgée de rhum à chaque consultation de l’instrument par les compagnons de l’auteur) le goût de l’oseille. Une brève nuit à l’abri d’un « Jas de pierre » à 1500 mètres d’altitude permet de préparer la dernière montée pour assister au lever de soleil sommital. Une brume pluvieuse insistante les avait surpris au soir, cependant le matin permet d’élargir la vue jusqu’au Rhône. Le dramatique suspense, les descriptions lyriques donnent au récit un charme prenant. Les « douces joies » du naturaliste culminent lorsqu’il peut observer le Parnassius Apollo, ce papillon « à ailes blanches avec quatre taches d’un rouge carmin », « hôte élégant des solitudes des Alpes » !

Lisons ces pages lumineuses en pensant également au premier ascensionniste écrivain au Ventoux, le poète Pétrarque[1] lui-même, qui, en l’an 1336, fit son épuisante ascension, mais dans une perspective moins scientifique que philosophique, au-dessus de « la vallée de tes péchés » et « vers « la cime de la béatitude[2] ».

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Chaque objet de l’observation de l’entomologiste ne peut se séparer de son milieu, de ses prédateurs et de ses proies. Car ici point de pitié : le sphex aux ailes jaunes se gorge des femelles chargées d’œufs de l’éphippigère des vignes et ramène des grillons pour les enfermer avec ses rejetons qui s’en nourriront ; les ammophiles dévorent des chenilles et seront dévorés à leur tour par des oiseaux migrateurs. Ainsi va la chaîne de la vie et de la mort nécessaire.

Plus loin, apparaissent des créatures emblématiques, la « tarentule au ventre noir » et le « scarabée sacré ». La première est un « expert tueur » qui, grâce à sa morsure, paralyse le malheureux insecte qui s’est laissé surprendre. Non seulement elle est active sur le terrain, mais observée dans un large flacon préparé par le soin du patient narrateur et analyste. Le second accourt au fumet du crottin pour travailler avec ardeur à « la pilule sphérique, simples vivres que l’insecte cueille pour son propre usage et achemine vers une salle à manger creusée en lieu propice ». L’étude de ses mœurs va jusqu’à sa métamorphose, de larve à nymphe, afin de découvrir ce « bijou » que les Egyptiens divinisaient, voyant dans la boule excrémentielle roulée un symbole cosmique.

Sans oublier de plus théoriques observations sur l’instinct, son « discernement » et et ses « aberrations », notre entomologiste aime à quitter parfois le monde de ses bestioles favorites, mais jamais bien loin, pour guigner « l’hirondelle et le moineau », dont les nids sont tout un ouvrage, où l’on ramène mille proies miniatures à ses insectivores oisillons.

Parnassius Apollo, Valle Aurina, Prettau / Prédoi, Südtirol.

Photo : T. Guinhut.

 

Et si l’on s’attend à un froid exposé scientifique, l’on sera heureusement démenti. En effet, outre une exactitude scrupuleuse, la plume avisée, lyrique, de Jean-Henri Fabre use sans relâche d’un sens de la description contrasté, coloré, et d’une remarquable vivacité du récit. Au point que les activités, les combats de ces minuscules héros paraissent des épopées grandioses et pleine d’intérêt. Avec raison Victor Hugo, pourtant trop amateur d’hyperboles, l’appelait « Homère des insectes » ; dans cette lignée, Edmond Rostand préférait le qualifier de « Virgile des insectes ». Cette modeste anthologie, judicieusement concoctée, ne peut que donner envie de se plonger dans les dix fort volumes de ses Souvenirs entomologiques, écrits entre 1879 et 1907, dont l’édition définitive fut publiée à partir de 1924[3], et dont les textes sont accessibles chez Bouquins[4], moins les illustrations. À ce propos, il est dommage que l’anthologiste et l’éditeur n’aient pas songé d’inclure quelques illustrations, dessins et photographies qui ajoutent bien du charme et de l’intérêt scientifique à l’œuvre complète de notre réel écrivain. Il n’en est que pour preuve, au-delà de l’évident bonheur de lecture qui nous transporte dans un incroyable univers, que les treize langues où il fut traduit ; le Japon lui vouant un véritable culte. Au point que quelques Japonais à l’esprit curieux viennent visiter les musées qui lui sont consacrées à Saint-Léons en Aveyron et à Sérignan-du-Comtat dans le Vaucluse…

En sus de sa qualité d’entomologiste, nous rapporte Henri Gourdin, il était enseignant et poète, auteur de divers manuels scolaires, illustrateur de ses ouvrages et aquarelliste de 660 planches de champignons : un aimable monstre de patience et de travail. « Inimitable observateur » selon Charles Darwin, qui l’honore dans son Origine des espèces, Jean-Henri Fabre ne reconnaissait pourtant guère l’évolutionnisme, ne rendant pas la politesse à son confrère anglais. En précurseur cependant, notre naturaliste associe l’écologie, science des relations avec milieu naturel, avec l’éthologie, science des comportements. Ce précurseur ouvre la voie aux recherches sur le phylloxera, qui s’attaque à la vigne, sur les sauterelles invasives, sur les chenilles processionnaires et les pucerons invasifs, dont les coccinelles sont friandes. Soit à une agriculture raisonnée, loin de la pureté revendiquée par bien des écologistes, qui voudraient laisser faire une invasive nature aux dépens de l’homme.

Ainsi, c’est avec enthousiaste qu’Henri Gourdin consacre une biographie documentée au « poète des hannetons » : Jean-Henri Fabre l’inimitable observateur. Tandis que son choix de Souvenirs entomologiques figure dans une déjà généreuse collection des « Pionniers de l’écologie » chez le même éditeur. Elle compte des volumes consacrés aux oiseaux du peintre et naturaliste américain Jean-Jacques Audubon, au philosophe également américain Emerson[5], aux Steppes et déserts d’Humboldt, au géographe Elisée Reclus. La mode de l’écologisme ayant ceci de bon qu’elle permet de se pencher sur de beaux et précieux textes. Pourtant il faut se rappeler que Jean-Henri Fabre était farouchement opposé au « progrès hostile à la nature, qui en déforme la beauté ». Que dirait-il aujourd’hui, effaré par l’industrialisation et l’urbanisation conquérantes ? Prenons garde cependant que si la belle nature est indispensable, tant sanitairement qu’esthétiquement, elle ne doit pas avec les thuriféraires de l’écologisme ramener l’humanité à un désastreux état de nature, mais pactiser avec les progrès scientifiques et techniques salvateurs.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Pour le moins curieux, voici un volume à la mystérieuse couverture bleutée qui semble être la figuration des repères visuels d’un volatile en mouvement. Reste à savoir s’il fait mouche. Deux siècles après Jean-Henri Fabre, scientifiques et essayistes exercent leur polymorphe attention : En regardant voler les mouches réunit, entre Natacha Allet et Jean-Philippe Rymann, huit auteurs qui, loin de jouer aux mouches du coche (pour reprendre la fable de La Fontaine) confrontent arts et littérature au phénomène de l’attention.

Qu’est-ce alors que notre attention face aux qualités de l’œil de la mouche, dont on sait qu’elle s’enfuira toujours plus vite que la main qui voudrait l’abattre ? Par ailleurs, distraits par son bourdonnement, savons-nous rester attentifs face au monde ? Voire rester béat « en regardant voler les mouches », soit céder au désœuvrement, à la paresse, quad les yeux à facettes du diptère devraient être notre modèle en termes de connaissance du monde…

Dans la continuité de l’Eloge de la mouche[6], fameux éloge paradoxal du philosophe grec du II° siècle, Lucien, une trentaine de petits essais explore les occurrences du diptère dans les Lettres et parfois la peinture. Qui eût cru qu’allaient défiler en cet inventif exercice rien moins que Blaise Pascal et Georges Bataille, Lautréamont et Roland Barthes, Rabelais et Paul Valéry, Francis Ponge et Claude Simon, Nathalie Sarraute et Robert Musil, en tant que métaphore démultipliée de l’attention et de l’inattention ! Sans oublier l’inoubliable Nabokov dont le filet à papillons emprisonne parfois quelque mouche et dont l’autobiographie, Autres rivages[7], porte la trace mobile sur le front de Mademoiselle, sa gouvernante. Autre dérision, « la mouche sur le nez de l’orateur », qui ramène l’emphase rhétorique, voire politique, à la viande que nous sommes…

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Trompe-l’œil favori des peintres, de l’antique Zeuxis au Carlo Crivelli du temps de la Renaissance, elle se pose sur le parapet d’une Vierge à l’enfant. Ironie et scrupule scientifique du temps de l’humanisme font bon ménage Toutefois sa petite taille se voit multipliée à taille humaine dans l’œuvre de l’artiste contemporain Francisco Tropa, de façon à acquérir une inquiétante monstruosité, cassant nos repères. Les ouvrages des naturalistes venus des siècles précédents avaient cependant, à l’aide de précises gravures, puis de photographies généreuses, grandi ces minces créatures à la lisière du fantastique.

L’œil aux 3000 facettes intrigue non seulement le scientifique, mais cinéastes et « acteurs, au moyen de « l’effet-mouche », lorsque Charlot tente de chasser l’intruse et provoque sans tarder le rire. L’on ne pouvait enfin rater l’auteur d’un film impressionnant, coruscant : La Mouche de David Cronenberg[8], cinéaste horrifique et romancier vigoureusement obsédé par les biologies science-fictionnelles et le transhumanisme[9]. Dans la tradition des Métamorphoses d’Ovide, un téméraire expérimentateur voit son corps, sinon son esprit, subir une progressive transition vers celui de l’insecte. Le « bellâtre joue le rôle d’un scientifique » : ses expériences de téléportation sont perturbées par l’intrusion d’une mouche dont l’ADN interfère avec le sien, gonflant son corps de protubérances charnues, d’yeux globuleux, d’ailes bientôt, sous le regard fasciné de sa maîtresse, la journaliste Véronica. La tératologie de Cronenberg n’est jamais innocente…

Un étrange et beau cahier central de photographies souvent en couleurs, rien moins que 32 pages - auquel on aurait pu emprunter quelque gravure pour une couverture plus attirante - anime cet ouvrage décidément original, à la perspicacité redoutable, auquel ne manquent pas les analyses subtiles, pour reprendre l’adjectif du titre de l’entomologiste Ernst Jünger[10]. Et si l'on veut poursuivre cette exploration entomologique, en revenant à notre cher Fabre, sachons qu'il existe, quoiqu'épuisée, une autre anthologie de ses souvenirs[11], vêtue d'une élégante couverture aux scarabées, sphex et mante religieuse...

 

Tout comme il n’y a de cabinet de curiosité sans insectes, il n’y aurait guère de vie sur notre planète sans eux. Le bousier ne dévore-t-il pas les excréments, en grand nettoyeur, les oiseaux ne se nourrissent-ils pas de leur fourmillement ? Qui sait si, en imaginant l’éradication de l’humanité au moyen de quelque catastrophe nucléaire, l’homme ferait place nette à une entomocratie…

Thierry Guinhut

Une vie d'écriture et de photographie

 

[2] Pétrarque : L’Ascension du Mont Ventoux, Séquences, 1990, p 34-35.

[3] Jean-Henri Fabre : Souvenirs entomologiques, Delagrave, 1924.

[4] Jean-Henri Fabre : Souvenirs entomologiques, Bouquins Laffont, 1989.

[6] Lucien de Samosate : Eloge de la mouche, Œuvres, II, Hachette 1874, p 267.

[7] Vladimir Nabokov : Autres rivages, Gallimard, 1989.

[10] Ernst Jünger : Chasses subtiles, Christian Bourgois, 1969.

[10] Jean-Henri Fabre : Souvenirs d'un entomologiste, Club des Libraires de France, 1955.

 

Jean-Henri Fabre : Souvenirs entomologiques, Delagrave, 1924.

Photo : T. Guinhut.

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1 septembre 2022 4 01 /09 /septembre /2022 09:51

 

Parador del Villafranca de Bierzo, Léon.

Photo : T. Guinhut.

 

 

Ravages de l’obscurantisme vert

et écologie de l’action,

par Yves Roucaute & Guillaume Poitrinal.

 

 

Yves Roucaute :

L’obscurantisme vert. La véritable histoire de la condition humaine,

Editions du Cerf, 2022, 392 pages, 24 €.

 

Guillaume Poitrinal :

Pour en finir avec l’apocalypse : une écologie de l’action,

Stock, 2022, 252 p, 19,50 €.

 


 

Pas un instant sans que l’effroi climatique nous chauffe les oreilles, au moyen du four macro-ondes médiatique et politique. Un réchauffement, que dis-je un dérèglement, serait à l’œuvre, et ce par la faute, la grande faute, inexpiable, de l’homme du capitalocène, néologisme violemment accusateur, alors que seuls les péchés capitaux du capitalisme[1] ont permis une expansion sans précédent de la prospérité humaine, y compris d’une nature plus propre. Comme dans les sociétés primitives, où les colères de la nature sont de l’ordre de la vindicte divine, leurs causes en sont indéfectiblement les manquements et exactions humains. Une culpabilité qui est du pain béni pour les postmarxistes et les thuriféraires de Gaïa, dont la pulsion de pouvoir trouve à s’exercer en un saint totalitarisme, puisque vert. Dont les conséquences sont les ravages déjà observables de l’écologisme, sans compter ceux à venir, tant les interdits et aberrations obèrent les libertés, font dérailler l’économie, fomentent les pénuries, fauchent l’herbe sous les pieds de la science à coups d’obscurantismes et de délires totalitaires, y compris au-dépens de l’équilibre raisonné entre l’homme et la nature. Or, à ceux qui nous taxeraient de négationnisme, il faut opposer des arguments scientifiques, historiques, économiques, politiques et in fine écologiques. Pour ce faire ouvrons l’essai d’Yves Roucaute L’obscurantisme vert. La véritable histoire de la condition humaine, de façon à retrouver l’intelligence perdue. Et, quoique Guillaume Poitrinal soit un croyant du réchauffement d’origine anthropique et de la nocivité du CO2, peut-être peut-il nous proposer, dans son Pour en finir avec l’apocalypse : une écologie de l’action, des solutions intelligentes. Demandons-nous cependant dans quelle mesure avons-nous affaire à un nouveau lyssenkisme...

 

Au préambule d’une telle charge contre réchauffement et dérèglement d’origine anthropique, laissons au lecteur la possibilité de consulter un numéro de la revue Mots. Les langages de la politique consacré aux Discours climatosceptiques[2]. Il s’agit d’un dossier réunissant cinq argumentaires censés contrer « les discours conservateurs » ; pratiquant l’analyse du mot « climatosceptique, voire climatoréaliste, et son rapport avec le populisme ; puis une réponse aux anti-véganisme ; enfin une analyse du « discours climatosceptique des Brexiters au Royaume-Uni. Nous devons avouer que malgré la finesse des analyses discursives et politiques, la chose ne nous a guère convaincus…

De surcroit, avant toute chose, il est nécessaire de penser que la climatologie est une science historique ; mais que sa dimension prédictive est pour le moins sujette à caution. D’autant qu’il s’agit d’un domaine chaotique (au sens de la théorie du chaos) où l’on doit tenir compte d’une foule de facteurs complexes, de cosmologie et de chimie, de géophysique et de thermodynamique, de glaciologie et d’océanographie, de vulcanologie et de tectonique, de la connaissance des masses d’air et des courants, sans oublier last but not least, l’héliologie. Ce qui devrait nous contraindre à l’humilité. Et si à l’impossible nul n’est tenu, il n’est guère douteux qu’Yves Roucaute ait des lumières sur ces questions.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Pensons la planète bleue, soit selon le sous-titre La véritable histoire de la condition humaine, ce que semble nous intimer l’illustration de couverture du livre d’Yves Roucaute, L’obscurantisme vert, dont le titre est évidemment encré de vert. L’adjectif « véritable » n’est pas ici un vain mot, tant l’essayiste part à la recherche de la vérité scientifique opposée à l’obscurantisme, au-delà des doxas, des propagandes et embrigadements. Il n’est pas indifférent de noter que l’auteur n’est pas un obtus freluquet, mais un agrégé de philosophie et de sciences politiques, sans compter deux doctorats, de surcroit auteur de La Puissance de la liberté[3], sur les Etats-Unis, ou encore Le Bel avenir de l’humanité[4] et L’Homo creator face à une planète impitoyable[5].

En un tel ouvrage sont déployées sept millions d’années de combats, lorsqu’une humanité nomade tenta survivre aux innombrables holocaustes fomentés par une nature impitoyable. Car hélas elle ne connaissait ni industrie, ni commerce, ni technologies, ni science pour se protéger et prospérer. Dix-sept glaciations ont gelé les os humain lors des 2,6 derniers millions d’années ; divers réchauffements violents les ont étouffés, que c’est miracle que l’humanité ait survécu ; sans compter éruptions volcaniques, secousses sismiques, tempêtes, cyclones, tornades, tsunamis… Mais encore virus et bactéries, pestes, coqueluche, tuberculose, lèpre, syphilis, cancers, maladies génétiques et autres handicaps. Lorsque les attaques animales meurtrières étaient loin de l’imagerie des gentilles bêtes qu’il ne faudrait pas différencier des humains selon la doxa antispéciste[6].

L’essai, judicieusement intitulé L’Obscurantisme vert, est logiquement et efficacement construit. L’Histoire de la terre d’abord, alternativement balayée par les canicules infernales et les glaciations les plus roides, dont l’homme ne peut être tenu pour responsable alors qu’il n’existait pas le moins du monde. Seuls le soleil, les variations de l’orbite et de l’inclinaison de la sphère terrestre, ainsi que du pôle magnétique, le volcanisme, les courants sont les auteurs de ces aléas. Quand « 99,9% des espèces vivantes furent exterminées », l’espèce humaine, surtout nomade, faillit connaître bien souvent le même sort pendant les douze mille ans qui nous ont précédés à cause de ces mêmes bouleversements climatiques, quels que soient les taux de CO2. Mieux vaut sauver l’humanité que ce ramassis de catastrophes et de rares bienfaits : la planète. Ce qui ne signifie pas la saloper, bien entendu. Séismes, éruptions, inondations, sécheresses, cyclones, virus, bactéries, plantes toxiques et animaux tueurs et autres cancers qui sont aussi anciens que l’humanité, n’ont cessé d’être la cause des « holocaustes humains », au contraire du mythe de la douce nature protectrice.

Aussi nous faut-il « dominer la nature », domestiquer la forêt, affronter les catastrophes naturelles au moyen de la croissance et de la science. Or l’on découvre, « dans la caverne d’Ali-Baba naturelle, que l’énergie est inépuisable, l’ignorance des Verts incalculable ». Quand « la transition écologie est un attrape-gogo », les énergies fossiles ont des réserves immenses, qu’au-delà de la grande arnaque du CO2 (ou gaz carbonique), qui permet taxes et subventions sans nombre, ce dernier, indispensable à la vie, peut être une inépuisable source d’énergie aux côtés des avancées du nucléaire. Bien mieux que les faibles, coûteuses, périssables éoliennes, de surcroit destructrices de l’environnement, de par leurs matériaux rares, leurs socles de béton…

Nombre de mythes écologistes sont ici démontés à juste raison. Le « bio » est tout autant - ou presque - chimique que l’intensif et l’industriel, et désastreux tant sa productivité peut être faible et aléatoire. Ce dont témoigne le Sri Lanka, qui, interdisant engrais et pesticides, a conduit le pays aux pénuries, à la famine, à la crise économique et aux révoltes populaires.

Le mythe du CO2, comme par les soins de Christian Gérondeau[7], est mis en pièce : « Le CO2, n’est pas une molécule polluante ou dangereuse, mais une source d’oxygène et d’énergie », d’autant que son taux a toujours été supérieur à celui d’aujourd’hui, au cours des 460 derniers millions d’années, y compris pendant certains épisodes glaciaires. De plus, entre deux glaciations, il y a 5,9 millions d’années se produisit la « crise Messénienne » : un brutal réchauffement de 630 mille ans qui ne coïncida en rien avec une hausse du taux de CO2. Ce gaz expiré au rythme d’un kilo par jour et par individu est un bienfait pour l’humanité tant il permet d’augmenter les rendements agricoles, en conséquence de pallier les famines. Au contraire, le principal gaz à effet de serre est la vapeur d’eau, avec le méthane et non le CO2.

Lorsqu’un record de chaleur est battu, ou prétendument battu, les écologistes se précipitent pour inculper le CO2, donc l’Homme. Jamais rien n’est souligné lorsque les records de froid se bousculent : moins 48 degrés sur les Grands Lacs américains en 2019, ou moins 55 en Sibérie lors de l’hiver 2020 à Ojmakon, moins 38,9 degrés à Oslo en Norvège. L’Histoire de la terre voit sans cesse alterner des périodes de réchauffements, souvent rapides, et des refroidissements ; sans compter la variation du niveau des mers, soit quatre cents mètres en cent millions d’années (de moins 150 m et plus 250 mètres par rapport à aujourd’hui. Ne serait-ce que depuis l’Antiquité et depuis l’an mil minimum et optimum climatiques n’ont cessé d’alterner[8] pour des raisons essentiellement solaires. Et au contraire de la doxa réchauffiste, bien des scientifiques infèrent de la baisse d’activité solaire l’entrée dans une période froide pour le siècle en cours…

La Mothe-Saint-Héray, Deux-Sèvres.

Photo : T. Guinhut.

 

Qu’est-ce que le GIEC (Groupement Intergouvernemental d’Experts Climatiques), sinon une officine de sectateurs et de croyants religieusement corrects, grassement subventionnée, jouant d’énormes budgets, qui ne sont distribués qu’aux scientifiques dont les enquêtes vont dans leur sens… Leurs manipulations de chiffres, de courbes (en crosses de hockey) et de conclusions alarmistes ont été dénoncées par des scientifiques qui n’ont pas accès à la doxa médiatique. La collusion avec les entreprises capitalistiques vertes est patente pour engranger des profits. L’on parviendra bientôt à interdire les moteurs Diesels, alors qu’ils qui émettent dix fois moins de particules que les moteurs à essence. Et pourtant la pollution urbaine ne cesse de diminuer. Car, derrière les écologistes, sont à l’affut les fabricants d’éoliennes, de photovoltaïque, de véhicules électriques, ces aberrations à la mode.

Dans ce fiasco, la responsabilité des dirigeants politiques, des électeurs manipulés, des dirigeants des entreprises énergétiques est immense. De Total à EDF (d’ailleurs nationalisée), de droite et de gauche, tous exigent des Français de gérer la pénurie, d’avoir froid dans le noir de l’hiver, alors qu’ils ont criminellement omis de faire fructifier et progresser les technologies nucléaires, de construire de nouvelles centrales, par exemple au thorium, d’user du gaz abondant dans notre sous-sol (de schiste ou des mines de Lorraine), de prospecter et forer pour exploiter le pétrole du Bassin parisien et de Méditerranée en toute sécurité. L’on a préféré l’éolien, le solaire, voire la biomasse, des ressources secondaires, peu fiables, aux technologies polluantes et dépendantes de la Chine. Pour ce qui est de l’automobile, Carlos Tavares est le seul à avoir la tête sur les épaules, expliquant combien la voiture électrique est une absurdité, que les moteurs thermiques sont une solution non seulement viable mais propre à aller vers de moins en moins de consommation, sans compter que l’interdiction à venir des moteurs à essence et diesel va provoquer la disparition de la filière automobile. Relisons le roman d’Ayn Rand, La Grève[9] : lorsque les entrepreneurs ne sont pas dupes de l’absurdité des décisions politiques, mais courbent l’échine et lèchent le marteau qui les abat, seuls quelques esprits d’exception, comme John Galt et Hank Rearden font la grève des entrepreneurs et se retirent dans un havre de paix intellectuelle, technologique et libérale caché dans les Rocheuses.

Ainsi, de toute évidence, les écologistes bafouent les réalités scientifiques, méprisent et exploitent l’inculture courante, en faisant croire que ce CO2 d’origine anthropique est responsable d’un réchauffement climatique aussi modeste que naturel ; dans le but de gagner des élections, des postes, des subsides, capter des impôts, taxes et subventions. Idéologie, désinformation, éco-anxiété, tyrannie totalitaire, voilà le règne de « l’obscurantisme vert ». En ce sens, « l’urgence climatique est un leurre », pour reprendre le titre du physicien François Gervais[10]. Ce dernier, expertises scientifiques à l’appui, montre combien ce fantasme, cette fumisterie est dispendieuse. C’est avec humour qu’il avance : « Gageons qu’à ce titre, il est à craindre que cette étude n’intéresse pas les médias. Taxer le Soleil, les planètes, les nuages ? Sans doute nos dirigeants trouveront-ils plus commode et plus rentable de continuer à taxer le carbone ».

Au-delà de cette dénonciation bien sentie, Yves Roucaute montre que les solutions sont à portée de science. Les pollutions aux plastiques par exemple : le soleil, des enzymes et des champignons peuvent les dissoudre fort rapidement. Ainsi les biotechnologies sont les alliées de la dépollution. Bon à savoir également : produire de l’hydrogène génère force vapeur d’eau, principal gaz à effet de serre, il n’est donc pas la panacée. C’est là « où l’on voit que biotechs jaunes et nanotechnologies traquent toutes les pollutions, y compris intellectuelles ».

Tous les chapitres d’Yves Roucaute étant titrés par un « Où l’on voit » un brin comminatoire, ne ratons pas : « Où l’on voit que le bio est industriel est chimique, la transition agricole grotesque, le localisme une ignominie, et que l’avenir appartient aux biotechs vertes pour sauver l’humanité de la famine ». Ce en quoi il faut comprendre les Plantes Génétiquement Modifiées pour résister à la sécheresse et à leurs prédateurs. Et si on ne le savait déjà, l’on découvrira combien, au contraire de la décroissance, seuls la croissance et le productivisme contribuent à la démocratie et à la paix et « abolissent l’aliénation au travail ».

Le pire étant peut-être, au cœur de l’écologisme, cette « résurgence du spiritisme et de l’animisme », témoignant de ceux qui prétendent placer au centre des constitutions des Etats le crime - souvent prétendu - d’écocide, préparant ainsi un totalitarisme planétaire au nom de l’esprit des forêts, qui par ailleurs se portent fort bien et de mieux en mieux lorsque science et économie permettent d’assurer la survie humaine sans avoir besoin de défricher et de brûler à tout va.

Sans compter que les écologistes, antihumanistes, étant anti-voitures, contreviennent aux recherches qui les rendront moins gourmandes en énergies, mais aussi à l’indépendance et à l’individualisme. Ce sont bien des collectivistes qui ont vêtu leur communisme d’une cape de mage vert.

C’est avec beaucoup de verve, d’alacrité, d’humour et d’ironie envers les « petits bonshommes verts », ces puérils écologistes rageurs, qu’Yves Roucaute mène son indispensable et impérativement recommandable essai, non sans indiquer dans ses notes abondantes ses sources, des éléments bibliographiques rigoureux pour appuyer ses dires.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Guillaume Poitrinal, également auteur de Plus vite ! La France malade de son temps[11], proclame en Panurge que la planète se réchauffe à cause de l’activité humaine. Agitant le spectre de la peur il exige l’urgence à se remettre en question pour éviter le pire. Heureusement il n’est pas tout à fait perdu pour la cause de l’intelligence, car il ne s’agit pas pour autant de renoncer au progrès social et économique et de se précipiter tête baissée dans la décroissance, concept qui oscille entre « consensus politique » et « nouvelle religion ». Si pour lui « les dégâts de la mondialisation sont immenses », il craint « encore plus les effets de la pauvreté ». Pour ce faire, entre autres, « le retour du nucléaire est incontournable », nettoyer « le corpus de règles obligatoires le plus fourni de tous les pays de l’OCDE » est indispensable. L’« impératif écologique » bloque les initiatives et les projets industriels, dans une France déjà handicapée à cet égard.

Nous passerons sur sa formule erronée, « la prospérité en mode bas carbone est possible », pour nous intéresser aux nombreuses innovations scientifiques que la Chine met en œuvre, alors la France n’est pas dépourvue de moyens. Car elle dispose d’une source d’énergie peu chère et quasiment décarbonée, le nucléaire, du moins ajouterons nous si nous ne la négligeons pas, si nous nous poursuivons très vite l’expansion et le perfectionnement du nucléaire. C’est aussi « une grande puissance agro-sylvicole », alors que la matière issue de la photosynthèse sera celle de demain. Guillaume Pitrinal n’est donc pas un agitateur du chiffon vert apocalyptique, un rétréci du renoncement. Il juge préférable d’apporter des solutions de terrain, de la part d’un chef d’entreprise qui s’est engagé dans une écologie positive et créatrice d’emploi : cet ex plus jeune patron du CAC40 vient de créer « une start-up qui révolutionne la construction et l’immobilier en remplaçant le béton par du bois massif ». Aussi son expérience lui permet d’affirmer avec justesse : « nous devons dénoncer la prise d’otage dont l’écologie est aujourd’hui victime. Elle est devenue le terrain de jeu de prédicateurs, d’illusionnistes et d’extrémistes ». Sauf qu’il parle d’« asservir le capitalisme à l’écologie ». Certes écologisme et écologie sont deux choses bien différentes, mais l’asservissement du seul réel moyen valide d’assurer liberté et prospérité - nous avons nommé le capitalisme libéral et non de connivence - serait mortifère, aux mains de quelque oligarchie que ce soit…

Sans guère de doute un nouveau lyssenkisme est à l’œuvre. Cette politique agricole fut formulée dans l’Union des Républiques Socialistes Soviétiques par Trofim Denissovitch Lyssenko et  ses affidés à la fin des années 1920, puis appliquée au cours des années 1930. Technicien agricole, il se pique d'une théorie génétique pseudo-scientifique, la « génétique mitchourinienne », qui devient en 1948, sous l’égide de Staline lui-même, la théorie officielle exclusive, évidemment opposée à une « science bourgeoise », jusqu’en 1964. Une fois reconnus les dégâts et les pénuries causés par une telle affabulation, l’on revint à la raison, si tant est que ce dernier mot eût un sens en Union Soviétique. Or il n’est pas insensé de qualifier l’urgence climatique, le réchauffement d’origine anthropique, les taxes carbone, les éoliennes et à peu de choses près tout l’appareil de l’écologisme comme un nouveau lyssenkisme, cependant plus grave que le précédent car largement international…

 

Hélas la puissance idéologique, l’endoctrinement subi par les élèves de l’Education nationale, la persuasion par la peur, l’apparence scientifique du discours et de la planification écologistes, le militantisme médiatique, bien qu’ils viennent d’un groupuscule, gouvernent de fait à la place des citoyens, exercent une réelle et sournoise dictature, au dépend des libertés et des avancées réellement scientifiques. La volonté de puissance des activistes forcenés et des politiques aussi incultes que démagogiques, associée au suivisme et à la servitude volontaire d’une part du public risquent de faire long feu. Il est à craindre que même le mur des réalités ne les arrête, tant la libido dominandi les encourage, tant le besoin de croire une pensée manichéenne et de s’enrégimenter taraude nos concitoyens. À moins que le château de cartes vert ne s’écroule et que la raison, pragmatique et créatrice, reprenne le dessus.

 

Thierry Guinhut

Une vie d'écriture et de photographie


[2] Discours climatosceptiques. Mots. Les langages de la politique, n° 127, novembre 2021, ENS Editions.

[3] Yves Roucaute : La Puissance de la liberté, PUF, 2004.

[4] Yves Roucaute : Le Bel avenir de l’humanité, Calmann Lévy 2018.

[5] Yves Roucaute : L’Homo creator face à une planète impitoyable, Contemporary Bookstore, 2019.

[10] François Gervais : L’Urgence climatique est un leurre, L’Artilleur, 2018. 

[11] Guillaume Poitrinal : Plus vite ! La France malade de son temps, Grasset, 2012.

 

Monasterio de Valvanera, La Rioja.

Photo : T. Guinhut.

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9 février 2022 3 09 /02 /février /2022 17:59

 

Petz, Scilliar Catinaccio, Schlern Rosengarten, Trentino Alto-Adige, Südtirol.

Photo : T. Guinhut.

 

 

 

 

Monstrum œcologicum.

Raisons et déraisons écologistes,

entre éolien et nucléaire.

Avec le concours de Ferghane Azihari, Marc Lomazi,

Pascal Perri, Fabien Bouglé, Timothy Morton.

 

 

Ferghane Azihari : Les Ecologistes contre la modernité,

La Cité, 2021, 240 p, 18 €.

 

Marc Lomazi : Ultra ecologicus, Flammarion, 2022, 351 p, 19,90 €.

 

Pascal Perri : Le Péril vert, L’Archipel, 2021, 224 p, 18 €.

 

Fabien Bouglé : Eoliennes. La face noire de la transition énergétique,

Editions du Rocher, 2022, 240 p, 16,90 €.

 

Fabien Bouglé : Nucléaire. Les vérités cachées,

Editions du Rocher, 2021, 288 p, 15,90 €.

 

Timothy Morton : Être écologique, Zulma, 2021, 256 p, 20 €.

 

 

Alors que la préservation de la nature et son harmonie avec l’homme devraient être un but commun, elle est prise en otage par un écologisme qui vise à tyranniser, voire éradiquer l’humanité. D’où vient ce Monstrum œcologicum ? Alors qu’il n’a plus guère à voir avec l’écologie au sens scientifique du terme, d’où vient sa généalogie, son archéologie, pour employer pompeusement des termes nietzschéens et foucaldiens ? Si l’on doit se souvenir que ses thuriféraires ont leur origine dans le mythe de l’âge d’or, dans le rousseauisme et le romantisme[1], l’on ne mesure pas assez combien ils sont animés par la pulsion totalitaire, avatar d’un idéalisme communiste délétère. Sous l’action de l’homo technologicus, la planète ne court rien qu’à sa perte, le réchauffisme climatique inondera les continents, le gaz carbonique étouffera toute vie. Les solutions décroissantes, taxatoires, lumineuses et électriques ne sont en fait que du vent, que des miroirs aux alouettes, dont quelques essayistes avertis démontent les impostures. Ferghane Azihari dénonce la doxa « contre la modernité », Marc Lomazi rhabille les verts pour l’hiver, en énumérant ces « nouveaux croisés de l’écologie », alors que Pascal Perri part à la chasse du « péril vert ». Enfin, en un tir croisé, Fabien Bouglé démonte les éoliennes et réhabilite le nucléaire. Et de façon à éviter le biais de confirmation, qui consiste à ne lire que ce qui va dans notre sens, nous nous demanderons cependant si l’homo ecologicus n’est qu’ultra ou monstrum, si, avec Timothy Morton, il peut être plus mesuré. Ne s’agissant pas ici de dénier l’intérêt de la dépollution et de la biodiversité, au-delà des raisons invoqués par les écologismes, il y a bien des déraisons à écarter pour raison garder.

 

Grâce à la merveilleuse gestion de nos Etats et de l’Europe, les prix de l’électricité bondissent. Centrales nucléaires indûment fermées en Allemagne et en Belgique, à Fessenheim en France, réacteurs fermés pour maintenances non anticipées, retards scandaleux pour l’ European Pressurized Reactor, imprévoyance au point de ne pas avoir lancé la construction d’autres exemplaires, ineptie scientifique en ne considérant pas la solution du thorium, tout se conjugue pour non seulement devoir recourir à de polluantes centrales à charbon, mais passer honteusement sous les fourches caudines des diktats écologistes les plus obscurantistes. Résultat : on achète au prix fort le gaz russe ou algérien, dont nous sommes dépendants. Alors, pour tenter de pallier toutes ces hausses de prix infligés aux usagers, l’Etat invente des « chèques énergie », des gels des prix, des boucliers tarifaires, autres monstres technocratiques, qui pèsent de toute évidence sur la réalité des marchés et sur les finances publiques dont la dette et le déficit sont faramineux.

Lorsque l’on proclame la fin des investissements dans le gaz, le pétrole et le charbon, leurs prix s'envolent, non sans conséquences économiques, sociales et politiques délétères, accompagnées de la hausse du prix du carbone, cette fiction sucée par des lobbies. L’inflation verte flambe. D’autant que la faiblesse intermittente des énergies renouvelables rend l’approvisionnement aléatoire.

Véritable jugement divin séparant les justes et les injustes, le « malus écologique automobile » établit des taxes à l’achat du véhicule en fonction du gramme de CO2 émis, d’un niveau évidemment de plus en plus réduit pour abonder la fiscocratie. Car l’on a décrété en vue des prochaines années la fin des véhicules thermiques, au profit de chimères. Tant vantées à coup de propagande, plans étatiques et subventions, toute trahisons du sens du marché et du réel progrès, les voitures électriques, dont les performances diminuent considérablement en hiver, nécessitent des batteries lithium-ion constituées de dizaines de kilogrammes de lithium, cobalt, nickel, graphite et cuivre, tous métaux rares et stratégiques, ce qui est une autre aberration écologique, sans compter la soumission à la Chine communiste, souvent productrice de tels métaux.

Ainsi vous ne direz pas ne pas avoir été avertis : Monstrum œcologicum  est aux manettes ; pour notre malheur. Thèse que nous pouvons étayer avec le concours d’une poignée de sérieux analystes.

Le pamphlet est aussi argumenté que bien senti. Ferghane Azihari montre dans Les Ecologistes contre la modernité, combien ces derniers dressent à charge « le procès de Prométhée », pour reprendre son sous-titre. Contre-procès, l’essai de notre analyste en sciences publiques démonte les raisonnements spécieux de ces antimodernes qui forment les rangs de l’écologie politique. Loin de se contenter de dénoncer les travers verts, il engage « un plaidoyer en faveur d’un modèle de société dont le bilan est remarquable », dans le cadre d’une « écologie des Lumières ». Il lui faut rappeler qu’au contraire du mythe rousseauiste du bon sauvage, c’est l’agriculture puis l’industrialisation et les technologies qui ont considérablement diminué la pénibilité, éradiqué le travail des enfants, du moins dans les pays développés, tout en assurant la croissance presque planétaire de la prospérité. De plus la guerre meurtrière était bien plus répandue dans les temps primitifs et anciens que dans notre époque moderne. De plus encore, ce développement, loin d’éliminer la nature, permet de diminuer la pollution, de préserver des espaces de biodiversité. En effet, « nos sociétés sont de moins en moins toxiques ». Aussi « Catastrophisme », « collapsologie », « extinction », « décroissance » font  le mantra d'un discours écologiste asséné comme une révélation prophétique, pour qui le développement économique et industriel, le progrès en un mot, est le synonyme d’un suicide programmé. Tout cela n’est que contre-vérités ; au regard des faits, cette religion mâtinée de paganisme est pire que le mal prétendu : « Gaïa déifiée, Sapiens profané »…

Le tropisme anticapitalisme a trouvé un nouvel exutoire, après la chute du communisme meurtrier en Union Soviétique et son avatar chinois têtu : c’est cet écologisme qui réussit à dépasser le marxisme dans son injonction non plus seulement sociale, mais planétaire : « Opposer l'embourgeoisement du monde à la qualité de l'environnement n'a pourtant aucun intérêt. L'idée qu'il suffirait de s'affranchir du matérialisme pour assainir notre planète ne correspond à aucune réalité historique ou géographique. Les pays les plus propres et les plus résilients face aux aléas naturels sont les plus riches : ceux qui ont les moyens de se doter des technologies les plus avancées. Le changement climatique ne change pas le fait que le progrès économique et technologique reste le moyen le plus juste et le plus sûr de lutter contre les nouveaux risques, sans renoncer à améliorer le sort des pauvres. Une société d'abondance pour tous est donc possible et souhaitable » ; ainsi sait penser notre essayiste.

La persistance de la vision malthusienne saute aux yeux à la lecture du rapport Meadows élaboré par le Club de Rome, qui certifiait la fin du pétrole en l’an 2000 ou l’irrépressible pollution des mégapoles. Quoique la réalité eût démenti de telles allégations, ce rapport reste une icône de l'écologisme. L’entêtement idéologique est de l’ordre de la « connaissance inutile » dont Jean-François Revel[2] avait montré les errements. De surcroit la concurrence incite à économiser les ressources : pensons au développement du recyclage et des échanges de produits d'occasion. Sans compter qu’une solution technologique à laquelle personne n’a pensé jusque-là ne peut manquer de survenir, l’inventivité étant le moteur de la civilisation.

Dans une recherche d’authenticité, l'on oppose naturel et artificiel. Cet écologisme romantique idéalisant un éénique passé et la tradition est politiquement ancré à droite : « L'écologie réactionnaire est le pendant droitier de la tentation de préempter la nature pour recycler un agenda politique sans rapport avec l'environnement. Là où la gauche voit dans l'écologie un prétexte pour ressusciter l'anticapitalisme, les réactionnaires voient dans le mythe de la nature vierge l'opportunité d'étendre le rejet de la modernité aux questions sociales. Il s'agit de verdir l'éternelle haine du pluralisme des mœurs et du cosmopolitisme qui constitue la modernité ». L’analyse Ferghane Azihari est plus que pertinente.

Ce rejet de la modernité, au nom de l'urgence face à la catastrophe supposée, risque bien d’être imposé par un pouvoir autoritaire, attentatoire autant aux principes de la démocratie libérale qu’à l’éthique des Lumières.

          Selon le sous-titre, « Le procès de Prométhée », c’est en fait à un éloge de ce dernier que se livre l’essayiste. En fait, celui qui déroba le feu des dieux, donne les moyens à l’humanité d’accéder à la civilisation au-delà du sordide état de nature : « Prométhée nous a donné le feu sacré de l'Olympe. À nous d'en faire bon usage en ignorant ceux qui ne rêvent que d'humilier les hommes ». L’écologisme est un « prophétisme » qui ne reconnait pas les bienfaits de la modernité industrielle, en termes de paix, de santé, de confort et de liberté intellectuelle, et qui ne rêve que de nous replonger dans une vie maladive et brève, dans une condition humaine opprimée et dans un milieu dégradé. L’« écologie profonde » et sa « théocratie verte », la « décroissance volontaire » ne sont qu’une resucée des « lendemains qui chantent » promis par le communisme avec les conséquences abominables que l’on sait.

Alors que « nos sociétés sont de moins en moins toxiques », que « la surpopulation et la surconsommation n’existent pas », les catastrophes naturelles de moins en moins meurtrières, que « le développement économique est le meilleur procédé d'assainissement », que le niveau des mers ne monte que de quelques centimètres, l’on nous promet la punition ultime de l’homme, le déluge et le feu, dignes d’un chantage à l’apocalypse !

Rhétoricien judicieux, cultivé tant philosophiquement que scientifiquement, Ferghane Azihari déplie un essai qui est à la fois un blâme sévère des fous de pouvoir écologique et un courageux éloge de la capacité humaine et scientifique d’œuvrer pour un monde meilleur, y compris dans ses acceptions naturelles indispensables.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Plus largement, ces « nouveaux croisés de l’écologie », pour reprendre le sous-titre de Marc Lomazi, forment une convergence des luttes, une mouvance sectaire que cet essayiste balaie d’un beau revers de livre : Ultra Ecologicus. Le bal des idéologues, activistes et combattants se déroule sous nos yeux effarés. Ils sont écoféministes, zadistes, antispécistes et végans de « Boucherie Abolition », collapsologues prophétiques, utopistes décroissants, commandos d’« Extinction Rébellion », survivalistes et autres « anarcho-primitivistes », sans compter leur anticapitalisme, antiracisme et décolonialisme vindicatifs et radicalement intolérants. Le nucléaire est leur enfer à conjurer, les Organisme Génétiquement Modifiés leur Satan. Les plus fondus de la « deep ecology » veulent revenir au paradis des chasseur-cueilleurs, détruire toute civilisation.  Quant aux élus verts, les voilà insurgés contre les sapins de Noël, les menus viandeux, les voyages en avion…

Autour du Basque Etcheverry et d’« Alternatiba », de la jeune Suédoise Greta Thunberg, des « XR » des « Red Rebels », d’« ANV-COP21 », ou des plus violents « Earth Liberation Front » aux Etats-Unis, l’on entraîne les moutons de Panurge dans des manifestations, l’on saccage le siège du gestionnaire américain de capitaux BlackRock, l’on souffre d’« éco-anxiété », l’on bloque les ponts de Londres, l’on goûte le sabotage et l’on est financé par des fondations et de grands capitalistes, dont Georges Soros ! Une force de frappe écoterroriste[3] inquiétante n’attend plus que l’épuisement de la pandémie (dont l’Etat joue pour tenter d’en retarder les actions) pour se jeter sur le monde libre, s’il l’est encore.

L’écoféminisme, dont l’une des têtes de l’hydre est Sandrine Rousseau, se propose des programmes autoritaires, totalitaires, pour faire régner la paix mortifère du climat à coups de redistribution sexuée de la population et d’interdictions de tout ce qui contrarie la doxa la plus verte. Sur un autre versant, les guérilleros anti-antennes cumulent près de 170 attaques explosives dans l’hexagone en 2020. Les technophobes récusent la « dictature numérique », quoique non sans raison[4]. Pêle-mêle, ils dénoncent les Organismes Génétiquement Modifiés, le nucléaire, les vaccins… Dans la tradition des luddistes, vieille de deux siècles, mais aussi de philosophes comme Günther Anders[5] et Jacques Ellul[6],  ils peuvent pratiquer le sabotage des machines. Quoique certains viennent de la droite traditionnaliste, la plupart sont aussi verts que rouges et noirs, comme les zadistes s’attaquant aux projets de barrages, scieries, aéroports, aérogares, site d’enfouissement des déchets nucléaires à Bure. Les plus extrémistes sont aux Etats-Unis des anarcho-primitivistes, résolus à revenir à l’ère des chasseur-cueilleurs ! Les plus violents sont quant à eux les « Black Blocks », absolument anticapitalistes et antiétatistes.

D’autres mouvances, celle des néo-utopistes, sont tentées par le mysticisme paysan, comme le localiste fumeux Pierre Rabhi, par les « écolieux » en pleine nature, dont l’inventivité architecturale et agricole en fait des laboratoires in vivo, mais aussi des révélateurs des faiblesses du collectivisme et des conflits humains.

Les décroissants ne sont pas moins totalitaires, visant à interdire la publicité, les produits chimiques, l’automobile, à remplacer les supermarchés par des centres de produits locaux, l’Etat par des « biorégions », à instituer la semaine de 20 heures et un salaire de 1000 €, ou plus exactement des « fournitures gratuites », sans obligation de travail. L’utopie de la sobriété ascétique cache à peine une douloureuse dystopie. En toute logique le virus de la décroissance croît à gauche…

Pire, si possible, les délirants de la tragédie climatique agitent le chiffon vert de la peur au service de l’écoanxiété et se font les apôtres de la collapsologie jusqu’à des dérives néopaganistes et obscurantistes. Gageons que, si la catastrophe civilisationnelle arrive, elle aura d’autres causes ; ce qui n’empêche pas de prendre des précautions préconisées par les survivalistes.

Et si l’on doit aux animaux une réelle humanité, il ne s’agit peut-être pas de suivre les antispécistes et les « animalistes radicaux », soit la protection accordée jusqu’au rats et punaises, soit l’abolition de l’élevage, du cuir, le véganisme obligatoire ; au risque d’abonder les entreprises biotechnologiques qui préparent des viandes de synthèse et autres faux laits. Sans compter les violences contre les éleveurs et les bouchers par les affidés de « Boucherie abolition », qui, malgré la vertu de ses reportages à charge contre la violence sadique exercée dans les abattoirs, associe l’abattage animal à la Shoah, tout en faisant la plupart du temps silence sur l’abattage halal ! 

En sus du document à charge de Marc Lomazzi contre le « despotisme vert », Pascal Pérri, nettement plus pugnace, vilipende Le Péril vert, en chargeant la liste des fauteurs de troubles graves. Il y ajoute les « anti-chasse », « anti-corridas », les « anti-sapins de Noël », les « anti-tour de France », les « anti-mâles blancs », « anti-aviations », « anti-vaccins », « anti-OGM », en un fourre-tout ubuesque, tant la vénération écologiste, la fidélité obtuse à la nature sont des moteurs anti-libéraux et contraires à la raison scientifique, en relevant par exemple combien le financement de la recherche contre les maladies génétiques, via le Téléthon, est plébiscité par les Français qui en toute incohérence rejettent les Organisme et Plantes Génétiquement Modifiés. Même si corrida et chasse, en dépit de leur valeur culturelle, sont le plus souvent des cruautés sans nécessité, sans compter une campagne blindée de cartouches et de plomb.

 À l’énumération des foudres brandies par les purs de la doctrine écologiste, le plus souvent issus de l’extrême-gauche, quoique parfois des Chrétiens traditionalistes et de l’extrême droite régressiste, au réquisitoire contre ce « nouvel opium » de la jeunesse, ce « retour des grandes peurs » millénaristes, Pascal Perri ajoute un plaidoyer bien senti en faveur d’une écologie non-punitive et rationnelle, plaidoyer intelligemment argumenté. Car à l’encontre du « cauchemar vert », d’une « société de contrainte et de rationnement, il ne faut pas méconnaître que le génie humain est « une ressource inépuisable », capable de créer ce que nous n’imaginons qu’à peine, par exemple une énergie nucléaire propre, infinie, des matériaux post-naturels sans nuisance pour l’environnement et notre santé…

 

Cañada Vellida, Teruel. Photo : T. Guinhut.

 

Coup sur coup, Fabien Bouglé réalise un beau doublé polémique avec Eoliennes. La face noire de la transition énergétique, puis Nucléaire. Les vérités cachées. Jamais l’expression « Ce n’est que du vent », ne fut plus appropriée qu’aux éoliennes. Sacrifiant au dieu Eole, elles paraissent une icône indiscutable de la modernité écologique et de la transition énergétique et climatique, ces vaches sacrées affichées par l’idéologie et la propagande. Pourtant, il ne s’agit rien moins que d’un « scandale écologique et financier mondial » ! Métaux rares et batteries souvent venus de Chine communiste, broyage des oiseaux et des chauvesouris, centaines de tonnes de béton pour les ancrer dans un sol qui ne les retient pas lors d’ouragans, recyclage quasi-impossible, pollution carbone lors de leur fabrication et transport, infrasons délétères, durabilité guère au-delà de vingt ans. Et encore les subventions ventent en arrosant les lobbys industriels et financiers. Elles sont bien les seules car la faible productivité des machins dépend d’un vent souvent absent lorsque l’on en a besoin. Ce qui entraîne la nécessité de réactiver des centrales à charbon pour pallier les pénuries et aux rejets carbones assurés. Et encore faut-il payer plus cher une électricité non rentable, « au détriment des citoyens rackettés »… L’on commence à s’apercevoir ailleurs, mais guère encore en France, que nous nous sommes laissés vendre du vent avec une « technologie obsolète ». Fabien Bouglé nous révèle combien la mafia, la « Cosa Nostra », et les Organisations Non Gouvernementales comme Greenpeace rôdent sous le vent, que corruption et prises illégales d’intérêt gangrènent un marché juteux afin d’« accentuer les bénéfices colossaux des industriels du vent ». Sans compter les menaces sur l’emploi et le tourisme dans des zones piquetées et rayées éoliennes… Face à cette « arme de destruction massive de l’environnement », il est à souhaiter que cet essai fort convainquant devienne ce qu’il mérite d’être : un avertissement salutaire.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Il doit en être de même pour Nucléaire. Les vérités cachés, du même Fabien Bouglé, décidemment dans une forme éblouissante. Ce qui aurait pu passer pour une amère ironie après la catastrophe de Tchernobyl, au demeurant peu mortifère, puis celle de Fukushima, dont le tsunami seul fit des victimes (une seule est avérée pour l’accident nucléaire) est bien un éloge paradoxal, tant les préjugés et les incantations alarmistes ont déconsidéré la science de l’atome. L’éloge de l’énergie nucléaire, « face à l’illusion des énergies renouvelables » est de plus en plus crédible, ce dont témoignent les plus raisonnables dans le camp écologiste.

Il n’est pas question ici d’être naïf et de prêcher le pour en oubliant le contre. Les inconvénients sont connus : si sûre qu’elle soit, « aucune électricité ne relève d’une immaculée conception ». Le démantèlement de centrales sénescentes risque de coûter des fortunes. Les déchets nucléaires restent encore préoccupants. Cependant les voilà bientôt recyclés dans les European Pressurized Reactor, puis dans de futures centrales au thorium, minerai bien plus abondant que l’uranium et infiniment moins dangereux et militairement inutilisable.

Non, les centrales ne rejettent aucun gaz à effet de serre. Non les déchets ne sont pas des monstres radioactifs, alors que ceux provenant de la combustion du charbon sont autrement pluriels (plomb, arsenic et uranium !), abondants, radioactifs et dangereux. Ils ont pour la plupart une faible activité et une vie courte, devenant semblables à la radioactivité naturelle de régions granitiques comme la Bretagne ou le Massif central, donc sans danger. D’autres, très dangereux, ne représentent que « 3,1 % du volume et 99,8 % de la radioactivité » et leur retraitement sépare l’uranium réutilisable (96 %) des déchets hautement radioactifs (4%) destinés à être vitrifiés (l’archéologie du verre montrant que cette technique résiste à des milliers d’années). Le compactage et colisage des autres déchets complète ce qui doit être enfoui et rester accessible dans les argiles de Bure. Cependant la « transmutation par laser », sous l’égide du professeur Mourou (Prix Nobel 2018), permettra bientôt de « réduire la radioactivité de 30 millions d’années à 30 minutes » ! Même s’il faut encore une ou deux décennies de travaux, la découverte est d’importance. Par ailleurs ces déchets pourront être utilisés dans des réacteurs à sodium liquide…

Quoique le nombre de morts à l’occasion de la production des énergies soit infiniment plus faible au bénéfice du nucléaire, à l’encontre du charbon, du gaz et de l’éolien (à cause des chutes des techniciens), la sûreté des centrales reste cruciale, même si elles ne sont en rien menacées d’exploser comme une bombe atomique. Les draconiennes normes de sécurité, qui expliquent le surcoût et le retard de l’European Pressurized Reactor français, mais aussi finlandais, sont une sauvegarde, même si l’on peut soupçonner une part d’impéritie chez nos organisme étatiques, voire ce que Fabien Bouglé appelle avec pertinence une « politique de sabotage du nucléaire français », notamment à l’occasion de l’arrêt de Superphénix, qui consommait des déchets nucléaires. Songeons que pour un coût d’investissement égal, intégrant les futurs démantèlements des réacteurs (90 milliards), le parc éolien ne produit que 6 % de notre électricité (à l’encontre des 70 % pour le nucléaire) dont l’intermittence (24% de leur capacité) conduit au retour du charbon, et dont la durée de vie est de 20 ans (comme le photovoltaïque) alors que l’on parvient à prolonger la vie d’une centrale jusqu’à soixante ans ! Sans compter que les éoliennes nécessitent 500 fois plus de surface qu’une centrale à production équivalente. Au gouffre financier s’ajoute le gouffre de la raison. L’on se doute qu’une sortie du nucléaire, outre le « danger pour l’emploi et la souveraineté », se ferait au prix d’une « explosion des factures et des coupures ».

La « face cachée des Organisations Non Gouvernementales et des lobbys antinucléaires » est alors révélée dans son idéologie, son inculture scientifique, sa mauvaise foi, son parasitisme et sa dangerosité. En particulier Greenpeace, ce « mercenaire vert », dont les troubles financements ne laissent pas d’interroger sur l’indépendance géopolitique de son activisme antinucléaire, complice des lobbys industriels de l’éolien, comme le World Wilfife Found d’ailleurs, et complice d’une Allemagne résolument antinucléaire.

Il n’en reste pas moins que la France - et ses irresponsables responsables politiques - si elle produit encore 70 % de son électricité grâce au nucléaire, prend un retard considérable. En fermant Fessenheim encore bonne pour le service pour complaire aux écologistes obscurantistes. En ne renouvelant pas un parc qui risque d’être obsolète dans les décennies à venir, et qui, déjà, à cause de maintenances et d’insuffisance, doit recourir aux importations et à des centrales à charbons polluantes, au risque de la panne géante, le tout en dilapidant l’argent public dans les éoliennes et le solaire, tout aussi poussifs, intermittents et bien peu recyclables. Il est urgent, répétons-le, alors que d’autres pays y travaillent activement, de concevoir des microcentrales, d’autres au thorium, la fission nucléaire…

L’ouvrage de Fabien Bouglé, une fois de plus, est scientifiquement informé, rigoureux, clair, imparable, ses notes et références sont inattaquables. À lire et méditer, vous dis-je !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Il ne s’agit pas là de s’opposer au droit de vivre en harmonie avec la nature et les durs travaux dans des yourtes cévenoles, comme le fait une Sylvie Barbe. Ni de déprécier qui veut vivre d’agriculture biologique. Mais de se défier de la rhétorique folle qui prétend lutter contre « le patriarcat blanc, hétéronormatif, capitaliste et écocidaire ». S’il est loisible de vivre d’une manière plus éco-responsable, de limiter sa consommation, de travailler les jardins partagés, il serait alarmant que l’homo economicus devienne un ultra ecologicus à ses dépens et aux mains d’une tyrannie planétariste.

Hélas Marc Lomazi, dont l’ouvrage est abondamment et précisément documenté, qui, donne la parole aux ultra écologistes autant qu’à leurs détracteurs, semble ne pas remettre en question cette « urgence climatique » fantasmatique[7]... Et il en est de même pour Pascal Perri, dont Le Péril vert chasse sur des terres voisines. Cependant nous apprécierons d’user de technologies peu gourmandes en ressources, recyclables, non polluantes, mais on ne peut réellement y compter sans les innovations scientifiques et technologiques. Certes il faut déplorer que la biodiversité puisse se rétrécir. Mais outre que la nature elle-même se charge de faire disparaître des espèces, songeons que lorsqu’un biotope retrouve ses conditions naturelles, les espèces viennent proliférer, voire laissent apparaître quelques-unes que l’on croyait effacées. 

Monstrum œcologicum ? Lisons de l’intérieur et de Timothy Morton : La Pensée écologiste. Synthèse, manifeste ? Extrêmisme ou modération ? Si nous avions choisi cet ouvrage de par son titre, nous en attendions une cohérence à tout le moins. Il faut dire que l’introduction désarçonne tant la clarté n’est pas son fort, sauf pour affirmer que cette pensée est globale et que tout est dans tout : « la pensée écologique c’est l’interconnectivité », il est question de « collectivité écologique » ; de là au collectivisme il n’y a qu’un pas. Il ne suffit plus pour lui de « verdir » les consciences et les programmes électoraux, la démarche doit être « globale ». Des affirmations pour le moins hasardeuses pullulent : « Le réchauffement climatique a déclenché la sixième extinction de masse » ; que faire alors des successions de réchauffements et de refroidissements qui ont marqué les derniers millénaires ? Il n’en reste pas moins qu’il est du devoir de l’humanité de se préoccuper des espèces menacées. D’ailleurs, l’une de ses préoccupations est de savoir si les animaux (les « non-humains », selon le novlangue) peuvent apprécier l’art.  

« Esthétique et pensée politique », pour ce philosophe, doivent observer un virage écologique, ce pourquoi nombre d’artistes, plasticiens et musiciens trouvent chez lui leur inspiration. De chapitre en chapitre, il s’intéresse « à la notion d’étranges étrangers, les formes du vivant auxquelles nous sommes connectées », revenant à Darwin. Evidemment Timothy Morton est anticapitaliste et préfère le monde des poètes de la nature, comme Wordsworth, Shelley. « La nature romantique est une construction artificielle », dit-il pourtant. Si nous apprécions ce tropisme poétique en direction des écrivains et poètes romantiques, chez Timothy Morton ce n’est qu’une preuve de plus de son manque de rationalité. Et si son regard vers le roman et le cinéma de science-fiction, La Trilogie martienne de Kim Stanley Robinson, Blade Runer ou Solaris, peut-être revigorant, il s’embourbe dans les fumées conceptuelles.

 

Parmi cet essai verbeux, plus encore que Bruno Latour[8] dont il est proche, l’on trouve cependant des éclairs de lucidité, des métaphores coruscantes : « les étendues sauvages sont des versions gigantesques et abstraites des produits exposés dans les vitrines des centres commerciaux », la critique de la surconsommation faisant ici mouche. De là à dire qu’il faut « tout penser écologiquement », jusqu’au papier du poème », c’est risquer une immixtion et une surveillance idéologiques générales[9]. À tel point que cet idéaliste - qui récidive avec Être écologique[10]- est « loin de dénigrer l’écologie profonde en tant qu’objectivation religieuse », ajoutant : « Peut-être que les nouvelles éco-religions offrirons un soupçon de coexistence postcapitaliste ». Nos lecteurs savent combien nous sommes ici attachés aux vertus du capitalisme réellement libéral, à ses capacités d’innovation, y compris écologistes aux sens scientifique du terme, aux libertés individuelles que de telles perspectives religieuses vertement prétotalitaires menaceraient gravement…

 

Thierry Guinhut

Une vie d'écriture et de photographie


[3] Eric Denécé et Jamil Abou Assi : Ecoterrorisme, Tallandier, 2016.

[6] Jacques Ellul : Le Bluff technologique, Pluriel, 2017.

[8] Bruno Latour : Politiques de la nature, La Découverte, 1999.

[10] Timothy Morton : Être écologique, Zulma, 2021.

 

La Villa La Badia, Trentino Alto-Adige, Südtirol.

Photo : T. Guinhut.

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28 septembre 2021 2 28 /09 /septembre /2021 16:38

 

Masques du Golfe de Guinée.

Museum d'Histoire naturelle, La Rochelle, Charente-Maritime.

Photo : T. Guinhut.

 

 

 

 

Philippe Descola,

une anthropologie des mondes

& des Formes du visible.

 

 

Philippe Descola : La Composition des mondes,

Champs Flammarion, 2017, 382 p, 11 €.

 

Philippe Descola : Les Formes du visible,

Seuil, 2021, 766 p, 35 €.

 

 

 

Bois frustes ou finement sculptés, ils sont des objets, des masques, mais surtout des signes, des totems, des âmes. Nul doute que pour l’anthropologue une telle multiplicité de visions relève de sociétés lointaines dignes d'investigations. Un autre regard qu’occidental est donc nécessaire sur les ethnies lointaines et leurs artefacts ; c’est celui dont tentent d’user inlassablement les chercheurs. Toutefois y-a-t-il une anthropologie après Claude Lévi-Strauss[1] ? Son ombre tutélaire et structuraliste semble s’étendre définitivement sur le territoire des études consacrées aux peuples des confins de la planète. Pourtant il fut le maître de Philippe Descola (né en 1949) - qui lui consacra un volume d’analyses et d’hommage[2] - en une transmission de la vocation et de l’énergie. Cependant, plutôt qu’en une énumération des coutumes et des mythes, ce dernier va s’intéresser, outre La Composition des mondes à l'occasion de son entretien avec Pierre Charbonnier, aux Formes du visible. Que va nous dire de notre monde la profuse ethnologie comparée de Philippe Descola, mais au risque de choir dans l’alarmisme écologiste ?

Empruntant le cheminement autobiographique, cet entretien commence par une enfance choyée, curieuse de tout, puis une jeunesse éprise de révolution, ainsi que les vives querelles de chapelles qui embrasaient sa discipline, « goût de l’enquête » et formation dont l’aboutissement est moins la composition de soi que « la composition des mondes ». Reçu avec la plus grande cordialité par Claude Lévi-Strauss, il peut aller en Amérique du Sud, à la rencontre des Jivaros Achuars en Equateur, « de l’ampleur et de l’ingéniosité des savoirs écologiques et des techniques d’usage de l’environnement en vigueur chez les peuples de la forêt », en toute conscience des enjeux, ce dont témoigne alors la création du concept d’ « ethnocide ». S’il n’est pas dupe du romantisme du bon sauvage, la prise de risque est intense : là, « il était à peu près impossible en Amazonie de ne pas vivre comme ses hôtes ». Ce sont des communautés sans Etat, ni dieux, mais « avec un goût prononcé pour la guerre et la vendetta ». Peu à peu il en vient à montrer « comment les dimensions techniques et les dimensions symboliques de la praxis rétroagissent les unes sur les autres ». En particulier dans le cadre de son enseignement à l’Ecole des hautes études en sciences sociales. Ses travaux parviennent à maturité dans une thèse d’Etat, La Nature domestique[3], une monographie de terrain, puis dans un livre paru dans la prestigieuse collection « Terre humaine » : Les Lances du crépuscule[4], récit ethnographique profus et parfois burlesque consacré aux Achuars. Sa complicité avec Françoise Héritier lui permet d’entrer au Collège de France en l’an 2000, dont les cours nourrissent peu à peu Par-delà nature et culture[5], essai comparatif en quête d’un « principe d’ordonnancement des interfaces entre sociétés et environnements ».

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Chez les « Achuars du haut Kapawi », Philippe Descola et son épouse Anne Christine Taylor fabriquent de la bière de manioc et participent à la chasse, selon la division sexuelle du travail, collectent des plantes, font mille relevés. Bien qu’apparemment paisibles, ces indigènes peuvent être belliqueux et vengeurs. Or ils ne sont « pas déterminés dans leur existence sociale par des contraintes environnementales ou des limitations techniques mais par un idéal d’existence culturellement défini, ce que l’on appelle dans leur langue shiir waras, le bien vivre », ce dans une forêt « plantée par un esprit », et qu’ils jardinent ensuite. Leurs rêves, leurs incantations tissent des liens avec les âmes, humaines, animales et végétales qui sont des « partenaires sociaux », au sein d’une « écologie symbolique ».

L’un des aspects les plus prégnants de cet entretien est la manière dont Philippe Descola conçoit « le monde contemporain à la lumière de l’anthropologie ». Ainsi réhabilite-t-il les « non-humains », animaux, végétaux, minéraux, glaciers, gaz, jusqu’aux virus. Certes, mais n’est-ce pas prendre le risque dangereux de l’indistinction, voire d’un retour à un animisme finalement superstitieux… Cela dit le concept d’« anthropologie politique » mérite attention en tant qu’il entend préserver la liberté des peuples en leurs territoires.

Si cette Composition des mondes peut sembler parfois ardue en sa progression théorique, en particulier en termes d’autobiographie intellectuelle, le genre de la conversation permet de rendre le livre passionnant de bout en bout. À l’érudition accumulée répond une théorisation judicieuse, entre récit littéraire et démonstration scientifique, non sans le secours d’une personnalité pleine d’humanité, en particulier dans son attention à l’égard de la défense des peuples indigènes qui peuvent être affectés par des spoliations et autres oppressions.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les recherches de terrain de cette sommité américaniste de l'anthropologie le contraignirent à remettre en question le dogme conventionnel du dualisme nature / culture, humain / non-humain, et à classer les schèmes de la relation avec la nature : identification, relation et figuration. Car la nature est elle-même une production sociale, par le filtre de l’ethnie qui la vit. Or les quatre modes d’identifications, ou ontologiques, qu’il tint à définir ne sont pas forcément anthropocentriques, en leurs incarnations dissemblables : totémisme, animisme, analogisme et naturalisme. Ainsi, notre anthropologue ouvre le chemin d’une « écologie des relations ». Ces prémices, centrales dans Par-delà nature et culture[6], sont également dépliées dans l’entretien, d’une manière plus aisée, et reprises au seuil des Formes du visible.

Naturaliste, la société occidentale trace une frontière entre soi et autrui, une dichotomie entre nature et culture. Si la première est fondamentalement universelle en tant que monde physique et biologique, la seconde fait une différence nette entre humain et non humain, mais aussi entre les sociétés humaines entre elles. Une telle distinction, historiquement datée, depuis Platon et Aristote, ne s’est pas produite parmi les autres sociétés, ce qui pour nous les rend difficile à appréhender et fonde ainsi la tâche adaptative dévolue à l’anthropologie. En ce sens faut-il dépasser ce point de vue qui structure la pensée, du sens commun jusqu’à nos principes scientifiques, pour aborder les modèles animistes, totémistes et analogiques.

Animistes sont les sociétés pour lesquelles tout est âme, un arbre, un roc, un animal. De sorte que les attributs sociaux des non-humains permettent des relations de l’ordre de l’identité entre ces derniers et les êtres humains. Totémistes sont celles où le clan s’assimile à un totem, et où l’identité, intérieure et physique, est façonnée par leurs correspondants animaux, dont la variété est également le signe de celle de l’humanité. Analogistes enfin sont celles où l’on se heurte à une discontinuité des intériorités et des physicalités des humains et non-humains.

 

Un essai profus vient couronner l’édifice : Les Formes du visible. Ce sont celles des artefacts et de l’art confectionnés par les populations qui ont essaimé parmi le monde. L’on pourra s’étonner, en parcourant les quelques cent-cinquante illustrations en couleurs, de la diversité, voire de l’éclectisme, de ces productions. Outre leurs époques parfois fort éloignées, ce sont des masques africains qui voisinent avec des tableaux de maîtres hollandais du XV° au XVII°, une massue u’u des îles Marquises avec des enluminures médiévales, un masque du Shri Lanka avec un tapis de laine iranien, une photographie contemporaine avec des peintures rupestres et sur écorce venues des aborigènes australiens. Il est évident qu’il ne s’agit pas là d’un fourre-tout pittoresque, mais d’un examen des figurations mises en œuvre par l’humanité, là encore en fonction des « quatre régions de l’archipel ontologique » : totémisme, animisme, analogisme et naturalisme. Ainsi chaque groupe figure la condition humaine dans le monde qui l’entoure au moyen d’un vocabulaire plastique particulier révélant « l’ossature et le mobilier du monde ».

Etudiant l’image et ses fonctions, Philippe Descola explose la grammaire du visible tel que nous aurions dû la concevoir et rompt avec l’occidentalocentrisme. Au long d’un voyage en forme d’archipel, il parcourt les systèmes de pensée gouvernant la figuration sur la surface du globe, multipliant les chambres secrètes et les allusions à une théorie de l’art. Jusque-là notre Occident avait pensée l’art comme un travail de  représentation et d’imitation, soit la mimesis, l’artiste prenant place face à la nature. En revanche bien des sociétés exotiques ont de longtemps choisi, au service de leurs productions d’images, la fonction rituelle plutôt qu’esthétique ; au point, peut-on penser, que cette dernière n’ait aucune existence dans bien des sociétés.

À cet égard Philippe Descola reconnait sa dette envers l’anthropologue américain Alfred Gell, qui, en 1998, dans L’Art et ses agents[7], pensait les images non plus comme des représentations des objets du monde, mais comme « des agents autonomes » qui « interviennent dans la vie sociale et affective des humains », soit en tant que puissance d’agir. En ce sens, pour notre essayiste, qu’il s’agisse de masques, de peintures, voire de tatouages, d’armes et de mobiliers, non seulement l’œuvre signifie un rapport au monde, mais un pouvoir circulant de l’homme vers la nature, et vice-versa, de façon à intéragir et à concilier l’un avec l’autre.

Ainsi ce sont des « masque amazoniens, des effigies inuits en ivoire de morse ou des tambours sibériens pour l’animisme, des peintures aborigènes sur écorce et sur toile pour les « êtres du Rêve » du totémisme, des tableaux européens et des photographies pour le naturalisme et, dans le cas de l’analogisme, des assemblages de pièces provenant de sources hétérogènes, parfois dans une extrême profusion, soit une foule disparate de figurations en provenance d’Afrique, d’Asie, des Amériques, depuis les tableaux de fils colorés des Huichols du Mexique jusqu’aux rouleaux de paysages chinois en passant par des tabliers d’amulettes de Côte d’Ivoire. Une particularité du naturalisme étant « l’institution du sujet individuel », ce qui est exceptionnel au regard du reste du monde. Voici donc « une anthropologie comparative de la figuration », dont la preuve par l’exposition fut donnée au Musée du Quai Branly à Paris, en 2010-2011, sous le titre La Fabrique des images. Vision du monde et formes de la représentation [8]. Un examen des statuts de cette figuration qui est universelle, alors que l’art ne l’est pas.

Des pierres, comme les bétyles, sont des « présences divines », des montagnes sont des divinités chtoniennes. Non iconiques, elles sont pourtant l’expression d’une puissance. Ailleurs, idoles et icones s’opposent, la figuration est contraire à l’abstraction, ne participant de la même ontologie. Loin de l’idée selon laquelle la « figuration mimétique » (afin de rappeler les morts) serait l’origine de l’art, les codes figuratifs divers obéissent à des « cadres ontologiques ». Par exemple, au contraire de la perspective linéaire albertienne de la Renaissance, les Indiens de l’Amérique du Nord-ouest préfèrent la représentation au moyen de points de vues multiples par exemple sur le visage d’un ours, comme lorsque les cubistes ouvriront plusieurs profils.

L’on s’aperçoit alors que les modes de figuration véhiculent « outre le Dieu des monothéismes devenu Nature sur le tard, trois grandes classes d’invisibles, parfois mêlés, le plus souvent distribués dans des collectifs séparés : les esprits, les divinités et ce que l’on pourrait appeler les antécédents », soit les ancêtres. Sauf, pourrait-on ajouter, que l’Islam ne pratique pas la figuration, hors pour les Persans, lui préférant la calligraphie, souffle de la parole divine.

Nous parcourons en ce fort volume, passablement intimidant il faut l’avouer, une connaissance de l’homme qui résiste à un universalisme réducteur. C’est une somme encyclopédique, à la rencontre de l’anthropologie et de l’histoire de l’art, qui n’ignore pas des théoriciens comme Erwin Panofsky ou Hans Belting[9]. Si les passages théoriques manquent parfois de concision, l’analyse des ouvrages figuratifs jaillis de la main de l’homme rayonne en tant de directions que c’en est merveille. De la figuration tribale à la peinture surréaliste, d’un retable du « Couronnement de la Vierge » pullulant de personnages aux tailles hiérarchiquement ordonnées, en passant par une statue de maître zen, jusqu’aux « cosmogrammes mystiques » de Gonkar Gyatso représentant en 2009 une tête de Bouddha entourée d’un halo de singularités modernes (textes logos, photos, pictogrammes et personnages), l’œuvre rituelle et d’art gagne en cosmopolitisme et en dimensions spirituelles. Grâce à Philippe Descola, une révolution copernicienne multiplie les perspectives du musée universel.

Plus trivialement, si l’on consent à parler ainsi de l’engagement politique, « l’anthropologie a joué un rôle moteur dans la relance récente d’une exigence écologique plus radicale », confie Philippe Descola à qui veut l’entendre, parmi les pages de La Composition des mondes. Malgré tout le respect que nous pouvons professer à l’égard de notre anthropologue, d’ailleurs resté dans le sillage du marxisme, son tournant vers un écologisme[10] discutable nous laisse un brin dubitatif. Alors qu’il affirme dans La Composition des mondes qu’il « est faux de dire que l’homme est en soi une maladie pour la planète » (il se réfère au rapport à leur environnement des Achuars),  il est plus sévère envers la civilisation industrielle : « Nous sommes devenus des virus pour la planète », dit-il dans un entretien au journal Le Monde[11]. Certes des milieux naturels ont été détruits, mais de là à se changer en thuriféraire des prédictions apocalyptiques du GIEC il y a un pas à franchir.  L’on y découvre de surcroit que le capitalisme serait bien plus responsable de la pandémie de coronavirus que tout autre cause plus rationnelle, chasses ancestrales d’animaux sauvages ou fuite d’une manipulation virale d’un laboratoire chinois. Le voilà rêvant, avant d’imaginer l’imposer, d’un monde dans lequel l'on « ne sépare plus de manière radicale les humains et les non-humains ». Nous serons donc ravis de côtoyer vipères, tarentules et autres prédateurs dans un proche jardin d’Eden… Un tel irénisme est confondant. L’on aurait pu penser qu’un anthropologue rompu aux modes d’existence tribales dans les forêts amazoniennes soit au fait de la violence de la nature et de la faible espérance de vie de ses habitants, ce qu’il n’ignore pourtant pas. Le rousseauisme béat, qu’il récuse par ailleurs, s’érige en vérité d’autorité, alors qu’il n’est qu’un poncif politique démagogique aux mains de postmarxistes affamés de pouvoir totalitaire, ce qui est peut-être le cas de son ami le philosophe écopolitique Bruno Latour. En dépit de justes inquiétudes sur l’état de notre environnement, l’intelligence ne protège pas de l’idéologie devenue folle[12].

Si le projet de l’anthropologie est de « s’attaquer sur des bases scientifiques à la compréhension des grands principes régissant l’existence communes des humains », ses découvertes ne permettent pas de les unifier en un seul théorème. La clef unique qui ouvrirait la boite de Pandore de l’humanité n’ayant peut-être jamais été forgée par la nature. Reste qu’au voyage dans l’espace et dans le temps chez les Achuars raconté avec entrain, notre anthropologue sait ajouter une pensée classificatrice féconde qui éclaire d’une lumière nouvelle la pulsion figurative de l’humanité.

 

Thierry Guinhut

Une vie d'écriture et de photographie


[2] Philippe Descola (sous la direction de) : Claude Lévi-Strauss, un parcours dans le siècle, Odile Jacob, 2012.

[3] Philipe Descola : La Nature domestique. Symbolique et praxis dans l’écologie des Achuars, Editions de la Maison des sciences de l’homme, 2019.

[4] Philipe Descola : Les Lances du crépuscule, Terre humaine, Plon, 1993.

[5] Philipe Descola : Par-delà nature et culture, Gallimard, 2005.

[6] Philipe Descola : Par-delà nature et culture, Gallimard, 2005.

[7] Alfred Gell : L’Art et ses agents, Fabula, 2009.

[8] Philippe Descola : La Fabrique des images. Vision du monde et formes de la représentation, Somogy-Musée du Quai Branly, 2010.

[11] Le Monde, 20 mai 2020.

[12] Voir : Ravages de l'obscurantisme vert

 

Figurine Yoruba, Bénin-Nigéria.

Museum d'Histoire naturelle, La Rochelle, Charente-Maritime.

Photo : T. Guinhut.

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22 juin 2021 2 22 /06 /juin /2021 13:33

 

Zette Cazalas : Kunstschrank,  Cabinet de curiosité,

Musée d'Agesci, Niort, Deux-Sèvres.

Photo : T. Guinhut.

 

 

 

Inventer la nature :

des origines du monde à l’extinction des espèces

en passant par Anatomica.

 

 

Sous la direction de Laura Bossi :

Les Origines du monde. L’invention de la nature au XIX° siècle,

Gallimard Musée d’Orsay, 2020, 384 p, 45 €.

 

  Johanna Ebenstein :

Anatomica. L’art exquis et dérangeant de l’anatomie humaine,

Seuil, 2020, 272 p, 29 €.

 

Diego Vecchio : L’Extinction des espèces,

traduit de l’espagnol (Argentine) par Isabelle Gugnon,

Bernard Grasset, 2021, 224 p, 20 €.

 

 

Si la nature existe de manière immémoriale, et ce depuis la genèse et le Big bang, c’est au dix-neuvième siècle qu’elle fut inventée. C’est le pari surprenant de Laura Bossi et de ses collaborateurs, dans le cadre d’une exposition et d’un livre somptueux : Les Origines du monde. Aux nomenclatures et classements, s’ajoutent l’exposition et la représentation, en passant par les livres et les tableaux. Or représenter la nature à fin de connaissance, c’est aussi pratiquer la dissection pour cataloguer la nature humaine, soit celle du corps. C’est alors, grâce à l’album Anatomica, que l’on découvre qu’il s’agit autant de science que d’art. À ces ouvrages documentaires, il sera permis d’ajouter un roman de Diego Vecchio intitulé L’Extinction des espèces, histoire passablement fantaisiste d’un musée d’histoire naturelle du XIX° siècle, dont le titre, lui aussi en écho avec Charles Darwin qui révolutionna la discipline et jusqu'à la métaphysique, résonne comme un signal d’alarme, néanmoins parodique.

Non, la nature n’a pas attendu le XIX° siècle et son scientisme, son positivisme, pour inventer et inventorier la nature. L’Antiquité elle-même, avec les Animaux d’Aristote et la gigantesque Histoire naturelle (dont il ne nous reste qu’un millier de pages !) de Pline L’Ancien, n’a cessé de nommer et décrire les bêtes et les plantes. Les herbiers et descriptions zoologiques ont concouru de virtuosité lors de la Renaissance ; et le XVIII° siècle a vu le triomphe de l’Histoire naturelle de Buffon, des minéraux aux oiseaux.

Historienne des sciences, Laura Bossi, maîtresse d’œuvre des Origines du monde, n’ignore en rien ces prémices. En outre, avec le concours d’une trentaine de spécialistes, elle met l’accent avec justesse sur une furia de découvertes et de représentations qui fleurissent au XIX° siècle jusqu’à la borne de la Première guerre mondiale, non sans revenir en arrière, depuis un « Prologue au paradis terrestre ». Si « l’Histoire de l’art est le miroir des idées », il s’agit bien au XIX° du « siècle de la genèse de la modernité scientifique ». Ainsi en cette exposition du Musée d’Orsay (en partenariat avec le Museum national d’histoire naturelle) les œuvres d’art se font les alliées des scientifiques, mettant au jour la pléthorique diversité du monde et la multiplicité des espèces, tant végétales qu’animales. Minérales également avec la montée des connaissances géologiques, mais aussi concernant les fossiles, révélant des créatures disparues, dont les dinosaures. L’inimaginable antiquité de la terre se révèle. L’homme lui-même voit son historique bouleversée : préhistoriques, ils sont déjà des artistes. Mieux encore - ou pire pour les tenant d’une lecture littérale des sept jours de la Genèse -, les perspectives de Darwin placent cet homme parmi le flux patiemment orchestré de l’origine et de la succession des espèces.

L’on devine que les artistes sont également bouleversés par ces recherches, ces révélations. Tant du point de vue thématique qu’esthétique, leurs tableaux, gravures et sculptures bouillonnent de formes et de vies nouvellement aperçues. Ainsi ce somptueux livre catalogue balaie généreusement l’histoire de l’Art, non sans effleurer avec pertinence la littérature et la philosophie, jusqu’au cinéma, car le XIX° siècle peut être pensé comme s’achevant à l’orée de la Première Guerre mondiale.

Entre le paradis terrestre et L’Evolution des espèces, un immense chemin est défriché. « Déchu de sa transcendance », il n’en reste pas moins à l’homme la tâche confiée à Adam : nommer les créatures du jardin, ce qui restera le souci des scientifiques attachés au recensement du monde et à en comprendre le fonctionnement. Au-delà du désordre pittoresque du cabinet de curiosité baroque, le XIX° siècle va préférer la rigueur.

Neptune est découverte par Urbain Le Verrier, le vaccin contre la rage et la pasteurisation par Louis Pasteur, l’anatomie comparée par Georges Cuvier, la chimie organique par Wöhler et Liebig, mille et une innovations concourent au progrès. Mais aucune n’a autant de retentissement sur la métaphysique et la destinée humaine que celle de Darwin en 1859 : « Il est le pivot de son siècle ». Dieu n’est plus l’origine des espèces ni de nos comportements ; créatures, nous sommes le fruit du hasard et des adaptations aux contraintes de l’environnement. Voici ce qu’écrit des lois de la nature , en conclusion de son ouvrage fouillé, Charles Darwin: « Ces lois, prises dans le sens le plus large sont : la loi de croissance et de reproduction ; la loi d’hérédité qu’implique presque la loi de reproduction ; la loi de variabilité, résultant de l’action directe et indirecte des conditions d’existence, de l’usage et du défaut d’usage ; la loi de la multiplication des espèces en raison assez élevée pour amener la lutte pour l’existence, qui a pour conséquence la sélection naturelle, laquelle détermine la divergence des caractère, et l’extinction des formes moins perfectionnées. Le résultat direct de cette guerre de la nature, qui se traduit par la famine et la mort, est donc le fait le plus admirable que nous puissions concevoir, à savoir : la production d’animaux supérieurs[1] ». Ces derniers mots pourraient assurer une nouvelle espèce d’anti-darwiniens : les antispécistes[2]

 

 

Si le darwinisme a pu être caricaturé, y compris dans les journaux humoristiques contemporains, puis par la sociobiologie par exemple, il fut et est toujours combattu par des résistances et des pouvoirs religieux qui refusent l’ascendance simiesque et son enseignement en privilégiant le créationnisme. Ce qui ne l’empêcha pas d’inspirer les œuvres littéraires et peintes, tous les arts en fait. En ce sens, un peintre comme Gabriel von Max propose en 1894 le portrait d’un couple de « Pithecantropus alalus ».

L’ouvrage est balisé au moyen de moments clefs, incontournables. Ainsi « Le grand tour du rhinocéros Clara », morte à Londres en 1758, stupéfie les foules. Les expéditions australes embarquent des « artistes voyageurs », ce dont se fait l’écho le roman de Jules Verne, Vingt mille lieues sous les mers, qui, quoique science-fictionnel, peut passer pour « le premier traité d’océanographie ». L’invention des dinosaures et de l’homme préhistorique laissent leurs traces dans les romans de Rosny Ainé. L’on s’amusera à chercher la réponse à la question : « Pourquoi le paon est-il si beau ? ». Et voilà que ces multiples beautés de la nature sont contrecarrées par « la face sombre de l’évolution. Dégénérescence, régression et extinction »…

La peinture animalière et botanique est soudain prolifique, avec Audubon et Gould, le paysage est un acteur à part entière sous le pinceau de Turner et de Carus, l’on fantasme avec Böcklin et Moreau sur les hybrides homme-animal, comme les centaures et les sirènes. Quant au symbolisme et à l’Art nouveau, ils sont fascinés par l’origine de la vie, en goûtant les formes unicellulaires et les animaux marins, sur les toiles de Redon. C’est jusqu’au célèbre sexe féminin peint par Courbet en 1866, sous le titre L’origine du monde, que la nature est célébrée sous l’espèce de son origine sexuelle, voire animale et velue. Jusqu’encore à la peinture abstraite, de Kupka, voire de Kandinsky, qui tente de figurer les origines cosmiques et chimiques du monde…

Célébrée par Ernst Haeckel, philosophe naturaliste allemand de la seconde moitié du XIX° siècle, la nature est artiste. Elle a ses radiolaires, ses méduses et ses coraux, qui sont autant de géométries parfaites, de lumineuses beautés, qu’il a rendues avec une séduisante splendeur avec le concours d’un lithographe, Adolf Giltsch, dans le recueil de planches en couleurs Formes artistiques de la nature. Il n’en reste pas moins que cette beauté, qui semble l’axe du monde, trouve sa contradiction dans la sauvagerie naturelle, brutale ; sans compter une autre sauvagerie, celle de l’homme, qui, outre ses guerres mondiales et ses génocides, semble condamner la planète à assister impuissante à l’amaigrissement, voire l’extinction des espèces.

En conséquence, veillons à tout ce que la nature a d’extraordinaire, du gigantesque au microscopique, et qui fait bouillir la créativité scientifique et artistique : fleurs exotiques, bêtes curieuses, mais aussi ces primates, singes imprévisibles, austères et aimables, comme ceux de la magnifique couverture, qui nous regardent en ancêtres et en cousins, d’autant plus qu’ils s’appellent « Abélard et Héloïse »…

Interrogeons-nous avec Laura Bossi : « Face aux nouvelles utopies - un transhumanisme qui rêve de réaliser un surhomme à l’aide de la technologie, de la bio-ingénierie et de l’intelligence artificielle, ou un écologisme antihumaniste qui renierait la civilisation pour la défense d’une Nature idéalisée - c’est une sagesse qu’il nous faut appeler de nos vœux. Saurons-nous repenser notre relation à la nature, notre berceau ? Saurons-nous préserver sa diversité, et peut-être retrouver l’émerveillement que sa beauté a suscité auprès des artistes et des poètes du passé ? »

Non sans oublier les originaux généreusement exposés au Musée d’Orsay (mais aussi en nos musées de province), ouvrons sans cesse avec bonheur les pages somptueusement illustrées, nanties de commentaires rigoureux et diserts, de ce luxueux codex inventoriant Les Origines du monde avec un goût aussi savant qu’esthétique.

 

Linné : Abrégé du Système de la nature, Matheron & cie, 1802.

Charles Darwin :

L’Origine des espèces au moyen de la sélection naturelle, Reinwald, 1880.

Photo : T. Guinhut.

 

Amateurs de viande rouge et d’os à moelle, carnivores de l’image, vous voici confiés à un festin anatomique. Car nous sommes avant tout viande rouge et os blanc : ainsi va la nature, cette fois humaine, qui, de facto, a son corps. Au-delà de son apparence, il n’est qu’une anatomie. Si c’est lors de la Renaissance, au XVI° siècle, qu’en dépit de son interdiction par l’Eglise, la dissection devint possible, quoique les prémices de son illustration viennent du XIV°, c’est au XIX° que les progrès de l’investigation corporelle et de sa représentation furent les plus éblouissants. À moins d’être effrayé, par ces dévoilements de l’enveloppe charnelle ouverte sur ses obscènes organes, l’on ne peut qu’être impressionné par l’exactitude croissance des gravures et des tableaux consacrés à cette science, mais aussi par sa dimension esthétique, où domine, on l’aura deviné, le rouge.

Joanna Ebenstein a concocté pour nous une étonnante anthologie des illustrations révélant les parties et les fonctionnements de notre corps, intitulée laconiquement Anatomica. Cette chercheuses et commissaire d’exposition n’en est pas à son coup d’essai, puisqu’elle a publié un Traité illustré de la mort[3]. Cependant c’est ici, paradoxalement, d’un pont entre la vie et la mort dont il est question. Il a bien fallu ouvrir, dépiauter et dépecer des corps pour pouvoir réaliser ces images, alors qu’elles en révèlent les mystères, les organes, tous ceux qui nous permettent de bouger, de penser et de créer, d’enfanter. L’on ne s’étonnera pas qu’une partie de cet ouvrage encyclopédiquement documenté, soit consacré à la « procréation ». Ainsi les organes sexuels, la gestation de la femme enceinte, l’accouchement et le fœtus sont en quelque sorte à la source des autres parties de ce volume : « Le corps de pied en cap », « l’intérieur dévoilé », « Haut et bas du corps ».

Curiosité morbide et investigation scientifique sont au service de l’émerveillement devant la machine charnelle complexe que nous sommes autour de notre squelette, et en sa boite, si l’on pense au crâne abritant le cerveau. La contemplation peut prendre le pas sur la nomenclature, tant l’esthétique de ces gravures et peintures l’emporte sur ce que serait l’observation directe. Ce sont des médecins, mais aussi des dessinateurs, graveurs et peintres : de Vésale au XVI° siècle, avec son De humani corporis fabrica de 1543, à l’atlas de l’Anatomia Universa réalisé par Paolo Mascagni et publié entre 1823 et 1832.

Notons qu’au-delà de l’Europe, les Chinois ont longtemps œuvré en liant les parties du corps avec des représentations célestes imaginaires, comme dans Le Miroir d’or de la médecine, une compilation commandée par l’Empereur de Chine en 1742. Ne doutons pas qu’ils rattraperont bientôt le coche d’une science plus exacte.

Les artistes n’ont pas échappé à cet attrait pour nos viandes et viscères : Léonard de Vinci, Michel ou Raphaël disséquaient ; alors que Géricault se rendait à la morgue pour peindre des natures mortes anatomiques au service de son Radeau de la Méduse, à l’époque romantique. Quoique le corps ne soit plus guère envisagé comme le chef d’œuvre de Dieu, il peut être l’inspiration des chefs-d’œuvre, pas seulement consacrés à Vénus et Apollon, mais à notre condition anatomique, entre memento mori, nécessité médicale et chirurgicale, et émerveillement devant la nature et la main qui la magnifie.

Musée livresque, cet Anatomica met en scène la pulsion scopique autant que l’application scientifique et le soin esthétique. Même l’œil est l’objet de l’attention la plus fine, étrange bulbe cosmique dans une lithographie d’Ernst Friedrich Wenzel en 1874, alors que Bertillon, en 1893, publie un « Tableau des nuances de l’iris humain », de façon à contribuer à l’identification anthropométrique, en particulier des criminels.

Un roman cette fois, de Diego Vecchio (un Argentin né en 1969) intitulé L’Extinction des espèces, reprend ces questions muséales, mais de manière bien décalée. Grâce au legs de la fortune de Sir James Smithson (1765-1829) à l’Etat fédéral américain, Zacharias Spears est chargé de la conservation des espèces naturelles et de la constitution d’un musée. Par milliers, les spécimens affluent, en particulier à l’occasion de missions d’exploration, dont la plus célèbre aux Etats-Unis est celle de Lewis et Clark, entre 1804 et 1806, ce qui contribue à faire du Smithsonian Museum, où trône une météorite, l’un des plus prestigieux au monde.

D’abord consacré à cette transmission des collections et à la gestion financière préalable à la constitution d’un lieu digne de les accueillir, mettant en scène le personnage de Zacharias Spears, chirurgien vétéran de la guerre de Sécession, particulièrement zélé, le roman quitte un moment sa narration pour embrasser en quelques pages épiques l’histoire géologique depuis l’origine de la terre jusqu’à nos jours, au travers de millions d’années, et justifier son titre, L’Extinction des espèces. En effet de millénaires en millénaires, des espèces apparaissent, d’autres chassent les précédentes, en un jeu perpétuel entre les plus faibles et les prédateurs.

Ce qui aurait pu n’être qu’une chronique historique exacte et réaliste devient sous le clavier de Diego Vecchio, une parodie fantastique des discours scientifiques, une affabulation fantasque. Car la vision de la théorie de l’évolution de son personnage est pour le moins personnelle. Quelle est donc l’espèce qui aurait survécu à l’explosion d’une météorite, le crustacé muant en mammifère ? Mais l’écureuil pardi ! Et Américain qui plus est. En conséquence « la chauve-souris est un écureuil caché sous une cape qui n’a pas réussi à masquer ses problème de calvitie ».

 Ainsi entendu, l’homme, « animal le plus parfait », est le descendant de cet écureuil originel : « Homo sciurus ». Zacharias Spears, conservateur à l’éthique plus que discutable, n’hésite pas à falsifier les faits et les trouvailles, faisant passer deux récentes enfantines momies venues du canyon du Colorado pour des représentants de tribus les plus primitives. Voilà qui contribue au succès de l’entreprise, alors que les visiteurs éberlués affluent. Pour deux cents, le voyage parmi les côtes, les montagnes et les déserts, parmi le temps géologique, vaut l’investissement ! Il faut cependant lutter contre la concurrence de nouveaux musées, acquérir des fossiles hors de prix, des contrefaçons bientôt déjouées. C’est pourquoi Spears se voit destitué. Alors qu’en un ironique contrepoint la conservatrice d’un musée d’art se plaint du peu de crédit dont elle jouit par comparaison et de « la desquamation de la Vénus du Titien », faute d’entretien. La satire des faux savants, des conflits de préséance, de la vanité humaine et de l’enflure nationaliste est corrosive.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

L’extinction des espèces est également celle des directeurs de musées et de la valse des modes scientifiques. Zacharias Spears évincé, Benjamin Bloom le remplace, lui piqué par « le venin de l’ethnologie ». À leur tour, les Indiens sont des « fossiles vivants ». Le roman glisse vers l’exposé des mœurs des « Wakoas », y compris leurs pratiques sexuelles, de la langue des « Kiataw » ou des « Dixies », des croyances et des divinités premières. Une fois de plus la muséologie évolue pour se muer en itinéraires thématiques : « Scènes d’amour dans les marais », ou « Au fond des mers, les oubliés de l’Arche de Noé ». Ainsi les musées eux aussi participent à « la lutte pour l’existence ».

Une aphoristique définition ne manque pas de concourir à cet apologue parodique : « Les musées ont des tentacules qui s’allongent et se déploient sur des milliers de miles à la ronde pour atteindre de leurs ventouses un fétiche fabriqué à l’autre bout du monde, après quoi ils se contractent et se replient dans un parallélépipède de verre ». Pire, « il y aurait bientôt plus de musées que de visiteurs », jusqu’au « Musée pervers polymorphe à Ogden ». De surcroît l’on découvre, en ce qui devient peu à peu un essai au parcours en étoile, la taxonomie des visiteurs, qui ont un comportement de « fourmi » ou de « paon ».

En ce roman, il semble s’agir de la rencontre improbable de l’encyclopédisme vain des anti-héros de Flaubert, Bouvard et Pécuchet, et du fantastique cosmique de Jorge Luis Borges[4], sans oublier l’esprit fantaisiste d’un autre Argentin, Cesar Aira[5]

Rempart fragile face à l’extinction des espèces, le musée est l’honneur de l’humanité. À moins qu’elle soit la responsable et coupable d’un nouveau cycle d’extinctions. C’est à cet égard que devant la raréfaction de certains oiseaux et insectes de nos campagnes, voire la disparition annoncée des grands singes, des scientifiques parlent de sixième extinction[6], la seule qui ne soit plus d’origine naturelle, générant l’ère de l’anthropocène. L’ingéniosité humaine, plutôt que les diktats des écologistes politiques, parviendra-t-elle à inverser le processus ? Rien à cet égard ne devrait lui être impossible…

Thierry Guinhut

Une vie d'écriture et de photographie

 

[1] Charles Darwin : L’Origine des espèces au moyen de la sélection naturelle, Reinwald, 1880, p 576.

[3] Joanna Ebenstein : Macabre. Traité illustré de la mort, Cernunnos, 2018.

[6] Richard E. Leakey et Roger Lewin : La Sixième Extinction, évolution et catastrophes, Flammarion, 2011.

 

Charles d’Orbigny : Atlas du Dictionnaire d’Histoire naturelle,

Renard, Martinet & cie, Paris, 1849.

Photo : T. Guinhut.

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9 avril 2021 5 09 /04 /avril /2021 17:18

 

Saint-Jean de Montierneuf, Poitiers, Vienne.

Photo : T. Guinhut.

 

 

 

 

L’Eglise et l'Islam sont-ils contre la science ?

Entre Copernic, Giordano Bruno & Galilée.

Rémi Sentis, Jacques Arnould, Pietro Redondi

& Faouzia Charfi.

 

 

Rémi Sentis : Aux origines des sciences modernes.

L'Eglise est-elle contre la science ?

Cerf, 2020, 271 p, 22 €.

 

Jacques Arnould : Giordano Bruno. Un génie martyr de l’Inquisition,

Albin Michel, 2021, 176 p, 19,90 €.

 

Pietro Redondi : Galilée hérétique,

traduit de l’italien par Monique Aymard, Gallimard, 1985, 456 p, 30 €.

 

Faouzia Charfi : L’Islam et la science, Odile Jacob, 2021, 240 p, 22,90 €.

 

 

Résolument fourbe, réactionnaire et arcboutée sur ses convictions millénaires, assassinant volontiers tout hérétique et censurant tout discours scientifique hétérodoxe, telle apparait l’Eglise au préjugé commun et à l’instigation d’un XIX° siècle furieusement laïcard. Cependant il est justice de réviser ces entendus pour examiner le rapport de cette institution millénaire face aux sciences, même si en furent victimes des esprits forts comme Galilée et Giordano Bruno. Ainsi Rémi Sentis se penche sur les Origines des sciences modernes pour affirmer l’idée selon laquelle ces dernières sont bien nées dans un creuset chrétien. Jacques Arnould examine le cas du philosophe Giordano Bruno que ses audaces conceptuelles menèrent au bûcher, alors que Galilée, sous la plume de Pietro Redondi, permet de démonter la légende selon laquelle il n’aurait été qu’une victime de l’obscurantisme. L’arbre brulé Bruno et celui en procès de Galilée ne doivent pas cacher la forêt de l’intérêt de l’Eglise pour les avancées de la science. Alors que lisant l’essai de Faouzia Charfi, L’Islam et la science, l’on s’aperçoit que ce monothéisme est bien moins conciliant.

 

Résolument, un érudit plus que pertinent, Rémi Brague[1], soutient le projet de Rémi Sentis. Selon le philosophe, il s’agit rien moins que de souligner ici que la foi religieuse et la raison scientifique ne s’excluent pas : « loin d’être l’ennemi de la science, le christianisme en avait été l’origine, ou à tout le moins la condition de possibilité ». Même si c’est occulter l’Antiquité gréco-romaine, l’affaire est d’importance tant elle va à l’encontre d’une idée reçue. Car le dieu de la Genèse n’intime-t-il pas à Adam de nommer les créatures du jardin, en une démarche préscientifique…

Du XIV° au XVII° siècle, philosophes et scientifiques ne se distinguent guère, ils adhèrent à la « philosophia naturalis », comme le rappelle Rémi Sentis, en son Aux origines des sciences modernes, sous-titré L’Eglise est-elle contre la science ? De fait une langue commune, le latin, et la diffusion des imprimés les rapprochent dans toute l’Europe. Savants et autorités ecclésiales ont la même formation et appartiennent aux deux milieux, comme De Cues, Copernic, Mersenne, Gassendi. Mathématique et astronomie stimulent tous les esprits. Avec Paracelse et Vésale, tous ont « la conviction que la raison insufflée en l’homme par Dieu-Créateur peut accéder à la connaissance des lois qui régissent le monde créé ». De plus la théologie platonicienne et le néoplatonisme de Marsile Ficin offrent une correspondance entre l’harmonie des cieux et celle des nombres et de la géométrie. Ce dernier postulant déjà « le Soleil au milieu des planètes », dans sa Théologie Platonicienne de l’immortalité des âmes[2].

C’est grâce à la création des universités, au XIII° siècle, que naissent les ferments de la science moderne, alors que le monde arabe et la Chine, engoncés dans l’Islam pour l’un et dans le confucianisme pour l’autre n’en auront pas de longtemps l’équivalent. À Paris, Bologne, Oxford d’abord, puis en Italie, en France, en Allrmagne, l’effervescence universitaire a l’aval de la papauté. Les lois de la nature étant ordonnées par Dieu, le monde créé étant rationnel, il est du devoir de l’homme de les inventorier en assimilant la pensée grecque. Physique aristotélicienne et dogme chrétien se confrontent. Jusqu’à ce que, du XIV° et XV° siècle, la première doive céder le terrain aux observations astronomiques, via Nicolas de Cues (l’auteur de La Docte ignorance), Regiomontanus (champion de la trigonométrie et constructeur d’un observatoire astronomique). Sans omettre la théorie de l’impetus qui vise à expliquer les mouvements des corps physiques ; donc le mouvement infini et uniforme des astres.

Le XVI° siècle est quant lui celui d’une révolution scientifique, celle Des révolutions des orbes célestes[3] », ouvrage publié en 1543, donc de l’héliocentrisme de Copernic, qui ne suscite guère d’opposition du clergé catholique (sauf lors de l’affaire Galilée, mais aussi de Protestants virulents comme Melanchthon), tant la cosmographie de Ptolémée devenait complexe et inopérante, en terme de calendrier et de description du mouvement des planètes. Le système de Copernic se diffuse rapidement dans le monde des lettrés et des universités. Au-delà de l’alchimie qui rêvait de transmutation du plomb en or et de pierre philosophale, celle-ci effectue peu à peu sa transmutation en chimie avec Paracelse, mort en 1541. Le médecin est l’un des premiers à utiliser le laudanum contre les douleurs, travaille en grand connaisseur de la métallurgie et des alliages. Le chirurgien Vésale (mort en 1564) fait de ses dissections le lit de l’anatomie, alors que « contrairement à une légende répandue l’Eglise n’a jamais prohibé la pratique de la dissection » ; l’ère du Grec Galien était définitivement révolue. Si ces trois sommités, Copernic, Paracelse et Vésale, travaillent « à contre-courant », ils sont hommes de foi tant leur conviction de travailler de concert avec Dieu ne pouvait contrecarrer une Eglise attentive.

 

 

« L’apogée » du début du XVII siècle est celui de Galilée (1564-1642) et de Kepler (1571-1630). Avec eux, la mécanique et l’optique volent au secours de l’astronomie. La « stella nova » de 1604 frappe les esprits, et contredit l’immutabilité aristotélicienne du monde supra-lunaire. Galilée améliore une lunette grâce à laquelle une multitude des étoiles de la voie lactée est enfin observable.

Les améliorations techniques, en particulier le lien entre la balistique et l’artillerie, et les connaissances s’articulent, ne seraient ce que grâce aux mathématiques, d’ailleurs enseignées par les Jésuites qui, notons-le, étaient favorables à Kepler. Bientôt, la méthode expérimentale, initiée par Galilée, permettra un bond qualitatif surprenant. L’amélioration des instruments d’optique, dont les télescopes, permettent à ce dernier et à Kepler de décrire l’univers, alors que Kepler s’appuie sur Tycho Brahé qui émet l’hypothèse de la carrière elliptique des astres.

Les succès de Galilée, sur les taches solaires par exemple, lui valent l’admiration du pape Urbain VIII, mais aussi des jalousies, celles des Dominicains de Florence qui s’insurgent contre sa thèse selon laquelle « dans le domaine des phénomènes physiques, l’Ecriture sainte n’a pas de juridiction », l’accusant d’hérésie. En faisant la leçon aux Dominicains, partisans du géocentrisme, sur la concordance de l’Ecriture avec le système de Copernic, il s’attire leurs foudres. Au point qu’Urbain VIII se sente floué. A l’issue d’un procès disputé, Galilée, soumis à la résidence surveillée, doit se rétracter. Il faut admettre que souvent polémique et sarcastique il manquait de prudence et de souplesse. L’on obtient en 1616 une mise à l’index du De Revolutionibus de Copernic, bientôt réfutée en 1741, alors que Galilée est réhabilité pot mortem en 1737.

À partir de la culture de l’héliocentrisme de Copernic, « Galilée pourra unifier la mécanique terrestre et l’astronomie, dans laquelle Kepler pourra découvrir les lois empiriques sur les mouvements elliptiques des planètes [qui] permettront ensuite de formuler la loi de l’attraction universelle », qui sera l’œuvre de Newton en 1687.

Jusqu’en 1666, année de la création à Paris de l’Académie Royale des Sciences - et là s’arrête la fresque de notre historien - ce sont les voix de Descartes, Gassendi, Pascal, Boyle, van Helmont, souvent formés par les Jésuites, partisans de l’infini de l’univers, qui dominent la pensée, sans oublier Marin Mersenne, « plaque tournante de la correspondance scientifique » qui fit publier Galilée à Leyde, et dénie toute valeur à l’astrologie contraire au libre arbitre ; il écrivit de surcroit un monumental traité sur la musique : l’Harmonie universelle, paru en 1636. Peu à peu, il semble que l’atomisme devienne de moins en moins hérétique, en particulier grâce à Gassendi, partisan d’une « science des phénomènes » et par ailleurs chanoine. Pascal, Huygens et Fermat sont les fondateurs du calcul des probabilités moderne, quand van Helmont se détache de la théorie des quatre éléments d’Aristote pour fonder la chimie moderne.

Tous instaurent un dialogue fécond avec l’Eglise : « Nous ne suivrons pas la ligne prédominante de l’historiographie française actuelle, selon laquelle les sciences modernes trouvent leur origine dans un empirisme foncièrement séculier qui est hostile a priori à toute idée de vérité révélée », ainsi argue Rémi Senris. De facto, la foi en un Créateur qui soit la source de la nature est « un des facteurs fondamentaux de l’éclosion des sciences modernes ».

La progression de l’argumentation de Rémi Sentis est rigoureuse. Toujours basée sur les faits, sur une bibliographie généreuse, sa pensée claire et documentée avec soin progresse par étapes, par chapitres bien balisés.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Mais, nous direz-vous, cet irénisme affiché entre la science et l’Eglise achoppe sur les cas de Giordano Bruno auquel Rémi Sentis fait à peine allusion, et de Galilée, bien plus célèbre.

Kepler qualifiait de « théories effrayantes », les allégations de Giordano Bruno selon lequel l’univers est infini et recèle une pluralité de mondes habités. Ce n’était pas seulement ce point qui heurtait l’église, mais son atomisme, et pire encore l’idée selon laquelle l’homme est au centre de l’univers et par conséquent que Dieu n’avait pu intervenir pour le placer au sommet de la Création. Il s’agit moins d’une controverse scientifique que métaphysique.

Brûlé sur le bûcher, Giordano Bruno (1548-1600) n’eut pas droit à l’indulgence qui affligea Galilée en 1633. L’on était plus regardant à l’encontre d’un provocateur qui fulminait en proclamant la liberté de pensée, tant religieuse que scientifique. Car non seulement il soutenait l’héliocentrisme de Copernic, mais il affirmait en son Banquet des cendres que Dieu avait créé un univers infini, sans centre de surcroit : « la masse de l’univers est infinie et il est vain de chercher le centre ou la circonférence du monde universel ». Mais aussi « les mondes sont autant d’animaux dotés d’intelligence[4] ». Et, pire encore, il prétendait invalider la Sainte Trinité, l’incarnation de Dieu en Christ, la virginité de Marie, jusqu’à la damnation éternelle. C’en était trop, l’Inquisition ne pouvait rater ce boutefeu, pourtant dominicain, qui eut l’inconséquence de jeter de l’huile sur son bûcher…

Reste qu’au-delà de la figure hautement sulfureuse de l’hérétique, un véritable philosophe déploie une œuvre considérable. Jacques Arnould, à la fois astrophysicien et ancien moine dominicain déplie en sa biographie la personnalité et les œuvres incendiaires de celui que l’on surnomma « Le Nolain », du nom de la ville de son enfance, près du volcan l’Etna, dans un livre alerte où le biographe s’identifie avec son modèle : Giordano Bruno. Un génie martyr de l’Inquisition. Il ne prétend pas à la posture de l’érudition, quoique précisément documenté, mais à celle qui accompagne une vie, une pensée, en croyant bienveillant autant qu’en scientifique qui écrivit des essais tels que Sous le voile du cosmos. Quand les scientifiques parlent de Dieu[5]. Aussi offre-t-il « un fraternel requiem » à l’auteur du sacrilège Banquet des cendres.

Trois étapes marquent la carrière de Giordano Bruno : il est d’abord le religieux napolitain studieux, ensuite le philosophe révolutionnaire, enfin le prisonnier de l’Inquisition qui défend en vain sa pensée jusqu’au bûcher romain, soit « l’homme blanc », puis « noir, enfin « nu ». Fort brillant, doté d’une mémoire époustouflante, ordonné prêtre, nommé lecteur de théologie, il se fit remarquer en maintenant que les hérétiques puissent être savants. Jeté dehors par son couvent, il erre de ville en bibliothèque, pour lire Erasme, traiter le Christ d’imposteur, se défroque, se fait un temps Protestant, donne des conférences de cosmologie à Toulouse, éblouit Henri III à Paris avec sa « science mnémotechnique », se fait espion à Londres, réfute la métaphysique aristotélicienne, devient professeur d’université à Wittenberg, goûte la mythologie et l’ésotérisme, revient à Venise pensant y trouver asile et réaliser sa réforme spirituelle et morale. Ce fut une erreur stratégique. Dénoncé par son hôte et chargé par lui des pires griefs, il est cueilli par l’Inquisition, écroué dans la prison du Saint-Office à Rome. Huit ans de geôle et de procès ne le guérirent pas de son intransigeance. L’on condamna plus le moine apostat que son œuvre philosophique ; ce avec le concours du même cardinal Bellarmin qui œuvra plus tard contre Galilée. Tout un roman abordé sans grandiloquence par Jacques Arnould qui ne contente pas de l’anecdote, car il s’agit là « d’un philosophe libre », qui se dit « académicien de nulle académie ».

Ses poèmes et dialogues philosophiques brillants et haut perchés comme De la cause, du principe et de l’un, son texte coruscant sur la magie[6], sa comédie satirique Le Chandelier, l’éloge de l’amour et de la connaissance en ses Fureurs héroïques, font de Giordano Bruno un astre étonnant, une constellation à lui seul, qui ne manquait de s’adresser des hommages dithyrambiques, car il a « outrepassé les limites du monde », ne consentant en rien à « entraver notre raison dans les sphères de cristal de l’antique cosmologie ». À la veille du bûcher, celui qui prétendait dans La Cabale du cheval pégaséen[7] que ce sont « les sots de ce monde qui ont fondé la religion », ne déclara-t-il pas qu’il « n’avait pas lieu de se repentir » ? C’est ce qui s’appelle, mourir pour ses convictions. En la matière, les juges n’ont respecté ni le « Tu ne tueras point » des dix commandements, ni le pardon christique. C’est avec humanité que Jacques Arnould conclue en le comparant à Moïse : « Puisse frère Giordano, cet homme de cendres et d’étoile, avoir connu la même grâce et être mort, selon son plus vif désir en embrassant l’infini, en embrassant son Dieu », quoiqu’il ne soit pas certain qu’il en eût un.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La lecture de l’essai profus de Pietro Redondi, Galilée hérétique, corrobore les dires de Rémi Sentis. La fameuse formule, « Et pourtant, elle tourne ! », soit autour du soleil, contribua pour beaucoup à la légende édifiante : l’Inquisition dominicaine fut aussi perfide qu’ignorante. De là à l’assimiler à toute l’Eglise, il y a une marge immense et condamnable. D’autant que, quoique tardivement, Jean Paul II réhabilita solennellement le héraut de l’héliocentrisme copernicien. En fait le reproche réel portait sur l’atomisme. Car venu d’Epicure et de La Nature des choses de Lucrèce, récemment redécouvert[8], ce concept fleurait un brin l’athéisme, puisque Lucrèce envisageait les dieux comme des êtres lointains ne se préoccupant guère de l’humanité, d’autant que le concept paraissait contraire à la transsubstantiation eucharistique. Urbain VIII le fit taquiner sur l’héliocentrisme en détournant les flèches de l’Inquisition, pour le sauver, en dépit de son côté irascible et trop piquant. Basé sur des recherches pointilleuses, jusqu’à de rares manuscrits, l’essai de Pietro Redondi déplie les rouages d’une controverse entre le tribunal du Saint-Office et les bibliothèques des savants, des lettrés de son temps. L’on louvoie entre informateurs et « malices exégétiques », entre « police théologique » et « défenses académiques », loin de tout simplisme manichéen. Le procès de Galilée fut surtout une « affaire de propagande », de façon à laisser accroire que l’Eglise ne se délitait pas et savait marquer son autorité, même de façon passablement inoffensive. Défendant une « culture fondée sur la controverse », notre essayiste fait œuvre pie. Après tout, même le plus sceptique peut imaginer que Dieu soit atomiste…

 

Il sera bien plus difficile, voire mission impossible, d’affirmer que l’Islam et la science vont la main dans la main. La physicienne tunisienne Faouzia Charfi déplore que depuis la fin du XI° siècle la science soit assujettie à la religion au point de se voir effacée. Aussi plaide-t-elle pour la séparation de ces frères ennemis et le développement scientifique dans les pays arabes.

Il y a bien eu, à l’aube de l’Islam, une floraison scientifique. Autour de Bagdad, fondée en 762 par le calife Al-Mansour, ce dernier engage une ardente politique de traductions, depuis des textes grecs, indiens et persans, ce dans le cadre de la tradition zoroastrienne. Médecine, mathématiques, astronomie bénéficient de cette embellie. Ainsi Avicenne est un Persan réputé qui rédige Le Canon de la médecine, Ibn al-Haytham révolutionne l’optique en montrant que c’est l’œil qui reçoit la lumière et non le contraire, Biruni réconcilie l’astronomie de Ptolémée avec celle des savants indiens, le mathématicien Al-Khwarizmi est l’inventeur de l’algèbre (al-jabr)… De plus, mais au XIV° siècle, Ibn Khaldûn « est le premier à proposer une théorie de l’histoire d’ambition universelle ». Cette ardeur scientifique médiévale se propage ensuite au Caire, puis dans diverses parties du monde arabe, dont l’al-Andalus. Cependant si cette science est arabe, elle n’est en rien islamique.

Hélas, si le monde arabe, et Bagdad principalement, a bénéficié de l’intérêt pour les sciences rationnelles manifesté par la dynastie Abbasside entre le VIII° et le XI° siècle et celle chiite des Bouyides, c’est avec les Seldjoukides que l’islam sunnite a repris le dessus, signant l’irrémédiable déclin de la pensée scientifique. Les madrasas se développent au dépend des « dar al-ilm » ou « maisons de la science ». Le courant mutazilite, plus rationnaliste, est balayé. Seule la médecine dans les hôpitaux garde son utilité ; l’astronomie dans les mosquées a droit de cité, mais presque uniquement pour établir les heures des prières, même si Ibn al-Shatir propose au XIV° un nouveau modèle d’orbites planétaires, ce dont aurait profité Copernic. Hélas, « les sciences du naql (tradition) l’emportent sur les sciences du aql, c’est  à dire de la raison, et le fiqh est érigé en science souveraine », soit les obligations religieuses et juridiques. Al-Ghazali refuse la causalité, préférant un atomisme venu de Dieu omnipotent. Quand à Averroès, auquel Faouzia Charfi accorde trop de crédit, il est moins un rationaliste épris de science qu’un défenseur d’une raison qui pourrait comprendre Dieu. En conséquence le débat occidental du XVI° siècle sur l’héliocentrisme n’a pas lieu en terre d’Islam. Outre qu’il faille attendre le XVIII° siècle pour que l’imprimerie fasse une timide apparition en Turquie, le questionnement sur l’évolution des espèces de Darwin à la fin du XIX° siècle se résume à quelques réactions horrifiées. Les tentatives pour absorber les sciences occidentales et laisser de côté l’emprise du Coran, comme pour accorder la liberté à la femme, marginales, quoique courageuses, restent le plus souvent lettre morte.

S’appuyant que une documentation étendue, la thèse de Faouzia Charfi est d’une parfaite clarté qui confine à l’évidence : les « sciences islamiques » sont celles religieuses, quand les sciences rationnelles dans quelques contrées arabes n’ont bénéficié que d’une brève, quoique féconde, parenthèse. De plus elle dénonce une évolution désastreuse : le régime d’Erdogan, en Turquie, et bien d’autres pays arabes se réfèrent au Coran qui serait le fondement de toute science, suppriment l’enseignement de la théorie de l’évolution de Darwin, voire l’héliocentrisme. Au point que l’on aime prétendre que toute science, toute technologie, se trouverait dans les versets coraniques en surinterprétant de modestes métaphores poétiques, théorie qui a la faveur des jeunes générations, abreuvés par le prosélytisme obscurantiste sur les sites religieux et les réseaux sociaux.

C’est à un « constat d’échec » qu’aboutit Faouzia Charfi en son livre intelligent et vigoureux. Aujourd’hui le monde arabe traduit chaque année l’équivalent d’un cinquième des titres traduits par la Grèce. Et parmi eux bien peu sont réellement scientifiques. Notre essayiste aimerait revivifier la recherche scientifique en terre d’Islam : « Ce programme ne concerne pas que les musulmans. Il constitue un apport précieux pour nourrir la laïcité et faire face à l’obscurantisme », conclut-elle.

 

L’on a beau jeu de dénoncer l’intolérance scientifique de l’Eglise, bien moins souvent avérée qu’imaginée, quoique Galilée et Giordano Bruno en eussent trop souffert, quoique la théorie de l’évolution de Darwin ne fut avalisée par la papauté qu’à l’occasion de la seconde moitié du XX° siècle. Et bien des Chrétiens évangélistes affichent une croyance créationniste, voire platiste.  Mais outre que d’autres religions se sont montrées bien plus continument obscurantistes et théocratiquement intolérantes, il y a peu dans l’Histoire de pouvoirs politiques qui fassent preuve à cet égard de pur modèle. Il suffit de songer à d’autres églises, celles du communisme, du nazisme, voire de l’écologisme contemporain en ses excommunications idéologiques, pour constater que, selon l’adage populaire, la poêle se moque du chaudron.

 

Thierry Guinhut

Une vie d'écriture et de photographie


[2] Marcile Ficin : Théologie Platonicienne de l’immortalité des âmes, Les Belles lettres, 1970, t III, p 191.

[3] Nicolas Copernic : Des Révolutions des orbes célestes, Les Belle lettres, 2015.

[4] Giordano Bruno : Le Banquet des cendres, 2017, L’Eclat, p 29.

[5] Jacques Arnould : Sous le voile du cosmos. Quand les scientifiques parlent de Dieu, Albin Michel, 2015.

[6] Giordano Bruno : De la magie, Allia, 2020.

[7] Giordano Bruno : Œuvres complètes VI, Les Belles lettres, 1994, p 34.

[8] Voir : Le Pogge, découvreur de Lucrèce : facéties et autres satires morales et humanistes

 

Musée Bernard d'Agesci, Niort, Deux-Sèvres. Photo : T. Guinhut.

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30 janvier 2021 6 30 /01 /janvier /2021 16:16

 

Dreiherrenspitze / Pico dei Tre Signori,

Prettau / Predoi, Südtirol / Trentino Alto-Adige.

Photo : T. Guinhut.

 

 

 

Mensonge écologiste et agonie scientifique

par Jean de Kervasdoué :

Ils ont perdu la raison.

Ils croient que la nature est bonne.

Les Ecolos nous mentent !

 

 

Jean de Kervasdoué : Ils ont perdu la raison, Robert Laffont, 2014, 240 p, 19 €.

Jean de Kervasdoué : Ils croient que la nature est bonne, Robert Laffont, 2016, 180 p, 17 €.

Jean de Kervasdoué : Les Ecolos nous mentent, Albin Michel, 2021, 208 p, 18,90 €.

 

 

 

Disparition totale des glaciers en 2030 ! Voilà ce qu’annonçaient Al Gore et le Groupe d'Experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat en l’an 2006 ; mais aussi la montée d’un mètre des océans pour les cinq années suivantes ! C’est à peine si une hausse d'un peu plus de deux millimètres a été enregistrée depuis, alors que les glaciers, certes bien érodés depuis 1850, sont toujours là. Un réchauffement climatique surévalué, alors que la terre n’a gagné qu’un degré et demi depuis la fin du XVIII° siècle, faussement attribué aux activités humaines, conflue avec une grande peur jetée sur la planète[1]. Pourtant, on l’oublie trop facilement, la nature, niaisement divinisée, et chantée pour les fruits de son jardin, alors qu’elle est aussi faite de champignons insipides ou vénéneux, de virus et métaux lourds salement polluants, n’est vraiment bonne pour l’humanité que tempérée par la science. À cet égard, c’est à un implacable réquisitoire contre la doxa verte, contre la gauche et la droite, la société française toute entière et bien au-delà, que se livre Jean de Kervasdoué. Non pour des raisons partisanes ou strictement idéologiques, mais au nom de la science : que ce soit dans Ils ont perdu la raison, ou dans Ils croient que la nature est bonne, il fustige l’écologisme. Cet ingénieur de renom, « écologue » soucieux de dépollution et de santé, et non « écologiste », prend en effet à rebrousse-poil nos préjugés pour les invalider : diesel, nucléaire, pesticides, OGM, gaz de schiste… Tous sont réhabilités au nom de la science et de la raison, et en contradiction avec tous les sophismes écologistes et autres obscurantismes français. Car l’Etat, ses notables, ses tribuns, ses fonctionnaires et ses électeurs, sont dramatiquement opposés à la science. Tous, autant qu’ils sont, Les Ecolos nous mentent, pour reprendre le titre pugnace de Jean de Kervasdoué, qui a de la suite dans les idées.

 

Pourtant venu de la famille de la gauche, Jean de Kervasdoué ne peut que s’en désolidariser. Car elle a abandonné le champ du libre progrès pour celui de la décroissance imposée. Notre perte de compétitivité, notre croissance atone, notre chômage le disent assez. Que l’on se rassure, la droite n’est pas en reste. Sarkozy n’avouait-il pas la raison de son interdiction des Organismes Génétiquement Modifiés : « Parce que les Français croient que c’est dangereux, même si je suis persuadé du contraire ». C’est ainsi que nos politiques trop aisément clientélistes n’écoutent plus que les sirènes de la peur et des écologistes, avec le tragique avenir que l’on devine devant de telles créatures, aux dépens du raisonnement scientifique.

Depuis trente ans qu’ils existent, les Organismes Génétiquement Modifiés, interdits en notre cher hexagone, n’ont tué personne, nourrissent de mieux en mieux les hommes et notre bétail, permettent aux diabétiques de bénéficier d’une meilleure insuline, de sauver des milliers de vie grâce au « riz doré » qui adjoint la « provitamine A » au service d’enfants, autrement aveugles. Sans compter des cotons qui font mieux vivre bien des paysans indiens, des maïs qui réclament 50% d’eau en moins ou de réduire les épandages phytosanitaires. De plus, « la très grande majorité (15 millions) des utilisateurs d’OGM est constituée de paysans à faibles ressources, vivant dans les pays en voie de développement », qui sans eux d’ailleurs n’auraient aucune ressource. Il sera bientôt amusant de constater que les recherches de Monsanto (pour beaucoup le grand Satan américain, certes créateur de l’Agent orange de triste mémoire au Vietnam) s’attachent à rechercher une « technologie qui interviendrait sur l’ARN du varroa et tuerait ce parasite » qui contribue grandement à la surmortalité des abeilles…

Plus anecdotique en apparence, mais dramatique, la polémique française autour du diesel falsifie les chiffres d’une mortalité par cancer du poumon prioritairement due au tabac. D’autant que seuls quelques vieux véhicules sont concernés. Le tour de prestidigitateur n’est là que pour tenter de relever le niveau des taxes, comme si elles n’étaient pas assez confiscatoires.

Quant aux pesticides, si décriés, n’oublie-t-on pas leurs bienfaits ? Leur innocuité contribue à l’excellente espérance de vie des agriculteurs (s’ils prennent garde aux conditions de l’épandage et au respect des dosages), nous nourrit en abondance, voire permettent d’éliminer des toxines naturelles, ce que ne propose pas l’alimentation bio, dont les bénéfices comparés pour la santé humaine sont nuls.

Qu’il s’agisse de notre santé, lorsque l’on veut proscrire des médicaments alors que leurs bénéfices sont bien supérieurs à leurs rares inconvénients, ou le bisphénol A en oubliant combien il contribue à éradiquer le botulisme ; qu’il s’agisse de la gestion de l’énergie lorsque l’on chasse un piètre carbone pour lutter contre un réchauffement climatique à peine avéré et probablement indemne de causes anthropiques ; le principe de précaution paralyse nos esprits autant que notre économie. Car nos meilleurs chercheurs trouvent au-delà de nos frontières des laboratoires accueillants pour mener la construction d’un avenir meilleur : cellule-souches, au service des thérapeutiques de demain, technologies post-nucléaires, OGM bienfaisants… Nous nous abêtissons, en sus de nous appauvrir.

Notre essayiste n’accorde qu’un trop bref passage au gaz de schiste, chez nous interdit. Il nous rappelle pourtant à propos que le gaz de Lacq, exploité par la fracturation hydraulique pendant des décennies, a fait une part de notre fortune, sans le moindre inconvénient environnemental. Pensons alors que le coût de l’énergie a considérablement baissé aux Etats-Unis, au moyen de ce même gaz de schiste, entraînant croissance, emploi et relocalisation d’entreprises. Que le dieu de la peur écologique nous épargne de telles catastrophes !

La rhétorique de la peur atteint son acmé au sujet du nucléaire. Trois morts au plus à Fukushima, 80 à Tchernobyl, des cancers peu nombreux et surtout supputés, alors que la région vidée de ses habitants se peuple d’une faune pléthorique. Certes, Jean de Kervasdoué omet de signaler que le problème de cette centrale nucléaire, comme à Fukushima, n’est pas résolu. Mais il rapporte un fait peu connu : la catastrophe nucléaire de Maïak, dans l’Oural, en 1957, qui tua sur le coup 200 personnes et exposa 500 000 autres aux rayonnements. Or une étude de 1992 n’y conclut qu’à une différence « pas significative » des cas de leucémie. Il est évident qu’il ne s’agit pas de baisser les bras devant les recherches, la sécurité, les projets d’avenir, grâce auxquels le nucléaire (y compris au moyen du thorium hélas occulté) diminuera ses déchets, saura démanteler les vieilles centrales, et bouleverser nos technologies. Car au-delà du trop néfaste principe de précaution, des inventions à peine pensables aujourd’hui sauront nous surprendre. Bien mieux que nos monstres étatiques qui subventionnent à tort et à travers les éoliennes et le photovoltaïque au dépend du consommateur…

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Pourquoi nos gouvernements prennent-ils « les mauvaises décisions » ? Parce qu’ils ne sont ni des chefs d’entreprises, ni des scientifiques. Parce qu’ils sont des « sophistes » dont l’inculture scientifique est flagrante, dont le seul but est de surfer sur les peurs, d’aller dans le sens de l’obscurantisme et d’une nostalgie d’un passé mythique empreint de santé naturelle qui n’a jamais été, pour racler les voix des électeurs. Quoique ces derniers commencent à se détourner de ces urnes contre-productrices…

C’est ainsi qu’en ces trop brefs essais vulgarisateurs Jean de Kervasdoué déplie sa thèse : « L’Etat n’est plus légitime. Il ne croit plus en la raison, car la seule raison des politiques est devenue la défense de leur raison d’être : l’exercice du pouvoir. Aucun principe, fût-il scientifique, ne règle la vie politique, seules comptent les opinions. » L’ère de la dictature d’opinion, des orateurs du sophisme, a remplacé l’examen rationnel et scientifique. L’idéologie et la pensée magique négligent la réalité, pourtant irréfutable. Quand « les croyances prennent le pas sur les connaissances », marxisme anticapitaliste et anti-libéral, mais aussi écologisme, deviennent, à l’égal du principe de précaution, des doxas « quasi-religieuses », « une forme de paganisme » rétrograde. Cette « religion écologiste, anticapitaliste et rousseauiste, habillée d’agronomie partisane » est celle d’ « un de ses grands prophètes » : Pierre Rabhi, l’auteur, par exemple d’Ecologie et spiritualité[2] au titre révélateur et risible…

Les mantras religieusement assénés sont nombreux. Par exemple le réchauffement climatique (qui stagne depuis vingt ans) dû à des causes anthropiques ; alors que les variations du climat ne cessent de marquer les ères géologiques et historiques, que des scientifiques conspués pour être de dangereux et inconscients « climato-sceptiques » lisent dans l’évolution des taches du soleil un possible refroidissement climatique. Ou la montée du niveau marin, qui n’est que d’1,3 millimètre par an, soit « 30 centimètres depuis 1711 » : rien d’affligeant. Alors que les cancers sont surtout dus au tabac, à l’alcool, à la génétique, au hasard, on les attribue faussement aux pesticides, dont les doses sont infinitésimales. Un mensonge répété mille fois devient une vérité…

Non seulement bien des mesures dites progressistes sont infondées scientifiquement, mais sont économiquement et socialement désastreuses : « inventer des normes nouvelles en matière de bisphénol ou de glyphosate accroît le chômage et nuit à la santé bien plus sûrement que l’éventuelle maîtrise d’effets toxiques supposés ». Ainsi, interdites de recherches, surtaxées, et punies, l’agriculture et l’industrie agro-alimentaire françaises perdent des emplois, obligeant de surcroît le consommateur à acheter à l’étranger : « La France s’interdit toujours de jouir des bienfaits des Plantes Génétiquement Modifiées (PGM). Elles peuvent pourtant offrir une résistance très efficace aux ravageurs et diminuer considérablement l’épandage de pesticides », ce sans « aucun problème sanitaire ou environnemental signalé ».

Notre temps glisse dans la fosse de l’obscurantisme : « Disqualifier les experts, cultiver le soupçon, nourrir la théorie du complot, remettre en cause l’universalité de la science, telles sont les recettes efficaces de ces idéologues ». De surcroît il faut être stupéfait devant « une incompréhensible tolérance des tribunaux pour la violence des écologistes », détruisant des serres confinées au service d’une étude sur « la résistance du riz aux insectes », ou autour de « la résistance d’un cépage OGM à une maladie fréquente de la vigne, le court-noué ».

Pire encore, s’il se peut, lorsque notre essayiste cite un article du Monde, dans lequel Foucard et Larousserie profèrent sans rire l’énormité suivante : « Les ambigüités de l’Académie des Sciences sur le climat sont le révélateur de son décalage avec la société[3] ». Ainsi la vox populi aurait-elle plus de raison que de réels scientifiques, Galilée n’aurait plus qu’à se rhabiller devant les foules de l’ochlocratie[4] qui jurent que la terre plate est au centre du monde solaire !

Reste à glisser une interrogation : Jean de Kervasdoué, emporté par son enthousiasme polémique, n’aurait-il pas tendance à occulter une réelle préoccupation, celle d’aliments parfaitement sains et d’une nature propre au service de l’humanité ? Pas le moins du monde ! Dans Ils croient que la nature est bonne, il ne nie pas un instant qu’il faille se prémunir contre les pollutions indésirables, montrant que le progrès scientifiques des pays développés contribuent à un meilleur environnement, au contraire des pays du Sud dont le retard de développement et les structures politiques sont encore en devenir.

L’on ne reprochera rien à la clarté ni à la rigueur de Jean de Kervasdoué. Sauf que ces deux essais glissent sur la même lancée, se répétant parfois un peu. Sauf qu’il aurait certainement fallu consacrer un chapitre entier à Monsanto, ce diable absolu des bonnes âmes vertes, pour tenter d’y voir plus clair, départager le vrai du faux, les méfaits, les scandales sanitaires et les bienfaits du monstre qui ne l’est probablement pas toujours. Ce pourquoi il conclut opportunément en militant en faveur de l’éducation scientifique et de la patience de la lecture.

Ces polémiques essais, malgré des développements que l’on aurait parfois attendus plus conséquents, malgré l’emploi du verbe « convaincre » au lieu de celui de « persuader » (car le sophiste politique ne convainc pas, puisqu’il néglige les faits, la raison, la science) ne sera guère entendu. Hélas, seul un flop visqueux dans le marécage de la cécité idéologique l’accueillera. Alors qu’il devrait être lu et débattu dans nos lycées, dans notre Assemblée Nationale, au plus haut de l’inculte Etat. Sans imaginer un instant que la confusion du débat démocratique et le règne obscurantiste de l’opinion relativiste puissent croire faire la nique à la science et aux réalités. Si avec Jean de Kervasdoué l’on veut être ne serait-ce que l’ombre d’un scientifique, d’un philosophe, sans cesse il faut remettre en cause les préjugés et la doxa. Il n’est d’ailleurs pas interdit, avec les moyens de l’argumentation et de la connaissance, d’appliquer le même traitement à l’essayiste lui-même…

L’on aurait grand tort de prendre le dernier essai de Jean de Kervasdoué, Les Ecolos nous mentent, pour un pamphlet à deux sous, un amuse badaud, destiné à être brièvement décrié, passé sous silence enfin. Non, l’auteur n’est pas un complotiste[5], encore moins un négationniste, mais un scientifique rigoureux, à l'affut du véritable état des lieux de la planète.

Il y a bien assez de soucis causés par les pollutions, qui ont d’ailleurs baissé de 19% depuis dix ans, et les surconsommations, telle la surpêche qui ratisse les océans au mépris des espèces (ce que notre essayiste dénonce avec vigueur) pour ne pas s’embarrasser des fausses nouvelles (fake news dirait le paresseux anglicisme) véhiculées à pleines brouettes par les écolos, tels que l’apocope familière les nomme. Non la France ne manquera pas d’eau et le bétail, donc la viande, n’en consomme pas puisqu’il la rend à la terre ; non la pollution atmosphérique ne provoque pas 48 000 morts par an ; non la viande rouge n’est pas cancérigène ; non les Organismes Génétiquement Modifiés ne sont pas dangereux, bien au contraire tant ils protègent de la cécité des enfants grâce au riz doré, tant ils protègent les plantes agricoles sans recours à des pesticides, qui ne le sont guère plus, tant les doses sont infinitésimales, comme ce glyphosate qui disparait si vite que l’on peut ressemer deux semaines après son application. Non le bio n’est pas plus sain que les autres fruits, céréales et légumes, que l’on paie de plus en plus cher tant les normes rendent notre agriculture infirme et dépassée par les capacités productives des pays voisins.

Quant aux forêts, hors certaines zones amazoniennes et indonésiennes, elles ne diminuent pas, en particulier en France ; la biodiversité, menacée par endroits, se porte bien ailleurs et se portera encore mieux, grâce aux progrès scientifiques si l’on ne les freine pas. Les abeilles ne disparaissent pas autant que l’on veut nous le faire croire, de plus la culpabilité des pesticides est loin d’être avérée, même si, peut-on ajouter, les monocultures ne leur rendent pas service. Le nucléaire n’a pas tué à Fukushima (ou trois morts comme dit plus haut ?), le tsunami si ; or l’on a fermé Fessenheim encore parfaitement valide, pour y substituer des centrales à charbon et le désinvestissement en faveur de nouvelles centrales nucléaires plus performantes et dévoreuse de déchets, que l’on peut par ailleurs confier en toute sécurité aux enfouissements de Bure, désinvestissement qui est en train de devenir alarmant en frisant la pénurie. Flagrant est le cas du diésel, dont la part (en encore pour les vieux moteurs) est « infime » concernant les cancers du poumon, infiniment plus causés par le tabac, et non par l’exposition aux particules fines, dont les taux d’alarme sont infinitésimalement bas. Et pourtant l’on pense à interdire les véhicules diésel ; voire ceux à moteurs à essence, en faveur des électriques, dont les batteries peu recyclables usent à l’envie de terres rares ! Il faut alors penser à ces éoliennes peu productives, intermittentes, fragiles, à peine recyclables, enrochées sur des milliers de tonnes de béton, et payées au moyen de surfacturations de l’électricité…

Tout cela n’est pas billevesées de l’auteur, mais convictions s’appuyant sur des exemples, des preuves, qui jalonnent l’ouvrage, assurant le procès de la « pensée magique »  et l’assise scientifique du raisonnement et des faits.

Si Jean de Kervasdoué semble parfois se répéter d’ouvrage en ouvrage, ce serait un reproche oiseux à lui faire, tant il nécessaire de réaffirmer les vérités des investigations scientifiques. Il a cependant le mérite de creuser en tous sens son argumentation, de l’enrichir de nouveaux exemples. Car « la méthode expérimentale » le guide, et non les « diabolisations » et la « pensée magique » de la « biodynamie » ou de la « médecine anthroposophique ».

La liste des errements officiels des écologistes est assez effarante, sans qu’il y ait besoin d’ajouter deux cerises pourries sur l’immonde gâteau.

Un, la Justice elle-même n’en est plus une qui soit judicieuse, car au mépris de la science, « les tribunaux s’immisçant dans les querelles scientifiques », elle entérine les allégations des écologistes, sur la nocivité des ondes, quand l’on se plaint de divers troubles alors que l’antenne n’est pas branchée, ou sur le glyphosate.

Deux, « plusieurs éditeurs ont refusé d’envisager la publication de cet ouvrage, considérant que critiquer la bien-pensance écologique dominante, fût-elle infondée, était inenvisageable. Un retour aux années 1950, où l’intelligentsia trouvait qu’il était inconvenant de critiquer le communisme et l’Union Soviétique ! » Est-ce à dire que les précédents éditeurs de Jean de Kervasdoué, soit Gallimard, Robert Laffont, Plon, Fayard, Lattès, Odile Jacob ont failli ? Il faut alors être reconnaissant à Albin Michel de savoir résister au conformisme antiscientifique comminatoire. L’on se moque des détracteurs de Galilée, lui défendant l’héliocentrisme de Copernic, et du Pape qui le fit enfermer, quoiqu’avec clémence. Pourtant l’on constate que Justice et censure éditoriale sont la main dans la main pour accréditer la fausse science verte, mâtinée d’idéologie, de superstition et de tyrannique régression, maîtresse en fustigations au moyen de la peur. Il en ressort que « la nouvelle religion, l’écologisme, excommunie les mal-pensants » !

 

Devant de tels délires écologistes, à l’instar du principe de précaution et du concept de « justice climatique », les tyrans du passé se soulèvent de leurs tombes : « Comment n’y avais-je pas pensé ? » disent-ils. Rançonner par les taxes et l’impôt, contraindre par des normes et totalitariser en toute vertu écologiste le peuple et la planète, quelle belle idée ! Drogués au pouvoir et experts en manipulation, les écologistes parviennent à réaliser le rêve du tyran absolu : assoir son appauvrissante tyrannie sur le consentement de l’opinion.  Aussi c’est bien pertinemment que notre essayiste scientifique cite Hannah Arendt : « La liberté d’opinion est une farce si l’information sur les faits n’est pas garantie et si ce ne sont pas les faits eux-mêmes qui font l’objet du débat[6] ».

 

Thierry Guinhut

Une vie d'écriture et de photographie

 

[2] Pierre Rabhi : Ecologie et spiritualité, Albin Michel, 2006.

[3] Le Monde, 30 novembre 2015.

[4] Ochlocratie : gouvernement par la foule.

[6] Hannah Arendt : La Crise de la culture, Gallimard, 1988, p 103.

 

Section scientifique, Musée Bernard d'Agesci, Niort, Deux-Sèvres.

Photo : T. Guinhut.

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22 janvier 2020 3 22 /01 /janvier /2020 14:32

 

Ratsberg, Toblach / Dobbiaco, Südtirol / Trentino Alto-Adige.

Photo : T. Guinhut.

 

 

 

 

 

De l’Histoire du climat à l’idéologie écologiste :

 

Emmanuel Le Roy Ladurie,

 

Marie-Antoinette Mélières / Chloé Maréchal,

 

Bruno Durieux.

 

 

 

 

 

Emmanuel Le Roy Ladurie : Histoire du climat depuis l’an mil,

Champs Flammarion, 552 p en 2 tomes, 18 €.

 

Marie-Antoinette Mélières, Chloé Maréchal :

Climats. Passé, présent, futur, Belin, 432 p, 38 €.

 

Bruno Durieux : Contre l’écologisme. Pour une croissance au service de l’environnement,

Editions de Fallois, 266 p, 18,50 €.

 

 

 

 

      À quoi servirait une pensée qui hurlerait avec les moutons et bêlerait avec les loups ? Ce serait parler comme la doxa, engager comme la propagande. Aussi faut-il remettre en question les dogmes, heurter les points de vue, confronter les analyses, en particulier s’il s’agit d’une des principales préoccupations de notre temps, comme celle  du réchauffement climatique. En fait, et au risque de se précipiter sous le couperet infamant du climatosceptique honni, le scepticisme est un devoir intellectuel, politique, voire scientifique. S’il serait aberrant d’être sceptique face à la rotondité de la terre, à l’héliocentrisme, à l’efficacité des vaccins, qui sont des faits avérés, il en est tout autrement pour le réchauffement climatique d’origine humaine, que le présent confirme si peu, alors que le futur n’a aucune qualité à confirmer une telle théorie. Là s’affrontent l’Histoire du climat, les observations scientifiques d’une part et d’autre part un avenir que l’on dit si menacé. Or la prédictologie[1] a bien de la peine à être une science, c’est le moins que l’on puisse dire, alors que l’Histoire est une science humaine, elle-même faillible, partiale et révisable. Les Romains ouvraient le ventre des poulets ou voyaient venir les oiseaux de la gauche sinistre ou de la droite propice pour lire l’avenir ; aujourd’hui le GIEG dessine des courbes en crosse de hockey pour prédire de sinistres et brûlants climats à l’horizon du siècle. Cependant il est à craindre que les thèses du réchauffisme anthropique sentent le réchauffé, si l’on lit l’Histoire du climat d’Emmanuel Le Roy Ladurie et malgré la somme intitulée Climats. Passé, présent, futur, car le sceptique réquisitoire de Bruno Durieux, Contre l’écologisme, est particulièrement rafraichissant.

 

      Nous savons que l’empire romain bénéficia d’un climat chaud et humide. En revanche l’effondrement des températures du IV° au VI° siècle contribua grandement (après les barbares et avant les épidémies de peste) à l’implosion de la civilisation romaine ; l’étude des glaciers et des cernes des arbres a permis de confirmer ce que suggéraient les historiens du temps[2]. Paru en 1983, l’essai éblouissant d’Emmanuel Le Roy Ladurie montre sans équivoque les hauts et les bas climatiques depuis l’an mil. L’Historien n’ignore pas le petit âge glaciaire modéré de – 900 à – 400, puis celui plus sévère de l’aube du Moyen Âge, alors qu’entre 900 et 1300 l’optimum médiéval fut favorable à la civilisation. Mais au XIV° siècle, un nouveau petit âge glaciaire racornit les récoltes jusqu’à la famine. La Renaissance est un peu plus clémente, quand le siècle de Louis XIV est glacial. Il faut attendre le XIX° pour trouver une embellie : les glaciers européens ont atteint leur plus grande ampleur jusqu’en 1860, date à laquelle ils commencent à refluer : l’on sait qu’aujourd’hui ils sont résiduels dans les Pyrénées.

      Emmanuel Le Roy Ladurie use de sources nombreuses, documentant avec abondance et minutie la contraction des glaciers alpestres, de Chamonix à Grindelwald, entre le XVII° et la fin du XX° siècle. Il s’intéresse aux dates des floraisons et des vendanges, aux premières neiges, aux fleuves gelés (la Loire jusqu’à Nantes au XVII° siècle), aux rendements des céréales, aux inondations et aux sécheresses, évidemment aux températures ; mais aussi à la dendrochronologie (l’étude des cercles des arbres) ou à la palynologie (des pollens conservés dans les tourbières). Ces événements et éléments seraient anecdotiques s’ils n’étaient ici considérés dans le cadre d’une période longue, car n’oublions pas que des époques fraîches peuvent avoir été frappées de canicules, comme des périodes plus douces peuvent avoir subi des froidures sévères.

      Aussi Emmanuel Le Roy Ladurie peut-il conclure : « Il n’est de bonne histoire du climat qu’interdisciplinaire et comparative ». La démarche historienne a fait bien des émules, comme Emmanuel Garnier, avec Les dérangements du temps. 500 ans de chaud et de froid en Europe[3]. Reste que l’histoire climatique ne devient une histoire humaine, que si ce dernier en bénéficie ou en est affecté, voire s’il en devient un agent. L’influence des fluctuations climatiques sur la survenue, le développement et le déclin des civilisations est-elle si déterminante ? Surtout si l’on pense au petit âge glaciaire qui affecta le crépuscule de l’empire romain, et que l’on sache qu’il faille l’accoupler avec les invasions guerrières des barbares et les épidémies de peste. Les migrations des Mongols sont en partie dues aux froids qui terrassèrent leurs pâturages, quand l’expansion islamique du V° siècle bénéficia de fraicheurs qui au contraire nourrirent les chevaux…

      Il n’est cependant pas inutile de noter qu’Emmanuel Le Roy Ladurie est persuadé des causes humaines dans notre réchauffement, ce en quoi il se trouve fort en phase avec les thèses du Groupement Intergouvernemental d’Etudes Climatiques.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

      La démarche scientifique semble assurée par une plus récente somme : Climats. Passé, présent, futur. Même si le préfacier plus que partisan Nicolas Hulot peut laisser craindre un parti-pris climato-réchauffiste d’origine humaine et industrielle, ouvrons ce volume avec pondération. Deux docteures en physique et en géochimie en sont les auteures : Marie-Antoinette Mélières et Chloé Maréchal, ce en corrélation avec le GIEC.

      Depuis 2,6 millions d’années, l’on assistait à la « valse des glaciations » ; mais aussi, il y 12000 ans, à la période chaude de l’holocène, ce dont témoignait un « Sahara vert ». L’on retrouve des observations sur les glaciers, comme celui d’Aletsch, dans les Alpes suisses, avec des photographies de 1856 (son maximum) et de 2011, où il est écourté, quoique le graphique révèle qu’il fut plus court encore à l’époque romaine. La partie historique de l’ouvrage est une précieuse mine d’informations ; celle afférente au XXI° siècle, donc au futur, doit rester sujette à caution.

      Pour nos deux scientifiques, la thèse est entendue : le réchauffement récent « résulte pour l’essentiel des gaz à effet de serre d’origine anthropique. La contribution la plus importante est celle du CO2, due majoritairement à l’utilisation intensive des combustibles fossiles, dont la moitié s’accumule chaque année dans l’atmosphère. » Aussi la température actuelle rejoint celles des périodes chaudes du Moyen Âge et de l’époque romaine. La conclusion se veut catastrophiste, effondriste, apocalyptique : « si les émissions actuelles continuent sur leur lancée, le réchauffement par rapport à l’époque préindustrielle atteindra 4° et 7° ».

      L’ouvrage est généreux en analyses, en cartes, graphiques et photographies. Sa dimension pédagogique est nette, à la faveur d’une langue accessible, même si la conclusion et quatrième de couverture, en cela plus dignes de propagandistes que de scientifiques, fait frémir : « Cette évolution [la faculté de l’homme à modifier son comportement] se fera en fonction de la capacité des scientifiques et des enseignants à expliquer les enjeux, et de la mobilisation de la société mondiale, avec toutes ses composantes (citoyens, politiques, artistes, etc.) ».

      Cependant la prédiction est une science fort hasardeuse, comme s’il s’agissait de connaître la direction du chaos. Ainsi nos deux auteurs prétendent : « La principale inconnue dans l’évolution du climat et de l’environnement est la faculté de l’homme à modifier son comportement ». Ah, naïfs que nous sommes, il nous semblait que la première inconnue était l’évolution future du climat !

      Et si « la température globale de surface » augmente de 0,15 degré par décennie (entre 1979 et 2010) selon Forster et Rahmstorf, ce rapporté par nos auteures, il faudra bien des siècles pour attendre la température de cuisson… Soit environ 1,5 degré depuis un siècle et demi… C’est au contraire une suée que s’évertue à suggérer Climats. Passé, présent, futur, dont les cartes et graphiques usent et abusent de rouges incendiaires, lorsque la température annuelle atteint les 30 degrés dans les zones équatoriales, alors qu’autour de 0 degrés nous sommes dans de doucereux verts, la persuasion jouant un rôle plus que discutable.

 

 

      L’on prétend qu’un consensus de 90% des scientifiques se montre en faveur de la thèse du réchauffement climatique d’origine anthropique. Cependant, outre que la démocratie majoritaire n’a aucune valeur scientifique, ils sont une trentaine de milliers à apparaître sur une liste de climato-sceptiques raisonnés qui compte des prix Nobel, des lauréats, auteurs d’articles majeurs, que l’on découvrira sur le site de Wikklibéral[4], liste d’ailleurs fort documentée.

      La Climate intelligence foundation (Clintel) a lancé une campagne pour dénoncer l’objectif européen d’atteindre zéro émission nette de CO2 d’ici 2050. Dans son courrier de 43 pages à l’ONU, ce sont 500 scientifiques et professionnels à travers 13 pays - dont des Français - qui arguent qu’« Il n’y a pas d’urgence  climatique ». Montrant que l’impact du CO2 sur l’environnement est surévalué, ils prétendent que les mesures prises pour faire décroître les émissions sont fort coûteuses et dangereuses pour l’économie.

      Evidemment l’on ne s’est pas fait faute de pointer que certains de ces scientifiques écrivent dans le journal Valeurs actuelles, étiqueté à droite, ou sur le site libéral Contrepoints, histoire de frôler la reductio ad hitlerum, dont Christian Gérondeau, auteur de L’Air est pur à Paris mais personne ne le sait[5], et Bruno Durieux ci-dessous. Cependant c’est peut-être confondre cause et conséquence : c’est parce qu’ils ne peuvent publier leurs analyses chez les giecquistes qu’ils sont accueillis ailleurs.

      La fameuse courbe en forme de crosse de hockey, publiée en 1988 par Michaël Mann, montrant que les températures allaient irrémédiablement monter en flèche dès les prochaines décennies, et sur laquelle s’appuie la doxa du GIEC, vient de subir un revers de bâton. Son inventeur a été poursuivi en justice par un climatologue fort sceptique, Tim Ball, qui le traitait de charlatan, en montrant que le XV° siècle avait été plus chaud que notre aujourd’hui. Las, sommé de dévoiler ses preuves devant la Cour suprême de Colombie britannique, et de contrer les travaux du sceptique, Michael Mann a refusé de montrer ses données et ses chiffres ; ce pourquoi le tribunal l’a condamné à une amende qu’il a préféré payer. De plus il risque aujourd’hui un procès criminel pour avoir usé de fonds publics pour commettre et propager une fraude avérée.

      Les changements climatiques historiques, actuels, voire futurs, sont dus au soleil et aux mouvements de la Terre sur son orbite, voire aux champs magnétiques. À peine aux activités humaines, à la réserve de l’urbanisation. Depuis que l’on peut observer les taches solaires, soit au début du XVII° siècle, l’on peut corréler le Petit Âge Glaciaire à la faible activité du soleil, soit le minimum de Maunder (1645-1715), dont rend compte d’ailleurs Emmanuel Le Roy Ladurie. Et puisque nous sommes entrés dans une telle faiblesse solaire, des scientifiques, dont la mathématicienne astronome Valentina Zharkova, affirment qu’un nouveau et cyclique refroidissement nous attend, ce que confirmeraient les récents hivers longs et rigoureux d’Amérique du Nord, au point que le retard des semis et récoltes ait entraîné une hausse du cours des céréales à la bourse de Chicago. Ce qui montre, s’il en était besoin, qu’un refroidissement climatique est plus dangereux pour l’humanité que ces réchauffements dont nous nous sentons aussi bien que les Romains ou les Médiévaux du XII° siècle…

     Selon Benjamin Deniston, chef de l'équipe de recherche scientifique de l’américaine LPAC, il n’y a pas de corrélation entre la quantité de CO2 et les changements de température ; ou plus exactement ces derniers entraînant l’accroissement du premier. Ce fameux gaz carbonique n’est guère un gaz à effet de serre, au contraire de la vapeur d’eau. De plus l’on s’échine à monter l’évidence : il ne sera un polluant qu’à force d’atteindre des concentrations inimaginables, alors qu’il compte pour au plus 0,4 % de notre atmosphère, donc 5% d’origine humaine. D’autant qu’il contribue très nettement à la végétation, à la reforestation, donc au verdissement de la planète, avéré depuis des décennies. Depuis le XIX° siècle, lorsque Maxwell l’a montré, les physiciens savent que le CO 2, qui n’est en rien un polluant[6], n’a guère de rôle dans le climat, sinon aucun. Le GIEC s’est lui basé sur le travail d’Arrhenius, également au XIX° siècle, aussitôt désavoué, mais tellement porteur pour établir les taxes carbone et profiter des subsides, ce que montre Christian Gérondeau[7] dans son essai Le CO2 est bon pour la planète[8].

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

      Ainsi, maints scientifiques de renom contestent l’alarmisme climatique : ils s’appellent Richard Lindzen, climatologue, membre de l’Académie américaine des sciences, Mike Hulme de l’université d’East Anglia, John Christy, spécialiste des mesures de températures par satellite. Le réchauffement d’au plus 1,5° depuis le début du XIX° siècle, n’a rien d’exceptionnel dans l’Histoire climatique.

      Or puisque la Chine, l’Inde, à un moindre degré les Etats-Unis, sans compter Brésil, Russie, Afrique, sont les premiers producteurs de ce gaz carbonique et de bien d’autres gaz, particules fines et autres souffre et plomb (car ce deux premiers pays n’utilisent ni essence sans plomb, ni pots catalytiques) autrement polluants, à quoi servirait de cesser en France toute émission, toute respiration, toute vie, sinon de suicider son économie en supprimant une part infinitésimale d’activité carbonée et polluante de l’humanité… Le prétendu exemple de de transition écologique, à coup d’étatisme, de surfiscalité, de subventions tortueuses, est aussi risible qu’antiscientifique, alors que l’avenir est promis aux technologies innovantes, à inventer et en cours d’invention, pour recycler les plastiques en pétrole par exemple, découvrir de nouvelles énergies, d’autant qu’il s’agit là d’un anticapitalisme envieux et forcené masqué sous la prétention d’une pureté morale exterminatrice, comme le soutient un collectif appelé « Extinction, Rébellion », qui prétend sur ces affichettes que « conduire une voiture c’est être un Nazi » !

      Un record de chaleur fait la une des cris des médias, ceux de froid sont ignorés. Depuis trois ans, ce sont trois hivers inhabituellement rigoureux qui s’abattent sur l’Amérique du nord, ainsi que le rapporte la NASA ; les glaciers reprenant leur expansion, voire naissant, comme dans l’Alberta. Quant à l’Antarctique, il ne cesse de gonfler, hors la zone où son glacier est assis sur un volcan. Le Groenland n’a pas fondu comme un glaçon dans un verre estival ; il reprend même du poil de la bête.

      Tout est prétexte à accuser le réchauffement climatique. En témoigne le traitement de l’émotion causée par les incendies en Australie et suscitée par la mort de tant de koalas (qu’importe celle des hommes…). Si un été chaud et sec n’arrange pas les choses, sachons qu’environ 90 % de ces feux sont délibérément ou accidentellement d’origine humaine, au point que l’on doive arrêter des dizaines d’incendiaires dans tout le pays, y compris des Musulmans, pratiquant le jihad incendiaire, dont les frères Zraika près de Sidney, comme le rapporte le Daily Mail. Une fois de plus la persuasion fondée sur l’émotion, les sentiments, prétend l’emporter sur la conviction, soit l’argumentation rationnelle et multicausale. De même que n’a-t-on entendu à propos de l’aqua alta vénitienne, certes une catastrophique inondation, alors que l’on ne parle pas des aqua bassa, que les marégraphes de l’Adriatique n’enregistrent aucune montée des océans (hors quelques centimètres depuis un siècle et demi), que la ville a tendance à s’enfoncer sous son propre poids dans sa lagune.

 

Pic et glacier du Marboré, Gavarnie, Hautes-Pyrénées.

Photo : T. Guinhut.

 

 

      S’il est permis d’en rire, souvenons-nous du catastrophisme écologique trompeté par l’ancien vice-président des Etats-Unis, Al Gore, auteur du film Une Vérité qui dérange, sorti en 2006, qui prétendait que l'humanité est assise sur une bombe à retardement. Les prophéties apocalyptiques déversées à la pelle sont toutes démenties aujourd’hui par le réel. La hausse annoncée du niveau de la mer ne l’a pas empêché d’acheter un manoir en bord de mer ! Le nombre de tornades, d’ouragans, qui devait imparablement augmenter est en déclin depuis des décennies. Le nouvel âge glaciaire européen attend toujours, l’assèchement du sud du Sahara voit au contraire la végétation gagner (en grznde partie grâce au CO2). La fonte des glaces arctiques voit au contraire une recongélation depuis des années, quand la population des ours polaires croît. Et la température planétaire reste passablement égale depuis deux décennies. L’urgence planétaire à l’horizon d’une décennie, bien que sans cesse démentie, réclame à cor et à cris des mesures draconiennes pour réduire les gaz dits à effet de serre, plus exactement pour assoir le pouvoir planétaire de tyrans dont l’écologisme est la pompe à finances publiques et privées. Ainsi The Gardian annonçait pendant l’an 2004 : «  En 2020, des villes majeures d'Europe seront envahies par l'océan, l'Angleterre s'abimera dans un climat sibérien, des conflits nucléaires se déchaîneront dans un monde ravagé par la sécheresse, des émeutes et la famine » ! D’autres prévoyaient un océan arctique totalement délivré de glace en 2015, la disparition de la neige européenne, Manhattan submergée, et caetera…

      Le même Al Gore déclara devant un congrès de la Geophysical Union à San Francisco, en 2008 : « Vous avez le devoir de réduire au silence ceux qui s'opposent aux avis du GIEC » ; bel attentat à l'égard de la liberté d'expression, de la recherche scientifique ; et in fine profession de foi tyrannique, sinon totalitaire, bien caractérisque de trop de Démocrates américains. Ce Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat, ouvert à tous les pays membres de l’ONU,  regroupant 195 États, dont de prétendus affligés climatiques, comme l’archipel polynésien Tuvalu, qui ne sont toujours pas recouvertes par les eaux. D’une part ces atolls coralliens ont tendance à s’affaisser, d’autre part au contraire l’apport des sédiments marins compense largement cet effet. Ne l’oublions pas, le GIEC est une association de gouvernements, pas de scientifiques.

      Alors que la NASA claironne que 2019 fut la seconde année la plus chaude que jamais, suite à 2016, d’autres sons de cloche montrent que cette même année fut plus froide aux Etats-Unis que 2005… Plus précisément, la NASA et la National Oceanic and Atmospheric Administration affirment que l’année 2019 a été plus chaude de 0,98 degré Celsius que la moyenne des températures entre 1951 à 1980. Ce qui reste, avons-le, modeste, surtout si l’on pense que les années cinquante furent plutôt fraiches. En fait, nous l’avons vu, depuis deux siècles, la température mondiale n’a guère gagné qu’1,5 degré.

      D’autant qu’il faut s’interroger sur la pertinence des relevés de température, en basse troposphère par satellite, alors qu’auparavant ils se faisaient à hauteur d’homme. Sur la multiplication exponentielle des stations météorologiques, y compris en ville, dans les aéroports, toutes zones plus chaudes. Certes il s’agit là d’une influence humaine, mais, l’on considère faussement des stations comme rurales et non urbaines, En 1880, seulement 174 stations permettaient d’établir la température moyenne, soit presque rien dans les océans, les régions polaires, donc 80 % de la surface planétaire. Avec une couverture bien plus abondante aujourd’hui, la comparaison doit être soumise à caution, décrédibilisant la notion de température globale au fil du temps. De plus, entre le thermomètre traditionnel, alcool et mercure, et les sondes électroniques, le changement des outils de mesures et des méthodes (les horaires de prélèvements par exemple, aujourd’hui en continu) rend suspecte l’évolution des températures mondiales, sans compter de subreptices modifications, comme les peintures et les tailles des cabinets météo, qui pourraient causer des écarts de quelques dixièmes de degrés. Autre problème de fiabilité, les relevés satellites, dont les données sont publiées par deux organismes, RSS (de la société privée Remote Sensing Systems) et UAH (une université américaine, située à Huntsville), ne sont pas toujours parfaitement les mêmes.

      Au contraire de ce que l’on aime afficher péremptoirement, le nombre de morts dus aux catastrophes climatiques (sécheresses, inondations, tempêtes) est dix fois moindre qu’il y a un siècle[9], quoique la population mondiale ait quadruplé. Et, selon la courbe environnementale de Kuznets, « lorsqu’un pays accède au développement économique, son environnement naturel se dégrade dans la phase initiale, puis se stabilise quand son revenu s’élève, enfin se restaure lorsqu’il atteint la prospérité », pour citer Bruno Durieux.

      Voilà un scientifique - et économiste - qui devra être affublé de la casquette infamante du climatosceptique par les tenants bien en cour du réchauffisme anthropique. L’on devine à ce genre d’exclusion, d’excommunication, que la doxa climatique se donne tous les atours d’une intolérante religion, comme s’il fallait à tous prix masquer les défauts de la cuirasse et colmater la chasuble de la certitude autoritaire. À raison, Bruno Durieux oppose l’écologie, qui est une science, à l’écologisme, qui est une idéologie. Son essai est polémique à souhait : Contre l’écologisme. Pour une croissance au service de l’environnement. À la réserve qu’il n’en perd jamais le sens des réalités, et ce dès son avant-propos : « L’homme ne vit que des ressources de la nature. Que celles-ci viennent à se dégrader, s’épuiser, disparaitre, et c’est sa santé, son existence qui sont en jeu ».

      Or l’écologisme est une force politique montante, émergeant dans le milieu hippie et la gauche américaine des années soixante-dix, qui à l’anticapitalisme hérité du rousseauisme et du marxisme, ajoute un « biocentrisme qui pose que toutes les vies se valent », cette foi anti-anthropocentriste et radicalement opposé à ce judéo-christianisme qui vit Dieu confier la nature à la gouvernance de l’homme. La chute du communisme, quoique loin d’être comprise comme ce qu’elle fut, un aveu d’échec de la doctrine[10], fut un accélérateur des opposants au capitalisme libéral qui s’engouffrent en cet anti-humanisme, non sans que des relents de la passion fascisante pour la terre s’unissent au culte de Gaïa, cette nature qui est forcément bonne[11], sans juger de ces poisons et pollutions naturelles. Le « gauchisme réactionnaire » retrouve les thèses de ceux qui adulaient la pureté du paysage germanique. Ce qu’analysait en 1992 Luc Ferry, en son brillant et fondateur essai Le Nouvel ordre écologique : « les thèses philosophiques qui sous-tendent les législations nazies recoupent souvent celles que développera la deep ecology et ce, pour une raison qu’on ne saurait sous-estimer : dans les deux cas c’est à une même représentation romantique et/ou sentimentale des rapports de la nature et de la culture que nous avons affaire, liée à une revalorisation de l’état sauvage contre celui de (prétendue) civilisation[12] ».

      Bruno Durieux déplie les prophéties apocalyptiques qui n’ont jamais mûri, ces réserves pétrolières et minières qui devraient être déjà rigoureusement épuisées et ne cessent de se multiplier, voire de se renouveler, la population croissante qui devait succomber à la famine, alors que l’humanité ne cesse de mieux (ou trop) se nourrir, se développer, s’éduquer, que les inégalités ne cessent de décroitre, comme le rappelle Hans Rosling[13], sauf si les étatismes et autres socialismes, sans compter les guerres, brident l’économie libérale. Si réchauffement anthropique il y a (et Bruno Durieux semble à cet égard crédule), seules la croissance économique et les développements technologiques permettront d’y pourvoir : « Nul besoin des recettes malthusiennes de l’écologisme, rationnements et taxations généralisées », qui sont des méthodes typiquement socialistes, constructivistes et totalitaires par excellence puisque la planète entière est l’argument ultime.

      En effet, la multiplication des « taxe carbone » (quoique absurdement Bruno Durieux plaide pour « une taxation raisonnable du carbone) et autres règlementations, sans oublier le principe de précaution, pèse sur la compétitivité des entreprises, contribue au chômage, donc à la paupérisation, sauf des fonctionnaires, des élus de l’écologie et de leurs associations subventionnées. Au point que la France criant haro sur « l’extractivisme[14] » s’interdise toute recherche sur le pétrole et le gaz de schiste, alors que l’on sait les exploiter proprement, interdit les Plantes Génétiquement Modifiées, rêve d’interdire le glyphosate hors de toute rationalité scientifique…

      Tous les démentis du monde n’arrêteront pas les tenants d’une religion, pour qui « l’écologisme est à la question environnementale ce que fut le communisme à la question sociale ». « Nouveau paganisme » et « monothéisme » de la biosphère, l’idéologie a ses fidèles, sa Bible, écrite par le GIEC, ses officiants, ses prosélytes ; et ses excommuniés. L’Onu est « le Saint-Siège de l’écologisme », quand ses ONG sont des évêchés. L’on prétend que renoncer à un enfant, comme les prêtres, c’est 120 tonnes d’équivalent C02 en moins aux Etats-Unis. En toute logique du péché originel, il faut à tout homme psalmodier sa contrition, dépasser sa culpabilité environnementale, en faisant allégeance à la foi naturelle et antihumaniste.

      Les manipulations de l’écologisme sont monnaie courante, comme cet ours malade sur un glaçon photographié par le National Geographic, symbole d’une extinction de la banquise et des ours blancs qui n’existe pas. Cette escroécologie que Bruno Durieux va jusqu’à appeler avec pertinence « l’écocensure » ne cesse de frapper. L’on ne dira pas que l’accident nucléaire de Tchernobyl n’a fait que 74 morts selon l’Office Mondial de la Santé, que la résilience de la nature est extraordinaire, que celui de Fukushima n’en a fait aucun qui soit d’origine nucléaire, sans que le nombre des cancers de la thyroïde ait augmenté. Le nombre de décès causés par la pollution de l’air a été divisé par deux depuis 1990, selon l’Institute for Health Metrics and Evaluation de Seattle. Le glyphosate se retrouvait dans les urines lorsque la détection se faisait au moyen du test allemand « Elisa », par un laboratoire, « Biotech », appartenant à un groupe partisan ; sa présence devient nulle à Brest, chez « Labocéa », avec la spectrographie de masse. L’on cache que l’air parisien, grâce aux progrès techniques, s’est à peu près débarrassé du plomb, du souffre, de tant de particules fines ; or les seuils de tolérance prétendus sont tellement infinitésimaux qu’ils sont forcément brandis comme des menaces pour éradiquer la voiture (sans penser au tabac) par des idéologues et des politiques dont la profession est la tyrannie, qui leur est source de finances, d’électeurs et de postes prestigieux. Une fois de plus les pouvoirs, et leur religiosité politique, prennent soin, grâce à leurs litanies et mantras, de réduire au silence médiatique les scientifiques dont la profession est l’analyse, le doute et la recherche de la vérité.

      Rigoureux, affichant une progression argumentative impeccable, l’essai de Bruno Durieux va de « la résistible ascension de l’écologisme », en passant par « l’écologisme triomphant » à « la croissance plutôt que l’écologisme pour la planète ». Ainsi, au-delà de son réquisitoire, pointe-t-il des initiatives innovantes : cultiver des champignons sur des rebus de fibres, exploiter le bambou, les algues, pratiquer l’aquaculture, penser au nucléaire avec le thorium, aux Organismes Génétiquement modifiés, sans compter les ressources surabondantes que ne savons pas encore en être. En ce sens les écologistes perçoivent un monde fermé, tel qu’il ne peut évoluer. Et il est à craindre que le concept fumeux de justice climatique ne soit qu’au service de la tyrannie de ses justiciers autoproclamés.

 

      Laissons le lecteur juger, qui des deux thèses, affirmative, catastrophiste, ou sceptique, est la bonne ; ou mieux le futur, de nouveaux esprits scientifique et critiques. Si nous avons le plus grand respect pour la science et ses savoirs, ses progrès et ses réussites, n’oublions pas pour autant que bien des scientifiques se sont trompés, entraînés par l’habitude ou l’idéologie, comme ceux qui repoussèrent les thèses de Copernic et de Galilée (moins catégorique était d’ailleurs l’Eglise), ou les adeptes du lyssenkisme en Union Soviétique, cette grotesque « science prolétarienne » de l’agronomie et de la génétique. Et que l’auteur de ces lignes, bien peu scientifique, devrait ne pas oublier l’adage : « Errare humanum est, perseverare diabolicum est ». Qui sait si les glaciers vont enfler, si l’humanité saura faire le ménage, tant en terme de propreté de la planète qu’en terme de salissure idéologique au service d’intérêts partisans et politiques ? Et qui sait surtout, si un écologisme libéral ne répondrait pas aux défis environnementaux ?

Thierry Guinhut

Une vie d'écriture et de photographie

 

[3] Emmanuel Garnier, Les dérangements du temps. 500 ans de chaud et de froid en Europe, Plon, 2009.

[5] Christian Gérondeau : L’Air est pur à Paris… Mais personne ne le sait, Editions du Toucan, 2018.

[8] Christian Gérondeau : Le CO2 est bon pour la planète, Editions du Toucan, 2019.

[9] OFDA/CRED International Database, www.emdat.be

[12] Luc Ferry : Le Nouvel ordre écologique, Grasset, 1992, p 185.

[14] Anna Bednik : Extractivisme, Le Passager clandestin, 2019.

 

Giacchio di Cevedale, Bormio, Brescia.

Photo : T. Guinhut.

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15 octobre 2019 2 15 /10 /octobre /2019 17:03

 

Photo : T. Guinhut.

 

 

 

Cosmos de littérature, de science,

 

d’art et de philosophie :

 

Nicolas Grenier, Trinh Xuan Thuan,

 

Florian Métral, Michel Onfray.

 

 

 

 

Nicolas Grenier : Petite anthologie du cosmos,

Paulsen, 360 p, 13 €.

 

Trinh Xuan Thuan : Vertige du cosmos, Flammarion, 464 p, 21,90 €.

 

Florian Métral : Figurer la création du monde.

Mythes, discours et images cosmogoniques dans l’art de la Renaissance,

Actes Sud, 368 p, 34 €.

 

Michel Onfray : Cosmos, Flammarion, 576 p, 22,90 €.

 

 

 

      « Dieu ne joue pas aux dés », répondit à Niels Bohr le père de la relativité générale, bien que fut là une erreur d’Albert Einstein, qui n’acceptait pas les implications de la physique quantique, puis le concept d’incertitude venu de Werner Heinsenberg. Cependant, du fossile à l’étoile, de la plume à l’oiseau sculpté par l’artiste, de la rotondité de la terre aux galaxies spirales, l’on pensa longtemps, à la suite d’Aristote, que règne dans l’univers un bel ordre, ce que, étymologiquement, signifie le cosmos. Immense cabinet de curiosités, énigme scientifique à peine résolue, le cosmos est le repaire de tant de mythes affolants, de poèmes et de tableaux splendides que c’est autant un vertige qu’un bonheur de l’explorer. Une originale anthologie met heureusement le lecteur sur orbite autour de l’espace et du temps littéraire, quand Trin Xuan Thuan balaie à lui seul l’histoire des sciences cosmiques. Ce à quoi répond la figuration de la création du monde dans l’art de la Renaissance bellement étudiée par Florian Métral. Quant à Michel Onfray, nous propose-t-il un bel ordre ou beau désordre dans son Cosmos, essai prolixe et philosophie de la nature…

 

      Connaissiez-vous Aratus de Soles ? Le pitoyable auteur de ces lignes dut avouer son ignorance en ouvrant cette Petite anthologie du cosmos conduite par Nicolas Grenier, quoique ne lui fussent pas étranger les suivants : Sénèque admirateur du mouvement des planètes, Georges Sand en Lélia contemplant la nuit sublime, Edgar Allan Poe et ses spéculations stellaires, Alphonse Daudet et Anatole France… L’on pourrait en tirer une leçon morale, tant nous ignorons l’origine, physique et littéraire, de l’univers qui nous environne jusqu’aux plus lointaines galaxies, sans compter les auteurs de l’Antiquité dont les textes sont malheureusement perdus. Il en est de même à l’occasion de chacun des sept chapitres : un ou deux auteurs nous sont inconnus, ce qui n’est cependant rien face à l’inconnu des milliards d’étoiles qui tapissent l’infini qui nous environne.

      Il est logique que nous commencions par « La beauté du cosmos », conformément à l’étymologie. Notre Aratus de Soles composa les Phénomènes, un poème didactique, au III° siècle avant Jésus-Christ, décrivant avec enthousiasme la marche des constellations, jouant avec les animalisations qui les nomment : « La grande Baleine arrive ensuite pour dévorer Andromède quoique éloignée »… De l’Antiquité au romantisme, l’on passe au rousseauiste Bernardin de Saint-Pierre contemplant en enfant le ciel ; l’on explore l’univers avec le voyage du facétieux héros de Cyrano de Bergerac, dans son Histoire comique des états et empires de la lune, qui précédait au XVII° siècle celle du soleil, formant ainsi la première œuvre réellement digne de la future anticipation et science-fiction. Voyage auquel répond celui de Pierre Gallet, en 1803, envoyant un Sélénite vers la terre avec deux éléphants ailés. Jules Verne préfère, quelques décennies plus tard, projeter un obus habité vers la lune, quand Wells voit débarquer les Martiens de La Guerre des mondes. Il faut alors remarquer l’originalité (parmi bien d’autres) de cette anthologie, qui nous propose un extrait d’un opéra-bouffe de Jacques Offenbach, Le Voyage dans la lune, dans lequel « Popotte » est la femme du roi Cosmos ! Chercheurs excentriques et savants fous partis à la conquête de l’espace sont légion dans les romans méconnus du début du XX° siècle où la « vie extraterrestre » est l’occasion de toutes les élucubrations : du Péril bleu de Maurice Renard aux « mégalocéphales » martiens de d’Arnould Galopin.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

      Les récits de création du monde, depuis le Timée de Platon, La Nature des choses de Lucrèce et les Métamorphoses d’Ovide font la part belle à l’Antiquité, quoique Descartes, Buffon, Kant et Chateaubriand ne soient pas en reste, bien que l’on ignore ici les cosmogonies africaines ou extrême-orientales. Le mythe a une fonction étiologique, figurant l’inexplicable, du chaos à l’ordre des planètes, alors que les auteurs des Lumières se veulent plus scientifiques, comme Fontenelle ou Kant, quoique Voltaire, avec son Micromégas, soit plus moraliste en son apologue.

      Suivons de surcroit les éclipses, les météores et les comètes, phénomènes célestes éblouissants ; mais aussi inquiétants, au point que l’on y puisse voir les prémices de la fin du monde. N’oublions pas alors quelques incursions dans la science-fiction contemporaine, dans l’univers de Ray Bradbury et de ses Chroniques martiennes, d’Isaac Asimov qui postule une « Secte des Cultistes » annonçant la destruction par les étoiles, et d’Arthur C. Clarke, dont Le Marteau de Dieu s’abat sous la forme de l’astéroïde « Kali ». Aussi l’on a la conviction que la divinité est l’auteur du cosmos et de sa fin ; alors que de plus rigoureux auteurs préfèrent la démarche de l’homme de science, d’Antoine Lavoisier à Camille Flammarion, en passant par Louis Arago et Henri Poincaré, jusqu’à l’inattendu Georges Clémenceau qui s’intéresse à un univers où « tout se meut »…

      L’esprit sourcilleux pourrait s’étonner que manque la première page de la Genèse biblique, où le chaos primitif s’écarte sous la main d’un dieu pour former la lumière, l’air la terre et les eaux, mais aussi du texte fondateur d’Aristote intitulé Du ciel. À ce classement thématique, l’on eût pu préférer un classement chronologique, mais le premier trouve une cohérence bienvenue. Qu’importe, ces courts - sinon trop courts - extraits font un beau bouquet cosmique à la lisière de l’histoire littéraire et de l’histoire des sciences. Mythe, fantaisie romanesque et rigueur scientifique forment en cette anthologie un instructif et délicieux bouquet.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

      Plus complètement scientifique est Trinh Xuan Thuan, de surcroit observant une stricte démarche chronologique, en son Vertige du cosmos. Cet astrophysicien, professeur à l’Université américaine de Virginie a publié avec constance, et depuis La Mélodie secrète[1], une quinzaine de volumes consacrés aux connaissances les plus récentes et pointues obtenues en fouillant l’univers, non sans un réel talent de vulgarisateur.

      De la préhistoire à la théorie du big-bang, né il y a quelques quatorze milliards d’années, des observatoires de Carnac et Stonehenge (« ordinateur néolithique ou enclos funéraire ? ») et du « Disque de Nébra », rare représentation céleste de l’âge du bronze, au satellite Hubble et aux « multivers », notre essayiste joue avec brio dans l’immense cour de l’Histoire des sciences du cosmos. Il forge ainsi le concept d’« archéoastronomie », couplé avec les récits de l’origine cosmique, jusque parmi l’hindouiste respiration de Brahma, le ying et le yang chinois, mais aussi « Caracol, le plus bel observatoire maya » et « Monks Mound » dans l’Illinois, « miroir du cosmos »… L’astronomie est considérée dans sa dimension géographique mondiale et multiethnique autant que dans sa dimension historique. Que, certes, seul l’Occident parvint à perfectionner, grâce au « miracle grec ». Quoique par exemple les Dogons en Afrique savaient que Jupiter a quatre lunes, que Sirius est une étoile double, choses inconnaissables sans les télescopes, mais ils avaient été probablement informés par des missionnaires… Ce qui prouve cependant l’universalité de la soif de connaissances.

      Bien sûr il s’agit de dépasser le géocentrisme de Ptolémée pour atteindre la « révolution copernicienne » de l’héliocentrisme, jusqu’à l’espace-temps d’Einstein, puis l’expansion d’un univers qui ne nous a pas encore dit s’il est fini ou infini ; sans oublier la certitude de la sphéricité terrestre, depuis Aristote, depuis la preuve apportée par Eratosthène d’Alexandrie au III° siècle avant Jésus Christ, au moyen de la lumière zénithale qui atteint le fond d’un puits au sud de l’Egypte, quand un gnomon fournit au nord une ombre. Notons qu’en dépit d’un préjugé trop répandu, et au détriment du prétendu obscurantisme médiéval et des platistes nos contemporains, cette connaissance était partagée tout au long du Moyen-âge, de Bède le Vénérable au VIII° siècle, à Saint Thomas d’Aquin au XIII° siècle…

      L’on se doute que « la spiritualité est la compagne de la science », de Pascal à Einstein, que la beauté du cosmos, dont les limites reculent sans cesse, dont les prodiges effraient et émerveillent, procurent un « sentiment de transcendance » à qui veut bien le ressentir, le relier à un panthéisme, voire à la foi en un dieu créateur. Cependant, les avancées scientifiques aidant, « le sacré s’est estompé pour laisser la place au profane ».

      Bienvenue aujourd’hui à la « matière noire » et « exotique », aux « amas globulaires », à un univers à la « courbure nulle » et à la géométrie plate », à un univers incertain, lorsque « le futur détermine le passé des particules », car le passé d’un photon « se décline sous la forme d’une multitude de possibilités ». Faut-il y voir la source des « multivers » ? Que penser à cet égard d’une observation qui ne reflète qu’un passé venu de millions d’années lumières en arrière ? D’un univers ordonné, donc caractérisé par une « basse entropie », venue « de la naissance du cosmos, il y a 13,8 milliards d’années, de la fameuse déflagration appelée Big-Bang »… « Comment l’univers a-t-il pu développer une structure si riche à petite échelle, à partir d’un état si uniforme à grande échelle, uniformité que les observation du rayonnement fossile nous ont révélée ? »

      L’essai de Trinh Xuan Thuan est profus, fabuleux, didactique à souhait ; judicieusement illustré, il est une mine d’informations, une ode à la beauté du savoir…

 

      Ce que l’on appelle aujourd’hui le Big-Bang, était à la Renaissance le résultat de la volonté divine. Aussi ne craignait-on pas d’exalter non seulement cette dernière et sa créature cosmique, mais aussi de Figurer la création du monde, comme le fait en couverture Franceco Salviati en sa Séparation des eaux de la terre (1554). Le sous-titre de cet ouvrage ravissant de Florian Métral est rien moins que « Mythes, discours et images cosmogoniques dans l’art de la Renaissance ». L’on devine qu’il va emprunter les chemins de la littérature et de la peinture, voire de la sculpture.

      Voici une époque foisonnante : le christianisme côtoie le platonisme et l’orphisme, l’alchimie la kabbale, un dieu barbu, puissant et lumineux jaillit des plafonds pour séparer la terre des eaux, quand Copernic va découvrir à sa grande stupéfaction, alors qu’il pensait apporter la preuve astronomique et mathématique du géocentrisme, que la terre et les planètes tournent autour du soleil. De Ghiberti à Mantegna, de Bosch à Michel-Ange, de Raphaël à Véronèse et au Greco, le pinceau virevolte, jusqu’à ce que, d’humble serviteur du Seigneur, l’on passe à l’enviable statut d’artiste démiurge.

      Le mythe de la création étant un invariant anthropologique, une civilisation chrétienne qui n’inflige pas d’interdit à l’image ne peut résister au désir de la représentation cosmique. Le Timée de Platon concourt à la Genèse biblique, pour imaginer et figurer la naissance du cosmos, récit dont, dit-on, Moïse serait l’auteur. L’on se doute que l’essayiste déplie les textes originels, ainsi que ceux des Pères de l’Eglise, comme ceux de Saint-Augustin qui distingue « le ciel intelligible » et « le ciel corporel ». Ainsi, au cœur des manuscrits enluminés médiévaux, trônent les six jours de la création, jusqu’à ceux de Crivelli au quattrocento.

      La poésie n’est pas oubliée, ne serait que grâce à l’étymologie, ποίησις signifiant en grec création. Du Bartas écrit en 1578 La Sepmaine : « Il me plaist bien de voir ceste ronde machine / Comme estant un miroir de la face divine ». Car, commente Florian Métral, « pour le poète la nature visible est assurément une théophanie ». Plusieurs éditions seront bientôt ornées d’estampes, non sans inspirer d’autres poètes, dont Le Tasse, avec ses Sette giornate del mondo creato, en 1600. Or de telles figurations, encombrées de plantes et d’animaux, entraînent la floraison du « paysage cosmogonique », chez Jan Brueghel l’Ancien, notamment. L’image du globe terrestre, en particulier celle en grisaille qui orne les volets extérieurs du Jardin des délices de Jérôme Bosch, est à la fois une bien chrétienne perfection du monde et une réactivation de l’harmonie des sphères venue de l’Antiquité, via Les Métamorphoses d’Ovide, comme lorsque Le Caravage peint Jupiter, Neptune et Pluton aux pieds d’un globe orné des constellations animales. Sous le pinceau de Carlo Dossi, Jupiter peignant des papillons (1524) est une allusion à l’anima mundi et à l’envol de l’âme…

      De toute évidence, l’historien de l’art se doit de consacrer une étude fouillée à Michel-Ange et à la voûte de la Chapelle Sixtine, peinte entre 1508 et 1512, ainsi qu’à ses successeurs, car après lui rien n’est comme avant : sa puissance narrative et sculpturale lui assure une autorité démiurgique. Faire se répondre les Prophètes bibliques et les Sibylles antiques n’a rien d’innocent. Tous contemplent l’œuvre du Créateur dans les sept médaillons figurant les sept actes de création, et plus particulièrement Jonas, qui a le privilège et la stupéfaction de voir la séparation de la lumière et des ténèbres…

      D’une manière prolixe, l’on aime à représenter tant le chaos antérieur à la séparation des éléments et l’œuf primordial, dans la tradition orphique, que la pullulation de l’univers. Tout ceci pour ordonner « une correspondance poétique entre la fabrique du monde et la production de l’œuvre d’art ». De même la création d’Adam, puis d’Eve, peut être envisagée comme une métaphore de l’acte pictural ; la présence de Dieu étant, de manière « quelque peu présomptueuse », une « rémanence de l’artiste ».

      Doté d’un beau cahier de reproductions en couleurs, cet ouvrage remarquable laisse tout de même un petit goût de regret : son abondante iconographie en noir en blanc n’est pas toujours excellemment lisible et aurait de plus mérité le soin et le cartonnage d’un livre d’art. Néanmoins l’essai de Florian Métral est délicieusement érudit, tant en théologie qu’en iconologie, proposant des éclairages révélateurs sur une période ô combien essentielle de l’Histoire de l’art et de la civilisation, celle humaniste du « syncrétisme cosmogonique » et d’une « sensibilité scientifique prémoderne ». Au-delà de laquelle aussi bien les voyages autour du globe et la diffusion de l’héliocentrisme copernicien, y compris via Galilée, mais aussi l’approche atomiste venue du De rerum natura de Lucrèce, auront définitivement raison d’une conception ptolémaïque du monde, assurant la prochaine victoire des Lumières.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

      Tortionnaire du clavier, d’où les touches s’effacent au grattage, Michel Onfray écrit plus vite qu’il respire. Enchaînant volume sur volume, il lui faut cependant parachever une somme, son « premier livre », prétend-il après une énumération un tantinet m’as-tu vu, édifier enfin un autoportrait cosmique un rien narcissique, quoique peut-être emporté par son élan il en néglige de le peaufiner, une synthèse sublime et quelque peu présomptueuse de sa philosophie.

      À partir de la scène fondatrice de la mort du père, Michel Onfray se dévoile d’abord en une belle page autobiographique, qui verrait là l’origine de son monde, bien sûr au sens cosmique du terme, en toute cohérence avec le titre, car ce père lui permit « de trouver [sa] juste place dans le cosmos ». De même la profession paternelle d’ouvrier agricole et un voyage aux abords du pôle nord, leur permirent de comprendre la nécessité d’un accord avec la nature.

      En découle une « ontologie matérialiste », sans fiction consolatrice, en cohérence avec le Traité d’athéologie[2], et à même de permettre « mener une vie philosophique ». Pour ce faire, le prétendant à la philosophie récapitule ce qui était un « temps virgilien », donc naturel, dont « l’oubli est cause et conséquence du nihilisme de notre époque », formule à l’emporte-pièce, qui témoigne d’une idéalisation d’un passé rural et ancestral qui fait long feu et d’un blâme de notre époque pour le moins péremptoire. Ainsi l’apparition de nos « machines à fabriquer du temps virtuel » a « tué ce temps cosmique et produit un temps mort ». L’on ne sait si l’on court ici vers la décroissance écologiste ou vers la régression intellectuelle, à moins qu’il s’agisse d’un « contre temps hédoniste » nimbé d’une fumeuse spiritualité…

      Le philosophe, à qui l’on ne reprochera pas de ne pas avoir beaucoup lu, quoique quantité ne soit pas qualité, discourt sur « la force de la force », au service d’une vie par-delà le bien et le mal, dans un volontarisme nietzschéen : une « botanique de la volonté de puissance » qui n’a rien à voir avec sa distorsion par le fascisme[3], c’est-à-dire la lutte pour la vie de toute plante, « car tout ce qui est est volonté de puissance ». Certes ; l’on pardonnera le truisme.

      Ensuite la référence est darwinienne, de façon à penser qu’il n’y a « pas de différence de nature entre l’homme et l’animal, mais une différence de degré », ce qui est se moquer passablement de la dimension génétique ; quoique non sans pertinence, tout en réclamant de traiter les animaux avec humanité, il refuse l’impasse du véganisme[4], car « qui veut faire la bête fait l’ange », formule en chiasme qui laisse le lecteur songeur...

      Au-delà du platonisme et d’un christianisme « qui a vidé le ciel de ses astres pour le remplir de ses fictions » (comme si cette religion avait toujours été anti-scientifique !), voici une « éthique de l’univers chiffonné » qui se veut proposer une païenne sagesse cosmique ; et refonder la philosophie sur la nature, non sans céder encore une fois à la mode écologiste, non sans multiplier une prétention scientifique très vite mise à mal. Enfin « l’expérience de la vastitude » permet une conscience du sublime, via le oui nietzschéen à la vie… Rien de neuf sous le soleil de la philosophie, si tant est que ce dernier mot ne soit pas ici abusif.

      Il est cependant permis de lire cet essai comme une généreuse « dégustation » du monde. Voire une petite encyclopédie riche de couleurs et d’odeurs, comme ce marché de Pointe-Noire, au Congo. L’on y croise « l’anguille lucifuge » ( qui n'est pas un serpent comme affirmé), le parasitisme animal et l’homme prédateur (en une abusive généralisation), un « vin biodynamique » imbuvable, le « fumier spirituel » de l’anthroposophie, les haïku japonais, les naturalistes comme Jacques-Henri Fabre l’entomologiste, les astrophysiciens comme Jean-Pierre Luminet, « la cène de l’art contemporain », une « musique préhistorique » fantasmée, le peintre Arcimboldo, ad nauseam. Tout ce que l’on lira, au choix, comme un précieux réservoir d’anecdotes, de savoirs et de pensées, ou comme un gloubi-boulga philosophique valorisant Lucrèce et Epicure, dévalorisant le christianisme avec une hargne lourdaude. Quant à la formule programmatique, « une sagesse sans morale », ou « une éthique sans morale », même si l’on comprend le rejet, un rien discutable, de la morale chrétienne, elle à la limite de l’incohérence, tant la conduite des mœurs, donc la morale, ne peut être absente d’aucune sagesse.

      Nous ne sommes pas sûrs d’avoir répondu complètement à notre précédente question : Faut-il lire Michel Onfray[5] ? Cela ne fera pas de mal à une mouche si cela fait parfois mouche, car cette sagesse professée reste accessible et humaine, malgré son côté prêchi-prêcha et l’impression de cafouillage permanent. Le pire étant ses approximations et autres erreurs scientifiques qui sont légion : comme lorsque l’on apprend que l’homme descend des plantes ou que l’araignée est un insecte, que l’on confond bactérie et molécule, que la neurobiologie permettrait de postuler un lien de causalité entre la Toxoplasma gondii et l'absence de libre arbitre, sans oublier la musique constituée de « nappes de particules » ! Faut-il passer sur des détestations périlleuses et des idéalisations niaises, une spiritualité cosmique en contradiction avec le propos matérialiste enfin…

 

      Pour reprendre la formule de Florian Métral, « La représentation de l’irreprésentable mystère de la naissance de l’univers » court au travers de l’ambition de l’humanité. Quelle soit mythologique, théologique, scientifique, artistique ou philosophique, elle apparait comme la justification ultime de la présence au monde. Il y a bien à cet égard congruence entre le poète, le romancier, l’astronome, l’historien de l’art et le philosophe. Sauf que les premiers, talentueux, risquent d’éprouver un agacement caractérisé à se trouver ici en compagnie du dernier que nous avons évoqué. Aussi relisons ceux-là sans craindre de ne pas y découvrir de nouvelles beautés, aussi bien esthétiques qu’intellectuelles, voire éthiques : ils savent vivre dans la nuit étoilée de la bibliothèque universelle.

Thierry Guinhut

Une vie d'écriture et de photographie

 

[1]  Trinh Xuan Thuan : La Mélodie secrète : et l'homme créa l'univers, Fayard, 1988.

[2] Michel Onfray : Traité d’athéologie, Grasset,

[3] Voir : Nietzsche poète et philosophe à l'innocence controversée

[5] Voir : Faut-il penser Michel Onfray ?

 

Photo : T. Guinhut.

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La pandémie des postures idéologiques

Agonie scientifique et sophisme français

Impéritie de l'Etat, atteinte aux libertés

Retraite communiste ou raisonnée

 

 

 

 

 

 

 

Etats-Unis romans

Dérives post-américaines

Rana Dasgupta : Solo, destin américain

Bret Easton Ellis : Eclats, American psycho

Eugenides : Middlesex, Roman du mariage

Bernardine Evaristo : Fille, femme, autre

La Muse de Jonathan Galassi

Gardner : La Symphonie des spectres

Lauren Groff : Les Furies

Hallberg, Franzen : City on fire, Freedom

Jonathan Lethem : Chronic-city

Luiselli : Les Dents, Archives des enfants

Rick Moody : Démonologies

De la Pava, Marissa Pessl : les agents du mal

Penn Warren : Grande forêt, Hommes du roi

Shteyngart : Super triste histoire d'amour

Tartt : Chardonneret, Maître des illusions

Wright, Ellison, Baldwin, Scott-Heron

 

 

 

 

 

 

 

Europe

Du mythe européen aux Lettres européennes

 

 

 

 

 

 

Fables politiques

Le bouffon interdit, L'animal mariage, 2025 l'animale utopie, L'ânesse et la sangsue

Les chats menacés par la religion des rats, L'Etat-providence à l'assaut des lions, De l'alternance en Démocratie animale, Des porcs et de la dette

 

 

 

 

 

 

 

Fabre

Jean-Henri Fabre, prince de l'entomologie

 

 

 

 

 

 

 

Facebook

Facebook, IPhone : tyrannie ou libertés ?

 

 

 

 

 

 

Fallada

Seul dans Berlin : résistance antinazie

 

 

 

 

 

 

Fantastique

Dracula et autres vampires

Lectures du mythe de Frankenstein

Montgomery Bird : Sheppard Lee

Karlsson : La Pièce ; Jääskeläinen : Lumikko

Michal Ajvaz : de l'Autre île à l'Autre ville

Morselli Dissipatio, Longo L'Homme vertical

Présences & absences fantastiques : Karlsson, Pépin, Trias de Bes, Epsmark, Beydoun

 

 

 

 

 

 

Fascisme

Histoire du fascisme et de Mussolini

De Mein Kampf à la chambre à gaz

Haushofer : Sonnets de Moabit

 

 

 

 

 

 

 

Femmes

Lettre à une jeune femme politique

Humanisme et civilisation devant le viol

Harcèlement et séduction

Les Amazones par Mayor et Testart

Christine de Pizan, féministe du Moyen Âge

Naomi Alderman : Le Pouvoir

Histoire des féminités littéraires

Rachilde et la revanche des autrices

La révolution du féminin

Jalons du féminisme : Bonnet, Fraisse, Gay

Camille Froidevaux-Metterie : Seins

Herland, Egalie : républiques des femmes

Bernardine Evaristo, Imbolo Mbue

 

 

 

 

 

 

Ferré

Providence du lecteur, Karnaval capitaliste ?

 

 

 

 

 

 

Ferry

Mythologie et philosophie

Transhumanisme, intelligence artificielle, robotique

De l’Amour ; philosophie pour le XXI° siècle

 

 

 

 

 

 

 

Finkielkraut

L'Après littérature

L’identité malheureuse

 

 

 

 

 

 

Flanagan

Livre de Gould et Histoire de la Tasmanie

 

 

 

 

 

 

 

Foster Wallace

L'Infinie comédie : esbroufe ou génie ?

 

 

 

 

 

 

 

Foucault

Pouvoirs et libertés de Foucault en Pléiade

Maîtres de vérité, Question anthropologique

Herculine Barbin : hermaphrodite et genre

Les Aveux de la chair

Destin des prisons et angélisme pénal

 

 

 

 

 

 

 

Fragoso

Le Tigre de la pédophilie

 

 

 

 

 

 

 

France

Identité française et immigration

Eloge, blâme : Histoire mondiale de la France

Identité, assimilation : Finkielkraut, Tribalat

Antilibéralisme : Darien, Macron, Gauchet

La France de Sloterdijk et Tardif-Perroux

 

 

 

 

 

 

France Littérature contemporaine

Blas de Roblès de Nemo à l'ethnologie

Briet : Fixer le ciel au mur

Haddad : Le Peintre d’éventail

Haddad : Nouvelles du jour et de la nuit

Jourde : Festins Secrets

Littell : Les Bienveillantes

Louis-Combet : Bethsabée, Rembrandt

Nadaud : Des montagnes et des dieux

Le roman des cinéastes. Ohl : Redrum

Eric Poindron : Bal de fantômes

Reinhardt : Le Système Victoria

Sollers : Vie divine et Guerre du goût

Villemain : Ils marchent le regard fier

 

 

 

 

 

 

Fuentes

La Volonté et la fortune

Crescendo du temps et amour faustien : Anniversaire, L'Instinct d'Inez

Diane chasseresse et Bonheur des familles

Le Siège de l’aigle politique

 

 

 

 

 

 

 

Fumaroli

De la République des lettres et de Peiresc

 

 

 

 

 

 

Gaddis

William Gaddis, un géant sibyllin

 

 

 

 

 

 

Gamboa

Maison politique, un roman baroque

 

 

 

 

 

 

Garouste

Don Quichotte, Vraiment peindre

 

 

 

 

 

 

 

Gass

Au bout du tunnel : Sonate cartésienne

 

 

 

 

 

 

 

Gavelis

Vilnius poker, conscience balte

 

 

 

 

 

 

Genèse

Adam et Eve, mythe et historicité

La Genèse illustrée par l'abstraction

 

 

 

 

 

 

 

Gilgamesh
L'épopée originelle et sa photographie


 

 

 

 

 

 

Gibson

Neuromancien, Identification des schémas

 

 

 

 

 

 

Girard

René Girard, Conversion de l'art, violence

 

 

 

 

 

 

 

Goethe

Chemins de Goethe avec Pietro Citati

Goethe et la France, Fondation Bodmer

Thomas Bernhard : Goethe se mheurt

Arno Schmidt : Goethe et un admirateur

 

 

 

 

 

 

 

Gothiques

Frankenstein et autres romans gothiques

 

 

 

 

 

 

Golovkina

Les Vaincus de la terreur communiste

 

 

 

 

 

 

 

Goytisolo

Un dissident espagnol

 

 

 

 

 

 

Gracian

L’homme de cour, Traités politiques

 

 

 

 

 

 

 

Gracq

Les Terres du couchant, conte philosophique

 

 

 

 

 

 

Grandes

Le franquisme du Cœur glacé

 

 

 

 

 

 

 

Greenblatt

Shakespeare : Will le magnifique

Le Pogge et Lucrèce au Quattrocento

Adam et Eve, mythe et historicité

 

 

 

 

 

 

 

Guerre et violence

John Keegan : Histoire de la guerre

Storia della guerra di John Keegan

Guerre et paix à la Fondation Martin Bodmer

Violence, biblique, romaine et Terreur

Violence et vices politiques

Battle royale, cruelle téléréalité

Honni soit qui Syrie pense

Emeutes et violences urbaines

Mortel fait divers et paravent idéologique

Violences policières et antipolicières

Stefan Brijs : Courrier des tranchées

 

 

 

 

 

 

Guinhut

Une vie d'écriture et de photographie

 

 

 

 

 

 

Guinhut Muses Academy

Muses Academy, roman : synopsis, Prologue

I L'ouverture des portes

II Récit de l'Architecte : Uranos ou l'Orgueil

Première soirée : dialogue et jury des Muses

V Récit de la danseuse Terpsichore

IX Récit du cinéaste : L’ecpyrose de l’Envie

XI Récit de la Musicienne : La Gourmandise

XIII Récit d'Erato : la peintresse assassine

XVII Polymnie ou la tyrannie politique

XIX Calliope jeuvidéaste : Civilisation et Barbarie

 

 

 

 

 

 

Guinhut

Philosophie politique

 

 

 

 

 

 

Guinhut

Faillite et universalité de la beauté, de l'Antiquité à notre contemporain, essai

 

 

 

 

 

 

 

Guinhut

Au Coeur des Pyrénées

 

 

 

 

 

 

 

Guinhut

Pyrénées entre Aneto et Canigou

 

 

 

 

 

 

 

Guinhut

Haut-Languedoc

 

 

 

 

 

 

 

Guinhut

Montagne Noire : Journal de marche

 

 

 

 

 

 

 

Guinhut Triptyques

Le carnet des Triptyques géographiques

 

 

 

 

 

 

Guinhut Le Recours aux Monts du Cantal

Traversées. Le recours à la montagne

 

 

 

 

 

 

 

Guinhut

Le Marais poitevin

 

 

 

 

 

 

 

Guinhut La République des rêves

La République des rêves, roman

I Une route des vins de Blaye au Médoc

II La Conscience de Bordeaux

II Le Faust de Bordeaux

III Bironpolis. Incipit

III Bironpolis. Les nuages de Titien 

IV Eros à Sauvages : Les belles inconnues

IV Eros : Mélissa et les sciences politiques

VII Le Testament de Job

VIII De natura rerum. Incipit

VIII De natura rerum. Euro Urba

VIII De natura rerum. Montée vers l’Empyrée

VIII De natura rerum excipit

 

 

 

 

 

 

 

Guinhut Les Métamorphoses de Vivant

I Synopsis, sommaire et prologue

II Arielle Hawks prêtresse des médias

III La Princesse de Monthluc-Parme

IV Francastel, frontnationaliste

V Greenbomber, écoterroriste

VI Lou-Hyde Motion, Jésus-Bouddha-Star

VII Démona Virago, cruella du-postféminisme

 

 

 

 

 

 

Guinhut Voyages en archipel

I De par Marie à Bologne descendu

IX De New-York à Pacifica

 

 

 

 

 

 

 

Guinhut Sonnets

À une jeune Aphrodite de marbre

Sonnets des paysages

Sonnets de l'Art poétique

Sonnets autobiographiques

Des peintres : Crivelli, Titien, Rothko, Tàpies, Twombly

Trois requiem : Selma, Mandelstam, Malala

 

 

 

 

 

 

Guinhut Trois vies dans la vie d'Heinz M

I Une année sabbatique

II Hölderlin à Tübingen

III Elégies à Liesel

 

 

 

 

 

 

 

Guinhut Le Passage des sierras

Un Etat libre en Pyrénées

Le Passage du Haut-Aragon

Vihuet, une disparition

 

 

 

 

 

 

 

Guinhut

Ré une île en paradis

 

 

 

 

 

 

Guinhut

Photographie

 

 

 

 

 

 

Guinhut La Bibliothèque du meurtrier

Synospsis, sommaire et Prologue

I L'Artiste en-maigreur

II Enquête et pièges au labyrinthe

III L'Ecrivain voleur de vies

IV La Salle Maladeta

V Les Neiges du philosophe

VI Le Club des tee-shirts politiques

XIII Le Clone du Couloirdelavie.com.

 

 

 

 

 

 

Haddad

La Sirène d'Isé

Le Peintre d’éventail, Les Haïkus

Corps désirable, Nouvelles de jour et nuit

 

 

 

 

 

 

 

Haine

Du procès contre la haine

 

 

 

 

 

 

 

Hamsun

Faim romantique et passion nazie

 

 

 

 

 

 

 

Haushofer

Albrecht Haushofer : Sonnets de Moabit

Marlen Haushofer : Mur invisible, Mansarde

 

 

 

 

 

 

 

Hayek

De l’humiliation électorale

Serions-nous plus libres sans l'Etat ?

Tempérament et rationalisme politique

Front Socialiste National et antilibéralisme

 

 

 

 

 

 

 

Histoire

Histoire du monde en trois tours de Babel

Eloge, blâme : Histoire mondiale de la France

Statues de l'Histoire et mémoire

De Mein Kampf à la chambre à gaz

Rome du libéralisme au socialisme

Destruction des Indes : Las Casas, Verne

Jean Claude Bologne historien de l'amour

Jean Claude Bologne : Histoire du scandale

Histoire du vin et culture alimentaire

Corbin, Vigarello : Histoire du corps

Berlin, du nazisme au communisme

De Mahomet au Coran, de la traite arabo-musulmane au mythe al-Andalus

L'Islam parmi le destin français

 

 

 

 

 

 

 

Hobbes

Emeutes urbaines : entre naïveté et guerre

Serions-nous plus libres sans l'Etat ?

 

 

 

 

 

 

 

Hoffmann

Le fantastique d'Hoffmann à Ewers

 

 

 

 

 

 

 

Hölderlin

Trois vies d'Heinz M. II Hölderlin à Tübingen

 

 

 

 

 

 

Homère

Dan Simmons : Ilium science-fictionnel

 

 

 

 

 

 

 

Homosexualité

Pasolini : Sonnets du manque amoureux

Libertés libérales : Homosexualité, drogues, prostitution, immigration

Garcia Lorca : homosexualité et création

 

 

 

 

 

 

Houellebecq

Extension du domaine de la soumission

 

 

 

 

 

 

 

Humanisme

Erasme et Aldo Manuzio

Etat et utopie de Thomas More

Le Pogge : Facéties et satires morales

Le Pogge et Lucrèce au Quattrocento

De la République des Lettres et de Peiresc

Eloge de Pétrarque humaniste et poète

Pic de la Mirandole : 900 conclusions

 

 

 

 

 

 

 

Hustvedt

Vivre, penser, regarder. Eté sans les hommes

Le Monde flamboyant d’une femme-artiste

 

 

 

 

 

 

 

Huxley

Du meilleur des mondes aux Temps futurs

 

 

 

 

 

 

 

Ilis 

Croisade des enfants, Vies parallèles, Livre des nombres

 

 

 

 

 

 

 

Impôt

Vers le paradis fiscal français ?

Sloterdijk : fiscocratie, repenser l’impôt

La dette grecque,  tonneau des Danaïdes

 

 

 

 

 

 

Inde

Coffret Inde, Bhagavad-gita, Nagarjuna

Les hijras d'Arundhati Roy et Anosh Irani

 

 

 

 

 

 

Inégalités

L'argument spécieux des inégalités : Rousseau, Marx, Piketty, Jouvenel, Hayek

 

 

 

 

 

 

Islam

Lettre à une jeune femme politique

Du fanatisme morbide islamiste

Dictatures arabes et ottomanes

Islam et Russie : choisir ses ennemis

Humanisme et civilisation devant le viol

Arbre du terrorisme, forêt d'Islam : dénis

Arbre du terrorisme, forêt d'Islam : défis

Sommes-nous islamophobes ?

Islamologie I Mahomet, Coran, al-Andalus

Islamologie II arabe et Islam en France

Claude Lévi-Strauss juge de l’Islam

Pourquoi nous ne sommes pas religieux

Vérité d’islam et vérités libérales

Identité, assimilation : Finkielkraut, Tribalat

Averroès et al-Ghazali

 

 

 

 

 

Israël

Une épine démocratique parmi l’Islam

Résistance biblique Appelfeld Les Partisans

Amos Oz : un Judas anti-fanatique

 

 

 

 

 

 

 

Jaccottet

Philippe Jaccottet : Madrigaux & Clarté

 

 

 

 

 

 

James

Voyages et nouvelles d'Henry James

 

 

 

 

 

 

 

Jankélévitch

Jankélévitch, conscience et pardon

L'enchantement musical


 

 

 

 

 

 

Japon

Bashô : L’intégrale des haïkus

Kamo no Chômei, cabane de moine et éveil

Kawabata : Pissenlits et Mont Fuji

Kiyoko Murata, Julie Otsuka : Fille de joie

Battle royale : téléréalité politique

Haruki Murakami : Le Commandeur, Kafka

Murakami Ryû : 1969, Les Bébés

Mieko Kawakami : Nuits, amants, Seins, œufs

Ôé Kenzaburô : Adieu mon livre !

Ogawa Yoko : Cristallisation secrète

Ogawa Yoko : Le Petit joueur d’échecs

À l'ombre de Tanizaki

101 poèmes du Japon d'aujourd'hui

Rires du Japon et bestiaire de Kyosai

 

 

 

 

 

 

Jünger

Carnets de guerre, tempêtes du siècle

 

 

 

 

 

 

 

Kafka

Justice au Procès : Kafka et Welles

L'intégrale des Journaux, Récits et Romans

 

 

 

 

 

 

Kant

Grandeurs et descendances des Lumières

Qu’est-ce que l’obscurantisme socialiste ?

 

 

 

 

 

 

 

Karinthy

Farémido, Epépé, ou les pays du langage

 

 

 

 

 

 

Kawabata

Pissenlits, Premières neiges sur le Mont Fuji

 

 

 

 

 

 

Kehlmann

Tyll Ulespiegle, Les Arpenteurs du monde

 

 

 

 

 

 

Kertész

Kertész : Sauvegarde contre l'antisémitisme

 

 

 

 

 

 

 

Kjaerstad

Le Séducteur, Le Conquérant, Aléa

 

 

 

 

 

 

Knausgaard

Autobiographies scandinaves

 

 

 

 

 

 

Kosztolanyi

Portraits, Kornél Esti

 

 

 

 

 

 

 

Krazsnahorkaï

La Venue d'Isaie ; Guerre & Guerre

Le retour de Seiobo et du baron Wenckheim

 

 

 

 

 

 

 

La Fontaine

Des Fables enfantines et politiques

Guinhut : Fables politiques

 

 

 

 

 

 

Lagerlöf

Le voyage de Nils Holgersson

 

 

 

 

 

 

 

Lainez

Lainez : Bomarzo ; Fresan : Melville

 

 

 

 

 

 

 

Lamartine

Le lac, élégie romantique

 

 

 

 

 

 

 

Lampedusa

Le Professeur et la sirène

 

 

 

 

 

 

Langage

Euphémisme et cliché euphorisant, novlangue politique

Langage politique et informatique

Langue de porc et langue inclusive

Vulgarité langagière et règne du langage

L'arabe dans la langue française

George Steiner, tragédie et réelles présences

Vocabulaire européen des philosophies

Ben Marcus : L'Alphabet de flammes

 

 

 

 

 

 

Larsen 

L’Extravagant voyage de T.S. Spivet

 

 

 

 

 

 

 

Legayet

Satire de la cause animale et botanique

 

 

 

 

 

 

Leopardi

Génie littéraire et Zibaldone par Citati

 

 

 

 

 

 

 

Lévi-Strauss

Claude Lévi-Strauss juge de l’Islam

 

 

 

 

 

 

 

Libertés, Libéralisme

Pourquoi je suis libéral

Pour une éducation libérale

Du concept de liberté aux Penseurs libéraux

Lettre à une jeune femme politique

Le libre arbitre devant le bien et le mal

Requiem pour la liberté d’expression

Qui est John Galt ? Ayn Rand : La Grève

Ayn Rand : Atlas shrugged, la grève libérale

Mario Vargas Llosa, romancier des libertés

Homosexualité, drogues, prostitution

Serions-nous plus libres sans l'Etat ?

Tempérament et rationalisme politique

Front Socialiste National et antilibéralisme

Rome du libéralisme au socialisme

 

 

 

 

 

 

Lins

Osman Lins : Avalovara, carré magique

 

 

 

 

 

 

 

Littell

Les Bienveillantes, mythe et histoire

 

 

 

 

 

 

 

Lorca

La Colombe de Federico Garcia Lorca

 

 

 

 

 

 

Lovecraft

Depuis l'abîme du temps : l'appel de Cthulhu

Lovecraft, Je suis Providence par S.T. joshi

 

 

 

 

 

 

Lugones

Fantastique, anticipation, Forces étranges

 

 

 

 

 

 

Lumières

Grandeurs et descendances des Lumières

D'Holbach : La Théologie portative

Tolérer Voltaire et non le fanatisme

 

 

 

 

 

Machiavel

Actualités de Machiavel : Le Prince

 

 

 

 

 

 

 

Magris

Secrets et Enquête sur une guerre classée

 

 

 

 

 

 

 

Makouchinski

Un bateau pour l'Argentine

 

 

 

 

 

 

Mal

Hannah Arendt : De la banalité du mal

De l’origine et de la rédemption du mal : théologie, neurologie et politique

Le libre arbitre devant le bien et le mal

Christianophobie et désir de barbarie

Cabré Confiteor, Menéndez Salmon Medusa

Roberto Bolano : 2666, Nocturne du Chili

 

 

 

 

 

 

 

Maladie, peste

Maladie et métaphore : Wagner, Maï, Zorn

Pandémies historiques et idéologiques

Pandémies littéraires : M Shelley, J London, G R. Stewart, C McCarthy

 

 

 

 

 

 

 

Mandelstam

Poésie à Voronej et Oeuvres complètes

Trois requiem, sonnets

 

 

 

 

 

 

 

Manguel

Le cheminement dantesque de la curiosité

Le Retour et Nouvel éloge de la folie

Voyage en utopies

Lectures du mythe de Frankenstein

Je remballe ma bibliothèque

Du mythe européen aux Lettres européennes

 

 

 

 

 

 

 

Mann Thomas

Thomas Mann magicien faustien du roman

 

 

 

 

 

 

 

Marcher

De L’Art de marcher

Flâneurs et voyageurs

Le Passage des sierras

Le Recours aux Monts du Cantal

Trois vies d’Heinz M. I Une année sabbatique

 

 

 

 

 

 

Marcus

L’Alphabet de flammes, conte philosophique

 

 

 

 

 

 

Mari

Les Folles espérances, fresque italienne

 

 

 

 

 

 

 

Marino

Adonis, un grand poème baroque

 

 

 

 

 

 

Marivaux

Le Jeu de l'amour et du hasard

 

 

 

 

 

 

Martin Georges R.R.

Le Trône de fer, La Fleur de verre : fantasy, morale et philosophie politique

 

 

 

 

 

 

Martin Jean-Clet

Philosopher la science-fiction et le cinéma

Enfer de la philosophie et Coup de dés

Déconstruire Derrida

 

 

 

 

 

 

 

Marx

Karl Marx, théoricien du totalitarisme

« Hommage à la culture communiste »

De l’argument spécieux des inégalités

 

 

 

 

 

 

Mattéi

Petit précis de civilisations comparées

 

 

 

 

 

 

 

McEwan

Satire et dystopie : Une Machine comme moi, Sweet Touch, Solaire

 

 

 

 

 

 

Méditerranée

Histoire et visages de la Méditerranée

 

 

 

 

 

 

Mélancolie

Mélancolie de Burton à Földenyi

 

 

 

 

 

 

 

Melville

Billy Budd, Olivier Rey, Chritophe Averlan

Roberto Abbiati : Moby graphick

 

 

 

 

 

 

Mille et une nuits

Les Mille et une nuits de Salman Rushdie

Schéhérazade, Burton, Hanan el-Cheikh

 

 

 

 

 

 

Mitchell

Des Ecrits fantômes aux Mille automnes

 

 

 

 

 

 

 

Mode

Histoire et philosophie de la mode

 

 

 

 

 

 

Montesquieu

Eloge des arts, du luxe : Lettres persanes

Lumière de L'Esprit des lois

 

 

 

 

 

 

 

Moore

La Voix du feu, Jérusalem, V for vendetta

 

 

 

 

 

 

 

Morale

Notre virale tyrannie morale

 

 

 

 

 

 

 

More

Etat, utopie, justice sociale : More, Ogien

 

 

 

 

 

 

Morrison

Délivrances : du racisme à la rédemption

L'amour-propre de l'artiste

 

 

 

 

 

 

 

Moyen Âge

Rythmes et poésies au Moyen Âge

Umberto Eco : Baudolino

Christine de Pizan, poète feministe

Troubadours et érotisme médiéval

Le Goff, Hildegarde de Bingen

 

 

 

 

 

 

Mulisch

Siegfried, idylle noire, filiation d’Hitler

 

 

 

 

 

 

 

Murakami Haruki

Le meurtre du commandeur, Kafka

Les licornes de La Fin des temps

 

 

 

 

 

 

Musique

Musique savante contre musique populaire

Pour l'amour du piano et des compositrices

Les Amours de Brahms et Clara Schumann

Mizubayashi : Suite, Recondo : Grandfeu

Jankélévitch : L'Enchantement musical

Lady Gaga versus Mozart La Reine de la nuit

Lou Reed : chansons ou poésie ?

Schubert : Voyage d'hiver par Ian Bostridge

Grozni : Chopin contre le communisme

Wagner : Tristan und Isold et l'antisémitisme

 

 

 

 

 

 

Mythes

La Genèse illustrée par l'abstraction

Frankenstein par Manguel et Morvan

Frankenstein et autres romans gothiques

Dracula et autres vampires

Testart : L'Amazone et la cuisinière

Métamorphoses d'Ovide

Luc Ferry : Mythologie et philosophie

L’Enfer, mythologie des lieux, Hugo Lacroix

 

 

 

 

 

 

 

Nabokov

La Vénitienne et autres nouvelles

De l'identification romanesque

 

 

 

 

 

 

 

Nadas

Mémoire et Mélancolie des sirènes

La Bible, Almanach

 

 

 

 

 

 

Nadaud

Des montagnes et des dieux, deux fictions

 

 

 

 

 

 

Naipaul

Masque de l’Afrique, Semences magiques

 

 

 

 

 

 

 

Nietzsche

Bonheurs, trahisons : Dictionnaire Nietzsche

Romantisme et philosophie politique

Nietzsche poète et philosophe controversé

Les foudres de Nietzsche sont en Pléiade

Jean-Clet Martin : Enfer de la philosophie

Violences policières et antipolicières

 

 

 

 

 

 

Nooteboom

L’écrivain au parfum de la mort

 

 

 

 

 

 

Norddahl

SurVeillance, holocauste, hermaphrodisme

 

 

 

 

 

 

Oates

Le Sacrifice, Mysterieux Monsieur Kidder

 

 

 

 

 

 

 

Ôé Kenzaburo

Ôé, le Cassandre nucléaire du Japon

 

 

 

 

 

 

Ogawa 

Cristallisation secrète du totalitarisme

Au Musée du silence : Le Petit joueur d’échecs, La jeune fille à l'ouvrage

 

 

 

 

 

 

Onfray

Faut-il penser Michel Onfray ?

Censures et Autodafés

Cosmos

 

 

 

 

 

 

Oppen

Oppen, objectivisme et Format américain

Oppen

 

Orphée

Fonctions de la poésie, pouvoirs d'Orphée

 

 

 

 

 

 

Orwell

L'orwellisation sociétale

Cher Big Brother, Prism américain, français

Euphémisme, cliché euphorisant, novlangue

Contrôles financiers ou contrôles étatiques ?

Orwell 1984

 

Ovide

Métamorphoses et mythes grecs

 

 

 

 

 

 

 

Palahniuk

Le réalisme sale : Peste, L'Estomac, Orgasme

 

 

 

 

 

 

Palol

Le Jardin des Sept Crépuscules, Le Testament d'Alceste

 

 

 

 

 

 

 

Pamuk

Autobiographe d'Istanbul

Le musée de l’innocence, amour, mémoire

 

 

 

 

 

 

 

Panayotopoulos

Le Gène du doute, ou l'artiste génétique

Panayotopoulos

 

Panofsky

Iconologie de la Renaissance

 

 

 

 

 

 

Paris

Les Chiffonniers de Paris au XIX°siècle

 

 

 

 

 

 

 

Pasolini

Sonnets des tourments amoureux

 

 

 

 

 

 

Pavic

Dictionnaire khazar, Boite à écriture

 

 

 

 

 

 

 

Peinture

Traverser la peinture : Arasse, Poindron

Le tableau comme relique, cri, toucher

Peintures et paysages sublimes

Sonnets des peintres : Crivelli, Titien, Rohtko, Tapiès, Twombly

 

 

 

 

 

 

Perec

Les Lieux de Georges Perec

 

 

 

 

 

 

 

Perrault

Des Contes pour les enfants ?

Perrault Doré Chat

 

Pétrarque

Eloge de Pétrarque humaniste et poète

Du Canzoniere aux Triomphes

 

 

 

 

 

 

 

Petrosyan

La Maison dans laquelle

 

 

 

 

 

 

Philosophie

Mondialisations, féminisations philosophiques

 

 

 

 

 

 

Photographie

Photographie réaliste et platonicienne : Depardon, Meyerowitz, Adams

La photographie, biographème ou oeuvre d'art ? Benjamin, Barthes, Sontag

Ben Loulou des Sanguinaires à Jérusalem

Ewing : Le Corps, Love and desire

 

 

 

 

 

 

Picaresque

Smollett, Weerth : Vaurien et Chenapan

 

 

 

 

 

 

 

Pic de la Mirandole

Humanisme philosophique : 900 conclusions

 

 

 

 

 

 

Pierres

Musée de minéralogie, sexe des pierres

 

 

 

 

 

 

Pisan

Cent ballades, La Cité des dames

 

 

 

 

 

 

Platon

Faillite et universalité de la beauté

 

 

 

 

 

 

Poe

Edgar Allan Poe, ange du bizarre

 

 

 

 

 

 

 

Poésie

Anthologie de la poésie chinoise

À une jeune Aphrodite de marbre

Brésil, Anthologie XVI°- XX°

Chanter et enchanter en poésie 

Emaz, Sacré : anti-lyrisme et maladresse

Fonctions de la poésie, pouvoirs d'Orphée

Histoire de la poésie du XX° siècle

Japon poétique d'aujourd'hui

Lyrisme : Riera, Voica, Viallebesset, Rateau

Marteau : Ecritures, sonnets

Oppen, Padgett, Objectivisme et lyrisme

Pizarnik, poèmes de sang et de silence

Poésie en vers, poésie en prose

Poésies verticales et résistances poétiques

Du romantisme à la Shoah

Anthologies et poésies féminines

Trois vies d'Heinz M, vers libres

Schlechter : Le Murmure du monde

 

 

 

 

 

 

Pogge

Facéties, satires morales et humanistes

 

 

 

 

 

 

 

Policier

Chesterton, prince de la nouvelle policière

Terry Hayes : Je suis Pilgrim ou le fanatisme

Les crimes de l'artiste : Pobi, Kellerman

Bjorn Larsson : Les Poètes morts

Chesterton father-brown

 

Populisme

Populisme, complotisme et doxa

 

 

 

 

 

 

 

Porter
La Douleur porte un masque de plumes

 

 

 

 

 

 

 

Portugal

Pessoa et la poésie lyrique portugaise

Tavares : un voyage en Inde et en vers

 

 

 

 

 

 

Pound

Ezra Pound, poète politique controversé par Mary de Rachewiltz et Pierre Rival

 

 

 

 

 

 

Powers

Générosité, Chambre aux échos, Sidérations

Orfeo, le Bach du bioterrorisme

L'éco-romancier de L'Arbre-monde

 

 

 

 

 

 

 

Pressburger

L’Obscur royaume, ou l’enfer du XX° siècle

Pressburger

 

Proust

Le baiser à Albertine : À l'ombre des jeunes filles en fleurs

Illustrations, lectures et biographies

Le Mystérieux correspondant, 75 feuillets

Céline et Proust, la recherche du voyage

 

 

 

 

 

 

Pynchon

Contre-jour, une quête de lumière

Fonds perdus du web profond & Vice caché

Vineland, une utopie postmoderne

 

 

 

 

 

 

 

Racisme

Racisme et antiracisme

Pour l'annulation de la Cancel culture

Ecrivains noirs : Wright, Ellison, Baldwin, Scott Heron, Anthologie noire

 

 

 

 

 

 

Rand

Qui est John Galt ? La Source vive, La Grève

Atlas shrugged et La grève libérale

 

 

 

 

 

 

Raspail

Sommes-nous islamophobes ?

Camp-des-Saints

 

Reed Lou

Chansons ou poésie ? L’intégrale

 

 

 

 

 

 

 

Religions et Christianisme

Pourquoi nous ne sommes pas religieux

Catholicisme versus polythéisme

Eloge du blasphème

De Jésus aux chrétiennes uchronies

Le Livre noir de la condition des Chrétiens

D'Holbach : Théologie portative et humour

De l'origine des dieux ou faire parler le ciel

Eloge paradoxal du christianisme

 

 

 

 

 

 

Renaissance

Renaissance historique et humaniste

 

 

 

 

 

 

 

Revel

Socialisme et connaissance inutile

 

 

 

 

 

 

 

Richter Jean-Paul

Le Titan du romantisme allemand

 

 

 

 

 

 

 

Rios

Nouveaux chapeaux pour Alice, Chez Ulysse

 

 

 

 

 

 

Rilke

Sonnets à Orphée, Poésies d'amour

 

 

 

 

 

 

 

Roman 

Adam Thirlwell : Le Livre multiple

L'identification romanesque : Nabokov, Mann, Flaubert, Orwell...

Nabokov Loilita folio

 

Rome

Causes et leçons de la chute de Rome

Rome de César à Fellini

Romans grecs et latins

 

 

 

 

 

 

 

Ronsard

Sonnets pour Hélène LXVIII Commentaire

 

 

 

 

 

 

 

Rostand

Cyrano de Bergerac : amours au balcon

 

 

 

 

 

 

Roth Philip

Hitlérienne uchronie contre l'Amérique

Les Contrevies de la Bête qui meurt

 

 

 

 

 

 

Rousseau

Archéologie de l’écologie politique

De l'argument spécieux des inégalités

 

 

 

 

 

 

 

Rushdie

Joseph Anton, plaidoyer pour les libertés

Quichotte, Langages de vérité

Entre Averroès et Ghazali : Deux ans huit mois et vingt-huit nuits

Rushdie 6

 

Russell

De la fumisterie intellectuelle

Pourquoi nous ne sommes pas religieux

Russell F

 

Russie

Islam, Russie, choisir ses ennemis

Golovkina : Les Vaincus ; Annenkov : Journal

Les dystopies de Zamiatine et Platonov

Isaac Babel ou l'écriture rouge

Ludmila Oulitskaia ou l'âme de l'Histoire

Bounine : Coup de soleil, nouvelles

 

 

 

 

 

 

 

Sade

Sade, ou l’athéisme de la sexualité

 

 

 

 

 

 

 

San-Antonio

Rire de tout ? D’Aristote à San-Antonio

 

 

 

 

 

 

 

Sansal

2084, conte orwellien de la théocratie

Le Train d'Erlingen, métaphore des tyrannies

 

Schlink

Filiations allemandes : Le Liseur, Olga

 

 

 

 

 

 

Schmidt Arno

Un faune pour notre temps politique

Le marcheur de l’immortalité

Arno Schmidt Scènes

 

Sciences

Agonie scientifique et sophisme français

Transhumanisme, intelligence artificielle, robotique

Tyrannie écologique et suicide économique

Wohlleben : La Vie secrète des arbres

Factualité, catastrophisme et post-vérité

Cosmos de science, d'art et de philosophie

Science et guerre : Volpi, Labatut

L'Eglise est-elle contre la science ?

Inventer la nature : aux origines du monde

Minéralogie et esthétique des pierres

 

 

 

 

 

 

Science fiction

Philosopher la science fiction

Ballard : un artiste de la science fiction

Carrion : les orphelins du futur

Dyschroniques et écofictions

Gibson : Neuromancien, Identification

Le Guin : La Main gauche de la nuit

Magnason : LoveStar, Kling : Quality Land

Miller : L’Univers de carton, Philip K. Dick

Mnémos ou la mémoire du futur

Silverberg : Roma, Shadrak, stochastique

Simmons : Ilium et Flashback géopolitiques

Sorokine : Le Lard bleu, La Glace, Telluria

Stalker, entre nucléaire et métaphysique

Théorie du tout : Ourednik, McCarthy

 

 

 

 

 

 

 

Self 

Will Self ou la théorie de l'inversion

Parapluie ; No Smoking

 

 

 

 

 

 

 

Sender

Le Fugitif ou l’art du huis-clos

 

 

 

 

 

 

 

Seth

Golden Gate. Un roman en sonnets

Seth Golden gate

 

Shakespeare

Will le magnifique ou John Florio ?

Shakespeare et la traduction des Sonnets

À une jeune Aphrodite de marbre

La Tempête, Othello : Atwood, Chevalier

 

 

 

 

 

 

 

Shelley Mary et Percy Bysshe

Le mythe de Frankenstein

Frankenstein et autres romans gothiques

Le Dernier homme, une peste littéraire

La Révolte de l'Islam

Frankenstein Shelley

 

Shoah

Ecrits des camps, Philosophie de la shoah

De Mein Kampf à la chambre à gaz

Paul Celan minotaure de la poésie

 

 

 

 

 

 

Silverberg

Uchronies et perspectives politiques : Roma aeterna, Shadrak, L'Homme-stochastique

 

 

 

 

 

 

 

Simmons

Ilium et Flashback géopolitiques

 

 

 

 

 

 

Sloterdijk

Les sphères de Peter Sloterdijk : esthétique, éthique politique de la philosophie

Gris politique et Projet Schelling

Contre la « fiscocratie » ou repenser l’impôt

Les Lignes et les jours. Notes 2008-2011

Elégie des grandeurs de la France

Faire parler le ciel. De la théopoésie

Archéologie de l’écologie politique

 

 

 

 

 

 

Smith Adam

Pourquoi je suis libéral

Tempérament et rationalisme politique

 

 

 

 

 

 

 

Smith Patti

De Babel au Livre de jours

 

 

 

 

 

 

Sofsky

Violence et vices politiques

Surveillances étatiques et entrepreneuriales

 

 

 

 

 

 

 

Sollers

Vie divine de Sollers et guerre du goût

Dictionnaire amoureux de Venise

Sollersd-vers-le-paradis-dante

 

Somoza

Daphné disparue et les Muses dangereuses

Les monstres de Croatoan et de Dieu mort

 

 

 

 

 

 

Sonnets

À une jeune Aphrodite de marbre

Barrett Browning et autres sonnettistes 

Marteau : Ecritures  

Pasolini : Sonnets du tourment amoureux

Phénix, Anthologie de sonnets

Seth : Golden Gate, roman en vers

Shakespeare : Six Sonnets traduits

Haushofer : Sonnets de Moabit

Sonnets autobiographiques

Sonnets de l'Art poétique

 

 

 

 

 

 

Sorcières

Sorcières diaboliques et féministes

 

 

 

 

 

 

Sorokine

Le Lard bleu, La Glace, Telluria

 

 

 

 

 

 

 

Sorrentino

Ils ont tous raison, déboires d'un chanteur

 

 

 

 

 

 

 

Sôseki

Rafales d'automne sur un Oreiller d'herbes

Poèmes : du kanshi au haïku

 

 

 

 

 

 

 

Spengler

Déclin de l'Occident de Spengler à nos jours

 

 

 

 

 

 

 

Sport

Vulgarité sportive, de Pline à 0rwell

 

 

 

 

 

 

 

Staël

Libertés politiques et romantiques

 

 

 

 

 

 

Starobinski

De la Mélancolie, Rousseau, Diderot

Starobinski 1

 

Steiner

Oeuvres : tragédie et réelles présences

De l'incendie des livres et des bibliothèques

 

 

 

 

 

 

 

Stendhal

Julien lecteur bafoué, Le Rouge et le noir

L'échelle de l'amour entre Julien et Mathilde

Les spectaculaires funérailles de Julien

 

 

 

 

 

 

 

Stevenson

La Malle en cuir ou la société idéale

Stevenson

 

Stifter

L'Arrière-saison des paysages romantiques

 

 

 

 

 

 

Strauss Leo

Pour une éducation libérale

 

 

 

 

 

 

Strougatski

Stalker, nucléaire et métaphysique

 

 

 

 

 

 

 

Szentkuthy

Le Bréviaire de Saint Orphée, Europa minor

 

 

 

 

 

 

Tabucchi

Anges nocturnes, oiseaux, rêves

 

 

 

 

 

 

 

Temps, horloges

Landes : L'Heure qu'il est ; Ransmayr : Cox

Temps de Chronos et politique des oracles

 

 

 

 

 

 

 

Tesich

Price et Karoo, revanche des anti-héros

Karoo

 

Texier

Le démiurge de L’Alchimie du désir

 

 

 

 

 

 

 

Théâtre et masques

Masques & théâtre, Fondation Bodmer

 

 

 

 

 

 

Thoreau

Journal, Walden et Désobéissance civile

 

 

 

 

 

 

 

Tocqueville

Française tyrannie, actualité de Tocqueville

Au désert des Indiens d’Amérique

 

 

 

 

 

 

Tolstoï

Sonate familiale chez Sofia & Léon Tolstoi, chantre de la désobéissance politique

 

 

 

 

 

 

 

Totalitarismes

Ampuero : la faillite du communisme cubain

Arendt : banalité du mal et de la culture

« Hommage à la culture communiste »

De Mein Kampf à la chambre à gaz

Karl Marx, théoricien du totalitarisme

Lénine et Staline exécuteurs du totalitarisme

Mussolini et le fascisme

Pour l'annulation de la Cancel culture

Muses Academy : Polymnie ou la tyrannie

Tempérament et rationalisme politique 

Hayes : Je suis Pilgrim ; Tejpal

Meerbraum, Mandelstam, Yousafzai

 

 

 

 

 

 

 

Trollope

L’Ange d’Ayala, satire de l’amour

Trollope ange

 

Trump

Entre tyrannie et rhinocérite, éloge et blâme

À la recherche des années Trump : G Millière

 

 

 

 

 

 

 

Tsvetaeva

Poèmes, Carnets, Chroniques d’un goulag

Tsvetaeva Clémence Hiver

 

Ursin

Jean Ursin : La prosopopée des animaux

 

 

 

 

 

 

Utopie, dystopie, uchronie

Etat et utopie de Thomas More

Zamiatine, Nous et l'Etat unitaire

Huxley : Meilleur des mondes, Temps futurs

Orwell, un novlangue politique

Margaret Atwood : La Servante écarlate

Hitlérienne uchronie : Lewis, Burdekin, K.Dick, Roth, Scheers, Walton

Utopies politiques radieuses ou totalitaires : More, Mangel, Paquot, Caron

Dyschroniques, dystopies

Ernest Callenbach : Ecotopia

Herland parfaite république des femmes

A. Waberi : Aux Etats-unis d'Afrique

Alan Moore : V for vendetta, Jérusalem

L'hydre de l'Etat : Karlsson, Sinisalo

 

 

 

 

 

 

Valeurs, relativisme

De Nathalie Heinich à Raymond Boudon

 

 

 

 

 

 

 

Vargas Llosa

Vargas Llosa, romancier des libertés

Aux cinq rues Lima, coffret Pléiade

Littérature et civilisation du spectacle

Rêve du Celte et Temps sauvages

Journal de guerre, Tour du monde

Arguedas ou l’utopie archaïque

Vargas-Llosa-alfaguara

 

Venise

Strates vénitiennes et autres canaux d'encre

 

 

 

 

 

 

 

Vérité

Maîtres de vérité et Vérité nue

 

 

 

 

 

 

Verne

Colonialisme : de Las Casas à Jules Verne

 

 

 

 

 

 

Vesaas

Le Palais de glace

 

 

 

 

 

 

Vigolo

La Virgilia, un amour musical et apollinien

Vigolo Virgilia 1

 

Vila-Matas

Vila-Matas écrivain-funambule

 

 

 

 

 

 

Vin et culture alimentaire

Histoire du vin et de la bonne chère de la Bible à nos jours

 

 

 

 

 

 

Visage

Hans Belting : Faces, histoire du visage

 

 

 

 

 

 

 

Vollmann

Le Livre des violences

Central Europe, La Famille royale

Vollmann famille royale

 

Volpi

Volpi : Klingsor. Labatut : Lumières aveugles

Des cendres du XX°aux cendres du père

Volpi Busca 3

 

Voltaire

Tolérer Voltaire et non le fanatisme

Espmark : Le Voyage de Voltaire

 

 

 

 

 

 

 

Vote

De l’humiliation électorale

Front Socialiste National et antilibéralisme

 

 

 

 

 

 

 

Voyage, villes

Villes imaginaires : Calvino, Anderson

Flâneurs, voyageurs : Benjamin, Woolf

 

 

 

 

 

 

 

Wagner

Tristan und Isolde et l'antisémitisme

 

 

 

 

 

 

 

Walcott

Royaume du fruit-étoile, Heureux voyageur

Walcott poems

 

Walton

Morwenna, Mes vrais enfants

 

 

 

 

 

 

Welsh

Drogues et sexualités : Trainspotting, La Vie sexuelle des soeurs siamoises

 

 

 

 

 

 

 

Whitman

Nouvelles et Feuilles d'herbes

 

 

 

 

 

 

 

Wideman

Trilogie de Homewood, Projet Fanon

Le péché de couleur : Mémoires d'Amérique

Wideman Belin

 

Williams

Stoner, drame d’un professeur de littérature

Williams Stoner939

 

 

Wolfe

Le Règne du langage

 

 

 

 

 

 

Wordsworth

Poésie en vers et poésie en prose

 

 

 

 

 

 

 

Yeats

Derniers poèmes, Nôs irlandais, Lettres

 

 

 

 

 

 

 

Zamiatine

Nous : le bonheur terrible de l'Etat unitaire

 

 

 

 

 

 

Zao Wou-Ki

Le peintre passeur de poètes

 

 

 

 

 

 

 

Zimler

Lazare, Le ghetto de Varsovie

 

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